Éviter les erreurs de casting maintenant !

1er juillet 2006

Les socialistes ont achevé, six mois après la synthèse du Mans, leur projet pour la France. L’exercice n’a évidemment pas été de tout repos compte tenu de l’impératif de crédibilité donc de consultations tous azimuts, de la situation socio-économique du pays fortement dégradée par les gouvernements Raffarin puis Villepin et enfin d’une plus vive pression “concurrentielle” à gauche induite par le vote du 29 mai. Qui prendra cependant la peine de lire le texte s’apercevra sans grande difficulté la cohérence de l’ensemble mais surtout que la ligne qui imprime plus fortement ce projet est celle du socialisme de transformation, même si d’aucun pourrait encore la trouver timide. En d’autres termes, la victoire des minorités Fabius, Mélenchon, Emmanuelli, Montebourg... celles qui ont défendu le “non” le 29 mai 2005. Ce projet bien expliqué, les électeurs n’auraient de toute évidence pas à se contenter d’un frustrant vote utile.
Pour comprendre son économie générale, quelques marqueurs peuvent suffire : une ferme volonté de refonte fiscale orientée dans une direction de plus juste répartition de la richesse créée en faveur du travail, une nette amélioration de la situation sociale du salarié (augmentation substantielle du SMIC, donc aussi des salaires rattachés, un renforcement de la sécurité professionnelle, une représentation syndicale améliorée, une extension des 35h...), une courageuse rupture avec l’orientation libérale de l’Europe en osant ainsi prendre le contre-pied du SPD allemand, mais aussi du “blairisme”, ou encore du “prodisme”, un retour au giron national pour certains services publics et un renforcement d’autres de sorte à re-conférer à l’État sa fonction première de protection des citoyens, une réforme institutionnelle qui revitalise la démocratie représentative, etc., etc. Évidemment, il y a encore des insuffisances ou des points encore trop obscurs, notamment la question de l’éducation, mais qui feront sans conteste l’objet d’explications d’ici la désignation du candidat.
Abreuvé de sondages convergents, l’électeur d’avril/mai 2007 pourrait croire l’équation socialiste résolue. Il n’en est rien. Entre l’intérêt supérieur du pays à bien défendre à l’intérieur et à l’extérieur, en Europe et dans le monde, entre la compatibilité du candidat avec le projet socialiste et la stratégie d’union du parti, entre la rugosité de la campagne à venir, les paramètres de l’équation sont multiples et les électeurs socialistes, en connaissance et en conscience, ne cèderont pas en novembre à la tentative de dictature de la part de médias ... animés par une incontestable envie de revanche depuis le référendum. Plus clairement, tout le monde sait qu’une hirondelle ne fait pas le printemps et les dernières déclarations de Ségolène Royal attestent manifestement de son décalage avec ce projet. Pour mémoire, c’est - entre autres choses - ce même décalage voulu par Lionel Jospin en 2002 ("mon projet n’est pas socialiste" avait-il déclaré !) qui a valu à son camp dispersion et faible dynamique. Jouer la victoire exige de ne pas commettre d’erreur de casting. On ne peut en effet pas vouloir "réussir ensemble le changement" et désigner un candidat à la présidentielle et, dans encore une moindre mesure, des tickets de candidats à la députation qui n’incarnent pleinement ce slogan ... aux yeux du corps électoral. C’est bien connu, mais un bon rappel n’est jamais de trop.

Jean-Hugues Savigny
(Militant socialiste, La Possession)


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