Le courrier des lecteurs du 11 avril 2005

11 avril 2005

(page 10)

Du bois de cyprès au bois de sapin

Mon père, dont un livre vient de retracer la vie, avait un jour acheté quelques planches de sapin (le cyprès est un arbre de la même famille que le sapin). Il les avait entreposées, au-dessus de son atelier. Et il me disait toujours : "le jour de ma mort, tu ne fais plus attention à ma carcasse. L’homme est né poussière, il retournera en poussière. Tu vois, ces quelques planches de sapin que j’ai mises là, tu en feras un cercueil tout ce qu’il y a de simple. Tu me mettras à l’intérieur sans rien de plus. Après la mort, le corps, vois-tu, n’a plus aucune valeur ".
Il est mort en 1982, il y a de cela 23 ans. Son corps a été enseveli conformément à sa volonté, dans un cercueil en sapin. C’était d’ailleurs une tradition à La Réunion, les corps rejoignaient les cimetières, dans du sapin. Communément les services techniques des mairies fabriquaient des cercueils et les offraient aux personnes nécessiteuses... La mairie en dernier recours, solennisait la mort par l’attribution de ce cercueil en bois de sapin, pour marquer la dignité humaine !

... Et puis, le temps a passé, la Départementalisation contribuait à rattraper le standard de ce qui faisait un Français. La Réunion avait son ticket d’entrée dans la modernité, ce statut faisait d’Elle une société de consommation. “Les pompes funèbres”, le mot indique bien les exigences qui lui sont liées, ne dit-on pas en “grande pompe”, alors les choix de cercueil ont bouleversé nos coutumes. Maintenant, c’est devenu un déshonneur, si on ne montre pas à la famille, ou au public en général, notre capacité à enterrer notre mort dans un cercueil en bois spécial, verni, avec des poignées, des décorations dorées, et l’intérieur tapissé de velours avec l’oreiller du même ton. Un cercueil coûte au bas prix 1.000 euros. Il finira pourri en terre ou brûlé dans un crématoire. Qu’importe, l’honneur est préservé dans ce rite du paraître !

Et voilà, qu’en ce vendredi 8 avril 2005, toutes les caméras du monde braquées sur la place de Saint-Pierre de Rome qui filment en mondovision la cérémonie de l’enterrement du Pape Jean-Paul II, nous montrent que le cercueil qui sort de la basilique, surprise ! Celui qui rassemble plus de 200 chefs d’état, 2 millions de pèlerins, son cercueil est vulgairement en bois de cyprès. Pas la moindre feuille d’or. Un cercueil tout simple. Il est venu dans ce monde simple et pauvre. Il quitte le monde simple et pauvre. Quel exemple pour toute la chrétienté de la planète ? Quel exemple pour tous les grands de ce monde ? La vie ne saura jamais être que notre pouvoir d’achat !

Le 8 avril 2005, on a enterré un homme, mais quel homme ! Son message, son parti pris pour la paix, restera vivant "ad vitam éternam". Enfin je le souhaite, pour que notre vie à nous-mêmes s’améliore...

Marc Kichenapanaïdou


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