L’ère Michel Debré à La Réunion -3-

2 mars 2018, par Paul Dennemont

Les législatives du 25 novembre 1962, sont annulées par le Conseil Constitutionnel, pour fraude, les électrices et électeurs de la première circonscription de La Réunion sont appelés à retourner aux urnes le dimanche 5 mai 1963.

Michel Debré lors de la campagne des législatives à Saint-Denis en 1963. Photo extraite du film Sucre amer.

Sous la pression des autorités, Gabriel Macé et David Moreau n’ont pas d’autres choix que de s’effacer derrière Michel Debré qui débarque à la mi-avril à La Réunion. L’ancien Premier ministre peut compter sur le soutien unanime du « camp national » et de certains socialistes. Dans la première circonscription qui va de Saint-Denis à la Plaine des Palmistes, outre Gabriel Macé, Georges Repiquet et David Moreau, respectivement Maire de Saint-Denis, Sainte-Suzanne et Saint-Benoit, sont en exercice : Louis Lagourgue à Sainte-Marie – Henri Morange à Saint-André – Paul Moreau à Bras-Panon – André Fontaine à Salazie – Dominique Sauger à Sainte-Rose et Gaston Crochet à la Plaine des Palmistes.

La campagne est lancée. Avec le soutien des autorités, du Préfet Alfred Diefenbacher qui remplace Jean Perreau-Pradier, la complicité de l’ORTF, radio et télé d’Etat, où sévit d’une main de maitre Jean-Vincent Dolor, Michel Debré brandira tout au long de sa campagne le spectre de l’indépendance, du largage, de Moscou, de la misère, et que sais-je encore, pour faire peur aux Réunionnais. Dans le même temps, tout est mis en œuvre au niveau des mairies pour permettre une fraude fonctionnant à plein rendement, comme il est désormais de coutume, depuis l’élection municipale partielle du 15 septembre 1957 à Saint-André.

Une autre pratique peu glorieuse crève les yeux : la distribution d’argent. La méthode est rodée du côté des relais politiques locaux. Des sommes parfois conséquentes sont remises aux petits commerçants et détenteurs de débits de boissons, pour « servir un coup ». Les buvettes ne désemplissent pas, surtout lors des réunions publiques de quartiers. « Debré i paye » ! Quantité de Réunionnais, sans s’en rendre compte perdront leur âme, pour une bière ou quelques verres.

En face, c’est la censure, en dépit des protestations du dirigeant communiste et de Témoignages. Paul Vergès et le PCR sont interdits de radio et de télé, mais ils ont Témoignages, les réseaux de militants, les ouvriers, les planteurs, les familles démunies, et beaucoup de jeunes. La campagne est belle, et dynamique. Les meetings se multiplient. Ils y croient jusqu’au dernier jour.

Au final, hélas, au soir du 5 mai 1963, le mensonge, la corruption, la démagogie, la répression, le bourrage des urnes, le matraquage du service audiovisuel d’Etat, feront député de la première circonscription : Michel Debré. A suivre…

Paul Dennemont

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