Le courrier des lecteurs du 08 avril 2005

7 avril 2005

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Le souffle qui manque à l’Europe

Point n’est besoin d’être un grand juriste pour se rendre compte assez vite que le texte soumis au prochain référendum n’est pas une vraie Constitution. Déjà l’intitulé initial aurait dû nous mettre la puce à l’oreille : "traité établissant une Constitution pour l’Europe". Dans sa forme et dans son contenu, il n’est pas, nous dit Anne-Cécile Robert, journaliste au “Monde diplomatique”, un "acte de droit interne, national" ; il relève plutôt du droit international dont "l’outil traditionnel est le traité". Il n’est pas l’"acte solennel par lequel une communauté politique (un peuple ou une nation) définit ses valeurs et organise la production des règles juridiques, notamment les lois auxquelles elle se soumet". Et par conséquent, il n’est pas non plus "une des manifestations concrètes de la démocratie". Quelle est donc la vraie nature de ce "document hybrid", élaboré minutieusement par un orfèvre en la matière, l’ancien président de la République française, Valéry Giscard d’Estaing ? C’est un traité commercial qui ne dit pas son nom : il comporte des dispositions qui ne figurent nulle part dans une Constitution de type classique. Là encore, le nombre de fois qu’on a recensé les mots "banque", "capitaux", "commerce", "concurrence", "marché", "marchandises"... est très significatif. C’est ce qui a fait dire à Bernard Cassen, journaliste également au "Monde diplomatique" : "c’est un copié-collé des statuts du Fonds monétaire international (FMI) et de la charte de l’Organisation mondiale du commerce (OMC)".
Alors dans ces conditions, comment expliquer une prise de position aussi tranchée pour le “oui” des dirigeants du Parti socialiste français, ce parti qui portait à l’origine le beau nom de Section française de l’internationale ouvrière (SFIO) ? Est-ce à dire qu’ils n’ont pas lu avec toute l’attention nécessaire le texte qui est proposé à l’appréciation des Français et qu’ils n’ont pas vu surtout le danger qui se profilait déjà pour l’immense majorité des travailleurs à travers le Traité de Maastricht ? Car de toute évidence, ce pacte entre États qui "attribuent" des compétences à l’Union dont ils font partie, s’inspire étroitement des principes du libéralisme économique, ou pour le dire encore plus clairement, de l’économie de marché. La réponse nous est donnée en grande partie par l’Histoire : De Léon Blum à François Hollande, en passant par Guy Mollet et François Mitterrand, le Parti socialiste n’a pas toujours suivi une route tout unie, il s’est fourvoyé plus d’une fois, trahissant même son idéal.
Mais s’en tenir uniquement au cadre étroit de l’Europe, même élargie à 25 membres, s’avère plus que jamais très largement insuffisant. L’horizon ne peut être que le monde ; il faut passer d’urgence des Européens, fussent-ils les mieux armés face à la volonté de puissance des Nord-Américains, à l’humanité toute entière. Seule vision qui manque singulièrement à ce référendum truqué.

Georges Benne, Le Tampon


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