« La mort ? Y passer d’accord, y rester jamais ! »

17 avril 2003

En ce temps de carême, qui devrait être avant tout le temps de la réflexion, donnons pour commencer la parole au philosophe Alain : « Que nous pensions tous que nous sommes immortels, cela est inévitable, car notre propre mort nous est tout à fait inconcevable. Quand je pense que je mourrai, je me figure, d’après ce que j’ai vu, l’histoire de quelqu’un que j’appelle moi, et que je dessine à ma ressemblance ; j’imagine cet homme malade, mourant, mort, et porté en terre. Oui, mais si je fais bien attention, je m’aperçois moi-même dans l’assistance, moi-même suivant mon propre cortège funèbre, et donc vivant encore d’une certaine façon. (…)
Ma mort n’est rien pour moi ; et si je crois y penser, je ne puis penser en réalité qu’à une autre vie. Comme je crois me voir derrière le miroir, ainsi, par une illusion inévitable, du moment que je pense à moi, je me pense vivant. Je ressemble à Calino, qui allumerait sa lanterne pour aller voir s’il fait bien noir dans la cave »
.
Lorsque Alain nous parle de l’immortalité, il continue une tradition héritée des anciens Grecs dont il reprend la conception spiritualiste. Telle n’est pas la vision judéo-chrétienne, donc celle de Jésus-Christ, qui est la Résurrection de la chair, jamais pensée à fond par la plupart des chrétiens, jamais totalement intériorisée comme le centre de la foi ; ils sont comme Alain, peut-être sans le savoir, des rationalistes.
« Ce n’est pas mon esprit qui voltige, c’est toute ma chair qui ressuscite », nous dit à sa façon le Père Jean Cardonnel, en radicalisant : « Il y a quelque chose de pire que la mort, c’est la vie mortelle. L’opposition est moins de la vie à la mort que de la vie mortelle à la vie éternelle. La vie éternelle, qui est à commencer aujourd’hui, maintenant, tout de suite, de toute urgence… Sinon, nous ne serions que des capitulards devant la mort. Tous les hommes d’État et tous les hommes d’Église sur le marché mondial sont de fait les gérants de la vie mortelle. Alors qu’à l’évidence, nous sommes appelés, tous ensemble, à être les prophètes de la vie éternelle ». Et le Père Jean Cardonnel de conclure : « La mort ? Y passer d’accord, y rester jamais ! »


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