Le courrier des lecteurs du 22 novembre 2005

22 novembre 2005

L’état d’urgence contre la démocratie

Le CDFD de la FSU tient à exprimer sa plus vive inquiétude à propos de la “réactivation” de la loi d’avril 1955, concernant l’état d’urgence. Il s’agit d’une réponse inadaptée, disproportionnée et lourde de danger pour les libertés publiques dans l’avenir.

1- On ne répond pas à une crise sociale par un régime d’exception. La responsabilité fondamentale de cette crise pèse, en effet, sur les gouvernements qui n’ont pas su ou voulu combattre efficacement les inégalités et discriminations qui se cumulent dans les quartiers de relégation sociale, emprisonnant leurs habitants dans des logiques de ghettoïsation. Elle pèse aussi sur ces gouvernements qui ont mené et sans cesse aggravé des politiques sécuritaires stigmatisant ces mêmes populations comme de nouvelles “classes dangereuses”, tout particulièrement en ce qui concerne la jeunesse des “quartiers”.

2- Ce sont des années de politique centrée sur le tout sécuritaire qui sont en cause. Le sabotage des actions de prévention, l’asphyxie du monde associatif, la démolition de la police de proximité, la tolérance à l’égard des discriminations quotidiennes, notamment à l’égard des personnes étrangères ou supposées telles en raison de leur faciès, l’état d’une école qui ne peut réduire la ségrégation nous font mesurer aujourd’hui non seulement l’échec mais la redoutable nocivité de cette politique. Ce n’est pas seulement le langage du ministre de l’Intérieur, ce sont les actes de l’ensemble du gouvernement qui relèvent d’une logique d’apprenti sorcier.

3- Au-delà, c’est aussi l’incapacité des gouvernements successifs depuis des décennies à faire reculer le chômage massif, l’explosion de la précarité, la systématisation des discriminations racistes et territoriales, comme la politique d’affaiblissement des services publics et le recul des droits sociaux qui apparaissent en pleine lumière aujourd’hui.

4- Ces éléments qui caractérisent les banlieues des grandes villes françaises, sont fortement présents à La Réunion qui a connu en 1991 une flambée de violence du même type. Chômage massif, maintien de la majorité des salariés dans la précarité, absence de perspective d’emploi pour la jeunesse, politique de baisse du coût de la main d’œuvre, faiblesse des services publics, toutes les conditions sont réunies pour l’explosion sociale dans notre île. Nous observons avec inquiétude le durcissement de l’attitude du gouvernement à l’encontre des populations d’Outre-mer qui s’est manifesté en 2003 avec la volonté d’affronter le mouvement de grève massif des personnels de l’Éducation nationale ou plus récemment avec les scandaleuses déclarations du ministre de l’Outre-mer à propos de la remise en cause du Droit du sol.

5- Exhumer un texte de loi enraciné dans la période des guerres coloniales aujourd’hui, pose question : l’apaisement nécessaire de la situation dans les banlieues ne nécessitait certainement pas son usage. Par contre, la portée symbolique de ce texte est très forte. Le gouvernement a délibérément choisi de dramatiser, de mettre en scène le spectre de la guerre civile en jouant des anciennes peurs, des anciennes rancœurs. Au-delà d’un aspect pré-électoraliste peu ragoûtant, le Premier ministre veut "banaliser l’exception". Il entend faire passer dans les esprits qu’il est nécessaire de résoudre par la simple force les crises sociales. Il a ainsi créé un précédent applicable dans d’autres situations. Une organisation syndicale comme la FSU ne peut que se sentir menacée par ce précédent d’autant plus que les atteintes aux libertés syndicales se sont multipliées ces dernières années et encore très récemment avec la déclaration d’illégalité de la grève des traminots de Marseille.

Attachée à l’État de droit, à la défense des libertés publiques, des libertés syndicales, la FSU affirme solennellement son refus de l’état d’exception et appelle l’ensemble de ses adhérents et des salariés à œuvrer pour la défense des valeurs de démocratie, de solidarité, de respect de la dignité humaine. Elle dénonce la prolongation de l’état d’urgence et s’engage à construire et développer une protestation citoyenne la plus large possible.

