L’Église et le prêtre

29 mai 2010

À la suspicion jetée sur l’Église par les accusations révélées au grand jour par les médias, succède l’incompréhension de nombreux fidèles qui se posent aujourd’hui bien des questions sur le statut du prêtre, sur le rôle qui lui est assigné par l’institution. Le « vœu de chasteté » qui le soumet au célibat est souvent mis en cause : certains se référant à l’Évangile vont jusqu’à dire : « Mais autour de Jésus, il n’y avait que des hommes mariés et des divorcés ! »
Ainsi apparaît plus nettement encore la distance qui sépare le message du Christ de la pratique séculaire de l’Église romaine, surtout depuis Constantin 1er en 313 quand elle devient la religion officielle de l’Empire romain — pratique qui ira dans le sens d’une « inversion radicale des valeurs évangéliques », selon les termes de Frédéric Lenoir, directeur de la revue “Le Monde des religions”.
Toutes ces dérives qui atteignent l’institution en plein cœur ne sont pas nouvelles : l’Histoire nous en donne plusieurs exemples même si la plupart ont été soigneusement cachés ; mais le souvenir demeure, comme gravé au fer rouge, de l’interminable et sinistre Inquisition.
Il ne faut pas attendre du pape Benoît XVI qu’il puisse prendre la tête du redressement nécessaire et mettre un terme au malaise que traverse son Église. Car il est lui-même prisonnier d’un système parfaitement rodé, jalousement protégé par la Curie romaine et où finalement il se retrouve. Peu d’espoir donc de le voir suivre les pas de Jean XXIII qui, avec le Concile Vatican II, avait apporté un puissant souffle hélas ! Trop vite éteint après lui, l’Église romaine ayant repris progressivement le chemin du conservatisme et de la régression.
Un prêtre catholique cependant, de nationalité allemande, enseignant en théologie, psychanalyste et psychothérapeute de formation, Eugen Drewermann avait fait scandale à l’époque il y a quelque vingt-cinq ans en dénonçant les effets de l’institution qu’il a pu observer sur ses confrères. Lui qui les a longuement et attentivement écoutés en consultation, fouillant « dans l’inconscient de ceux qu’il considère comme atteints dans leur être le plus intime par un système broyeur d’individualités, cachant leur souffrance au plus profond de soi », a ressenti comme eux « la contradiction entre ce qui est proclamé au nom de l’Évangile » et « ce qui est réellement vécu » par ces derniers. Aussi veut-il leur annoncer une parole qui libère, considérant conformément au proverbe bouddhiste mis en exergue de son livre ‘‘Les fonctionnaires de Dieu’’ (Kleriker), que « seul un être épanoui peut faire le bien ». ‘‘Si les gens (y) réfléchissaient suffisamment, ils constateraient pour la plupart que ce n’est jamais par hasard qu’ils ont commis une faute, mais que c’est la totalité de leur vie qui ne colle pas ; et que cela tient toujours à ce que la peur les a retenus de vivre à plein ; et très curieusement, souvent la peur devant les forces qui se présentent comme morales », fera-t-il remarquer dans son autre ouvrage ‘‘La parole qui guérit’’.

Georges Benne


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