Ils sont fous, ces Mauriciens !

14 novembre 2005

C’est toujours un grand plaisir que d’aller chez nos cousins mauriciens, mais qu’est-ce qu’ils sont fous ! Ils ne font vraiment rien comme nous, leurs cousins.
D’abord, ils circulent à gauche. Comme s’ils ne pouvaient pas faire comme tout le monde ! Mais cela on le savait, donc on n’est pas surpris.
Mais, pour rester dans la circulation, notre voiture quittait Plaisance pour se rendre à Port-Louis, et voilà pas qu’avant d’arriver à Curepipe, on rencontre une voiture de police sur le bord de la route et 3 policiers à regarder les voitures circuler. Et de Curepipe à Port-Louis, on en a rencontré encore d’autres, par 2 fois ! Le lendemain, de Port-Louis à Vacoas, même scénario.
Ils n’ont vraiment pas grand-chose à faire les policiers là-bas. Car les voyant au loin, les automobilistes ont, instinctivement, la fâcheuse tendance de lever le pied... alors que sur ces grands axes, ils auraient plutôt tendance à appuyer sur le champignon : on imagine d’ici les conséquences sur la circulation.
Mieux, on trouve encore là-bas des policiers à faire la circulation ! Tant à Port-Louis qu’à Vacoas, à Curepipe ou ailleurs. Il y a même là-bas des postes de police jusque dans les quartiers !
Ici, cela fait longtemps que l’on a abandonné de tels comportements pour la modernité. On ne met plus de gendarmes ni de policiers sur les routes : les coups de soleils, cela coûte cher à la sécurité sociale. Quant à faire la circulation, il ne faut pas plaisanter, l’État n’a pas de l’argent à gaspiller ! Et puis, les bouchons, ça rapporte des sous.
Non, nous, c’est la modernité et l’économie : on fait des “opérations coup de poings” de nuit à cause du soleil, avec mobilisation de sous-préfet et surtout de télévisions ! Çà, c’est de la belle ouvrage ! Le ministre en donne bien l’exemple.
Après cela, allez dire que nos cousins ne sont pas fous ! D’autant que cela ne se limite pas à la circulation.

Tenez, figurez-vous qu’ils parlent créole, ces couyons-là ! Tous, partout, tout le temps ! Même les ministres, là-bas, ils causent créole. Pas seulement à la case, en catimini, ou à la limite dans leurs bureaux, entre 4 zieux, mais à la télévision ! Devant tout le monde ! Ils n’ont vraiment pas honte !
De plus, si vous prenez le téléphone pour appeler une entreprise, une administration, un ministère et même un poste de police, ils vous répondent en créole ! Ce n’est pas ici que cela se passerait où personne ne se déshonorait à répondre au téléphone ainsi en créole ! Nous, si i tourne pas la langue, chappez ! On est Français, nous, et même Européen, foutor ! On n’a pas perdu nos droits non ?
Ils ne se rendent pas compte, les cousins-cousines, mais ils sont là entrain de se déculturer et même de s’acculturer, ces couyons-là !
Mais le comble, c’est qu’ils parlent le français, sans complexes et parfois même mieux que nous, leurs cousins pourtant Français ; ils parlent aussi l’anglais, et d’autres langues encore ! Il arrive même que dans la conversation, ils mélangent tout ! Pire, ils l’écrivent, dans les journaux ! Alors, là, du coup, c’est nous qui sommes couyonnés, car on ne comprends plus rien !

Non, ils font vraiment n’importe quoi les cousins-cousines. Tenez, j’ai vu là-bas dans la presse, qu’une éminente professeur d’université et quelques unes de ses collègues se sont amusées à créer une association pour s’occuper, en dehors de leur temps de travail, de petites filles issues de familles pauvres ! Elles les aident dans leur équipement, les suivent et essaient de faire tout pour que ces petites arrivent, elles aussi, à l’université ! Et maintenant elles veulent même s’occuper des petits garçons ! C’est pas fou çà ? Alors qu’il y a de si belles plages là-bas et que de l’étude comparée de la grosseur des grains de sable, à celle de leur texture, il y a là tout un champ qui devrait mobiliser les chercheurs. Dans l’intérêt de la planète, bien entendu !
Toujours dans la presse, j’ai lu que les employés d’une grande banque n’avaient rien trouvé de mieux à faire, un samedi par an, que de mettre des salopettes, des bleus de travail, de s’équiper de pinceaux, de peinture, de marteaux, etc..., pour aller repeindre, refaire dans des hospices, dans des cantines, etc...
Ça ne mange pas de pain me direz-vous et c’est même un peu démago de la part du banquier, qui se fait là une bonne publicité gratuite, je vous l’accorde, mais ce n’est pas ici qu’on verrait des banquiers ou des grands directeurs entrain de repeindre les murs d’un hospice ! Ils ont d’autres chats à fouetter.
Non, ils sont bien fous, nos cousins. Mais après tout, on les aime bien. Ne sommes-nous pas plusieurs centaines de milliers à nous rendre chez eux chaque année... pour leur acheter ce qu’ils produisent ? C’est à se demander si nous ne sommes pas encore plus fous qu’eux.

Georges-Marie Lépinay

PS - En une semaine passée là-bas, nous n’avons pas trouvé trace du chikungunya. Même pas dans les journaux. Voilà au moins quelque chose que nous avons et qu’ils n’ont pas. À croire que pendant qu’ici, les autorités françaises s’occupent à expulser les étrangers, eux, ils n’ont pas laissé entrer chez eux le moustique du chikungunya ! “Moustique déors !” Et ils ont réussi.

(1) “Couyon”, “couyonner”, ce n’est pas une faute d’orthographe ; c’est tout simplement écrit en... créole (mauricien et réunionnais).


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