La FSU exige que la vérité soit faite sur l’ensemble des événements qui ont secoué les banlieues, en particulier sur le drame de Clichy qui a coûté la vie à deux jeunes garçons.

La FSU exige que les procédures engagées contre les auteurs supposés d’incendies ou de violence se déroulent dans le strict respect du droit et dénonce les déclarations du ministre de l’Intérieur qui organise l’expulsion d’étrangers en situation régulière au mépris de toute légalité. Les premières condamnations nous amènent à penser qu’il s’agit d’une justice “pour l’exemple” qui frappe systématiquement tous ceux qui s’opposent à la politique libérale.

La FSU condamne la régression sociale et éducative que constitue la remise en selle de l’apprentissage à 14 ans, mesure inadaptée et dangereuse. La FSU considère qu’une fois de plus, une mesure dite “sociale” se solde par des moyens supplémentaires pour l’entreprise et par la précarisation et l’exploitation de la partie la plus fragile de la jeunesse.

La FSU affirme enfin qu’il y a état d’urgence sociale, tout particulièrement à La Réunion, qu’il est plus que temps que la jeunesse, les salariés, précaires, privés d’emploi, soient enfin écoutés, entendus. Qu’il faut rompre avec une politique sociale et économique désastreuse qui mène nécessairement à un affaiblissement des valeurs démocratiques dans notre pays.

Christian Picard
Secrétaire Départemental


Lettre des précaires à la communauté éducative

Le fonctionnement des collèges et lycées gravement menacé !

Précaires aujourd’hui, chômeurs demain !

Nous sommes 700 agents de service en CES, CEC, CIA qui auraient dû voir leurs contrats reconduits et signés avant le 22 novembre 2005 et qui en raison d’un blocage institutionnel lié au transfert des personnels ne seront pas en postes à la rentrée de fin janvier 2006, sauf mesure d’extrême d’urgence prise par le Préfet.
Ce dernier et le Recteur s’étaient pourtant engagés publiquement à ce que tous les contrats en cours fassent l’objet d’un renouvellement pour 2006 et que personne ne reste ainsi sur le bord du chemin.
Leurs propos rassurants ont laissé place à une tout autre réalité, bien amère. (...)
Nous lançons à chacune et chacun, TOS titulaires, enseignants, chefs d’établissements, gestionnaires syndicats, parents d’élèves, élèves, un véritable cri d’alarme ! (...)
C’est aussi une catastrophe annoncée pour le fonctionnement des collèges et des lycées de notre île. Nous représentons, rappelons-le, pas moins de 50% à 60% des personnels TOS titulaires.
Notre absence pour licenciement déguisé, à la rentrée prochaine, va de fait avoir des incidences désastreuses sur la propreté et la salubrité des locaux, l’hygiène, la restauration scolaire, la sécurité etc. et ce, au plus grand détriment de nos élèves qui, une fois de plus, vont en bout de chaîne, devoir en supporter les conséquences. Cela est inadmissible !
La question du renouvellement de nos contrats au regard de l’importance de ce que nous représentons (700 personnes), concerne donc tous ceux qui ont à cœur d’offrir à nos enfants, à nos élèves des conditions d’accueil décentes dans un environnement acceptable.
Aussi, nous vous demandons, à vous enseignants, collègues TOS titulaires, syndicats, chefs d’établissements, gestionnaires, parents d’élèves, élèves de nous soutenir pour que nous ne perdions pas notre emploi (au moins dans l’indifférence générale) ou au moins pour préserver un fonctionnement normal des collèges et des lycées
Dès lundi 21 novembre 2005, nous allons engager, partout ou nous pourrons le faire, une action de protestation (grève sur le tas et/ou service minimum, toute forme d’action) afin de montrer à la communauté éducative quel sera l’état de nos collèges et lycées si nous ne sommes pas là à la rentrée. