L’ère Michel Debré à La Réunion - 4 -

5 mars 2018, par Paul Dennemont

Michel Debré lors de la campagne des législatives à Saint-Denis en 1963. Photo extraite du film Sucre amer.

Rappelons que les législatives du 25 novembre 1962, dans la 1ere circonscription avaient vu l’élection de Gabriel Macé, maire de Saint-Denis, invalidée pour fraude. Les électrices et électeurs retournent aux urnes le dimanche 5 mai 1963. Gabriel Macé et David Moreau s’effacent derrière Michel Debré appelé à la rescousse par son ami, le sénateur-maire de Sainte-Suzanne, Georges Repiquet. Comme lors du scrutin du 25 novembre 1962, Paul Vergès est le candidat du PCR. Michel Debré est élu miraculeusement avec plus de 80 % des voix, un score digne d’une république bananière. Le 5 mai sonne donc, le début officiel de l’ère Debré à la Réunion.

Les conditions de l’élection de l’ancien Premier ministre ne plaident pas en faveur d’une amélioration de la démocratie à la Réunion, mise à mal depuis la fameuse élection municipale partielle du 15 septembre 1957, à Saint-André. A l’exception d’une certaine presse locale qui estime que « le déroulement du vote n’est sujet à aucune contestation possible », autrement dit, tout est beau tout est réglo, Témoignages dénonce « un scrutin digne de Perreau Pradier ».

Au plan national, les médias sont plusieurs à ironiser et qualifier Michel Debré « d’élu de la république bananière », faisant allusion à l’utilisation massive de la fraude. Sachant que de nombreux journalistes de Métropole ont suivi sur place, le déroulé de la campagne et la journée d’élection.

Chez nous, comme il fallait s’y attendre, le camp du « Pouvoir » exulte, « Vive papa Debré, le bon zoreil ». Un zoreil qui a réussi l’exploit de l’emporter, sans doute, avec la main de Dieu dans les urnes, plus de 80 % des voix, soit 30908 suffrages contre seulement 7365 à Paul Vergès. On notera même un miracle à Bras-Panon, commune dirigée par Paul Moreau, frère cadet du Maire de Saint-Benoit, Paul Vergès y obtient 45 voix, Michel Debré 1571, soit plus de 97 %. !

Cette « nette victoire » applaudie notamment par les socialistes va cependant produire l’effet inverse de celui attendu par les adversaires du PCR, à savoir qu’elle n’a fait que renforcer la détermination des communistes à se battre encore plus pour leur idéal, la liberté d’expression, l’identité réunionnaise, l’égalité, la responsabilité… La progression du Parti Communiste et son accession, un peu plus tard, aux responsabilités en seront la preuve et seront vécu comme un cinglant revers par celui qui était venu de plus de 10000 kilomètres, expressément, dans le but de faire taire le PCR, et le faire disparaitre. A noter qu’un film documentaire de Yann Lemasson, réalisé à l’occasion de ces législatives, et intitulé « Sucre Amer » avait été interdit de projection à sa sortie, du fait qu’il mettait en évidence l’existence de la vaste fraude au profit de Michel Debré. A suivre…

Paul Dennemont

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