Le courrier des lecteurs du 17 juin 2005

17 juin 2005

(page 10)

Respectez-nous, piétons et cyclistes,
la route est pour tous !

Deux nouvelles personnes tuées mardi sur nos routes. Ces deux morts le même jour sont particulièrement symboliques car il s’agit de deux usagers parmi les plus fragiles, les plus faibles, les plus en danger sur notre réseau des déplacements : un piéton et une cycliste. Un piéton fauché par une voiture alors qu’il s’apprêtait à traverser une route à Saint-Joseph. Une cycliste écrasée par un poids lourd qui l’a doublée de trop près à Mont-Vert.
Ce qui vient de se passer là est à l’image de ce qui se déroule dans le monde en général, où les plus fragiles sont écrasés par les plus forts. Nous ne pouvons accepter cela. Ni dans le monde et dans nos sociétés, ni sur nos routes.
Concernant les cyclistes, les automobilistes doivent notamment connaître et respecter une règle très simple du code de la route : "quand je double un cycliste, je garde un espace de 1 m 50 ; s’il n’y a pas l’espace suffisant, j’attends, je reste derrière lui jusqu’à ce que j’ai assez de place pour doubler...". Si cette simple règle du code de la route était appliquée, les accidents concernant les cyclistes seraient très rares.
C’est vrai que l’idéal serait des voies réservées aux vélos sur toutes les routes soit en site propre si la circulation est dense, soit en bande cyclable lorsque qu’il y a peu de trafic. Des réalisations ont déjà été accomplies dans ce sens et d’autres projets sont en cours, portés par nos différentes collectivités, tandis que l’État se désengage... Mais en attendant...
Partageons la route équitablement et respectons tous les modes de déplacements ! Les piétons aussi sont une cible facile quand les voitures vont vite et que la visibilité n’est pas excellente.
Les “zones 30” en ville sont un bon exemple du partage des routes : à 30 à l’heure, tous ont le temps de voir venir, de freiner à temps et de doubler seulement quand c’est possible.
Et nous cyclistes, n’ayons pas peur de nous faire respecter et faisons tout ce qu’il faut en assurant nous-mêmes notre sécurité en étant constamment “hyper prudents”, attentifs, vigilants.
Mettons des habits clairs et voyants. Équipons notre vélo d’un rétroviseur pour bien voir ce qui vient de derrière. Signalons tout changement de direction et anticipons sur tout danger éventuel : chacun connaît l’angle mort dans une voiture où le conducteur n’aperçoit pas le cycliste à l’arrière, donc évitons de nous positionner à l’arrière d’un véhicule. Dans un tournant, sachons qu’un gros véhicule : bus, camion, se rapproche toujours par l’arrière, ne restons pas à cet endroit quand nous sommes à un carrefour.
Observer les règles du code de la route, adopter une attitude fair-play et courtoise, c’est l’affaire de l’automobiliste mais aussi du cycliste.
Voulons-nous d’un monde où toute la place sur les routes est donnée aux véhicules les plus gros, les plus rapides ? N’y a-t-il pas une autre façon de se déplacer, notamment sur les petites distances ? N’est-ce pas un moyen de construire une société plus humaine où tous se respectent et où chacun a sa place ?
Ne nous résignons jamais et continuons le combat.

Simone Biedinger,
conseillère municipale du Port,
en charge de la promotion du vélo
comme moyen de déplacement


