Immigration : un calcul politique pervers

27 mai 2006

Pour l’électorat populaire, il ne se passe pas de semaine sans qu’intervienne une raison supplémentaire de souhaiter se débarrasser au plus vite du régime Chirac-Villepin-Sarkozy.
Il ne gagne rien de direct à toutes ces affaires dont on parle partout mais, pendant qu’elles occupent la galerie, il travaille moins à sa perte qu’à sa succession. Tout se passe comme [si ce régime] était pressé de mal faire, avant que de ne plus en pouvoir, dans la conviction perverse qui semble être la sienne d’un calcul au triple intérêt pour avantage final.
Le premier vise à se renforcer en donnant des gages à l’extrême droite dans l’espoir de recycler ses cadres et ses voix, créant ainsi les conditions d’un maintien ou d’une reconquête rapide du pouvoir.
Le deuxième est de redonner un contenu à la perspective d’alternance en gauchissant le discours socialiste de l’extérieur, en effet de contraste par défaut.
Le troisième est de parier sur la pérennité de lois que les socialistes, vainqueurs possibles sinon probables ne seraient, pense-t-on, pas enclins à remettre en cause bien qu’ils aient redoré leur blason en les dénonçant.
C’est dans ce contexte stratégique marqué par le mépris le plus souverain à l’égard de velléités d’alternative que ni la droite ni la gauche libérale ne prennent au sérieux, que vient d’être votée la loi sur l’immigration dont il est peu de dire à quel point elle est scélérate et adaptée au triple objectif précédemment énoncé. Elle donne une partie de ce qu’elle souhaite à l’extrême droite populiste ; elle réassigne au PS son identité de gauche au petit prix d’une opposition humaniste convenue ; elle s’inscrit dans le droit avec l’assentiment de nombreux français socialement insécurisés en sorte que les socialistes revenus au pouvoir et pris en eux-mêmes l’aménageraient peut-être, mais ne l’abrogeraient certainement pas.

Il ne doit pas en aller de même pour les Alternatifs dont la démarche doit être à l’inverse de celle des libéraux :
Là où ceux-ci justifient une immigration choisie pour cause de manque de main d’œuvre dans certains corps de métiers, nous devons préconiser la formation de chômeurs et le relèvement des salaires. Qu’on les forme et qu’on les paye au niveau de l’effort attendu et les Français travailleront. C’est encore plus vrai dans l’Outre-mer français et, en particulier, dans l’île de La Réunion. Non à l’immigration choisie.
Là où ceux-ci condamnent l’immigration subie pour cause de triche possible ou de difficulté d’intégration, nous devons nous dresser au nom de la déclaration des droits de l’Homme, des traités européens et, tout bonnement de nos droits citoyens. (...) L’intégration n’a pas à être une obligation contractuelle, elle doit être un droit dont il faut créer les conditions d’accès et de réalisation en facilitant le regroupement des familles car c’est là le plus fort facteur d’intégration. (...) Il ne doit pas exister deux droits du travail et nous refusons le pouvoir exorbitant que donnerait aux patrons un CDD étranger assorti de carte du travail temporaire associée au droit de séjour.
Il est absurde de s’engager à chasser à terme échu les cerveaux étudiants de haut niveau de spécialité que l’on vient de former et qui souhaiteraient s’attarder à travailler quelque temps au profit du développement de la France avant, peut être, de rentrer chez eux. Ils iraient ailleurs, en Angleterre, en Irlande ou aux USA, apporter leur énergie et leurs connaissances acquises en France, et cela sans délai.
Il est scandaleux et antirépublicain de vouloir aggraver cet ensemble déjà abominable dans les départements d’Outremer et notamment à Mayotte où (...) les irréguliers Comoriens pris par la police française aux ordres de l’État sont, légalement, au terme de la loi internationale, en juste et légitime séjour chez eux. Ce n’est quand même pas de leur faute si la France a mal géré ses problèmes de décolonisation !
Les partisans de l’alternative de gauche se doivent de déjouer les calculs des stratèges de la droite, acquérir une influence telle qu’ils soient incontournables et en mesure d’imposer aux socialistes d’écouter et suivre les meilleurs d’entre eux, renouer avec leur propre origine, rompre avec leur "libéralisme" et leur fausse modernité, conclure un accord politique programmatique de rupture progressiste de haut niveau, à la hauteur des espérances de tous les peuples constitutifs du peuple français !

François Esquer, Porte-Parole du MGER
Île de La Réunion


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