Figure unitaire du dieu de Jésus

Je réponds ici brièvement au long article de Reynolds Michel publié le 7 juin dans "Témoignages". Dans un courrier des lecteurs du 15 mai, j’avais montré qu’il était anachronique de parler de Saint-Esprit et de Trinité à l’époque de Jésus. Pour une raison toute simple : ce n’est qu’au 4ème siècle que ces deux concepts ont été adoptés par l’Église.
Reynolds Michel m’a répondu le 20 mai que "même si le terme de “trinité” est absent de la Bible", la notion de trinité, elle, "nous est révélé par Jésus". À l’appui de ses dires, il citait un passage de Mathieu (28,19) où l’on voit le Christ demander à ses apôtres de baptiser les nombreux convertis "au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit".
Dans un nouveau courrier des lecteurs en date du 31 mai, j’ai fait la démonstration que la phrase attribuée à Jésus en Mathieu 28, 19 avait été "introduite après coup, en contrebande, dans l’évangile". Elle est l’œuvre d’un faussaire, et j’en apportais la preuve.
Que me répond Reynolds Michel le 7 juin ? Il ne conteste pas la falsification. Il s’en prévaut, au contraire, pour affirmer "qu’elle témoigne la foi" trinitaire du faussaire ! curieux argument : la foi d’un faussaire du 2e du 3e siècle peut-elle attester la croyance de Jésus ou la Trinité ou au Saint esprit au début du 1er siècle ?

Divinité du Christ

Un autre sujet de controverse concerne la divinité du Christ. J’affirmais, dans mon courrier du 1er mai, que du vivant de Jésus et tout au long des 100 années qui ont suivi sa mort, l’idée m’était venue à personne de le considérer comme Dieu. J’ai cité de nombreux passages du Nouveau Testament montrant que, pour l’apôtre Pierre "Jésus était un homme" un "serviteur" de Dieu, que pour l’apôtre Paul, il était un grand prêtre "choisi parmi les hommes... pour servir Dieu" ; que Jésus lui-même ne se haussait jamais au niveau de Dieu.
Que fait Reynolds Michel ? Il ne conteste aucune de mes citations, il n’en conteste pas davantage la signification, évidente il est vrai. Il leur oppose seulement d’autres citations, dont il n’examine pas l’authenticité, et qui, si elle s’avéraient authentiques, ne prouveraient qu’une chose : que la Bible dit tout et son contraire. `
Reynolds Michel cite par exemple la parole de Jésus : "Le Père et moi, nous sommes un" (Jean 10,30). Il est clair que, si cette phrase figurait dans l’original de Jean, elle constituerait un sérieux argument en faveur, sinon de la Trinité, du moins de la dualité de Dieu. Mais Reynolds Michel n’a pas pris garde aux versets qui précèdent : "Les œuvres que je fais sous l’autorité de mon Père, dit Jésus, portent témoignage pour moi. Mais vous ne me croyez pas, parce que vous ne faites pas partie de mes brebis écoutent ma voix ; je les connais et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle et personne ne les arrachera de ma main. Mon père qui me les a données est plus grand que tout, et personne ne peut rien arracher de la main du Père."
C’est clair : ce que Jésus fait, il le fait sous l’autorité du Père, non de sa propre autorité. Le Père lui a confié des brebis à garder. Et le Père est plus grand que tout, donc plus grand que Jésus.
La phrase citée par Reynolds Michel arrive là-dessus comme un cheveu sur la soupe. Elle n’a aucun rapport logique avec ce qui précède. À moins d’accuser Jean d’incohérence, il faut bien admettre qu’elle a été subrepticement glissée dans son texte par un pieux copiste des siècles suivants.
Reynolds Michel cite une autre phrase qu’il isole de son contexte pour faire dire à Jésus le contraire de ce qu’il dit en réalité. La voici : "Tout ce que fait le Père, je le fais pareillement" (Jean 5,19). Il veut prouver par là - il le dit lui-même - que Jésus a "un pouvoir faire égal à celui du Père". Or Jésus vient de dire : "Je vous le déclare, c’est la vérité. Le Fils ne fait rien par lui-même." Et il ajoutera, quelques versets plus loi : "Je ne peux rien faire par moi-même. Je juge d’après ce que Dieu me dit, et mon jugement est juste parce que je ne cherche pas à faire ce que je veux, mais ce que veut celui qui m’a envoyé."
Ce texte est lumineux : Jésus n’a pas de pouvoirs par lui-même, il n’a que ceux que Dieu lui accorde. Si son jugement est juste, c’est parce qu’il fait la volonté de Dieu, non la sienne. Et c’est Dieu qui l’a envoyé, il n’est pas venu sur Terre de sa propre initiative.
Jésus ne pouvait pas mieux faire comprendre qu’il n’est pas l’égal de Dieu.

Daniel Lallemand


La liberté d’apprendre

Je participe à l’une des rares opérations originales de l’Éducation nationale : l’opération "Lire et faire lire". Quoi de plus valorisant pour un grand-père à la retraite de se sentir utile en lisant des histoires à des enfants qui n’ont pas tous la chance d’en écouter le soir à la maison ? Quoi de plus enrichissant pour ces marmailles que cette petite rupture du rythme scolaire et cet apprentissage du plaisir de lire ?
Au retour de mes séances de lecture, je me mets cependant à rêver de cette éducation idéale qui ferait de chacun de nous un être équilibré, épanoui et heureux. On est, me semble-t-il, loin du compte. La curiosité naturelle de l’enfant avide d’apprendre, semble comme altérée par un cadre sans doute un peu trop rigide. Et chacun, déjà, réagit à sa manière : Il y a ceux qui jouent encore avec l’autorité de l’adulte car le jeu est encore pour eux une façon d’apprendre. Il y a ceux qui se taisent, non par timidité mais parce que, déjà ils ont compris que l’adulte ne fait pas partie de leur monde. Et dans chaque classe il y a toujours cette petite minorité d’enfants comme on les aimerait tous : gais, curieux et attentifs. Et nos pauvres instituteurs doivent s’accommoder de tout ça et faire absorber un lourd programme à un échantillon d’humanité aussi divers. C’est vrai que les humains sont divers, et c’est tant mieux. Mais je n’aime pas cette diversité-là, celle qui se construit très artificiellement à l’école. Et oui, que voulez-vous, je suis un rêveur et je rêve d’autre chose. Je rêve pour ces enfants d’un monde meilleur. Et je sais que malheureusement, seule une meilleure éducation peut créer ce monde-là.
Est-elle si difficile cette réforme de l’école ? Il y a pourtant plusieurs siècles que nous savons ce qu’elle devrait être. Il y a longtemps que des penseurs, des philosophes célèbres nous mettent sur la voie : en Europe, on préconise depuis longtemps : "Un esprit sain dans un corps sain" et "Une tête bien faite plutôt que bien pleine". En Afrique, on dit depuis toujours : "Il faut tout un village pour élever un enfant". Et comme pour enfoncer le clou, plus récemment, un auteur d’Amérique du Sud nous dit : "L’enfance est le sol sur lequel nous marchons toute notre vie." Un autre d’Amérique du Nord précise même : "L’enfance est ce que, toute notre vie, nous tentons de retrouver."
Oui mais voilà, comme le reste de l’humanité, l’enfant subit la pression d’une société de plus en plus déshumanisée et mercantile. Qu’il serait bon de s’éduquer librement à l’école de la nature. Qu’il serait bon, aujourd’hui d’élever nos enfants en respectant leur curiosité et leur goût d’apprendre. Qu’il serait bon, en ouvrant les portes de l’école sur le Monde, de leur rendre la liberté d’apprendre. Qu’il serait bon que les vieux, les jeunes et les autres soient plus unis dans une découverte mutuelle du grand livre ouvert de la vie. Qu’il serait bon pour les citadins de courir les champs, qu’il serait bon pour les campagnards de courir les villes, qu’il serait bon pour ces yeux émerveillés de voir et comprendre le Monde... pour de vrai. Nous serions sans doute surpris d’apprendre que les enfants ont soif d’autre chose, que les enfants ont soif d’amour, d’harmonie et de vérité, précisément ce que nous, adultes, recherchons aussi.
Sur 5 phrases extraites du merveilleux livre de St. Exupéry, Le Petit Prince, ils ont choisi celle-ci : "On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux."
... Et si nous écoutions davantage nos enfants ?

François Maugis,
Saint-Benoît


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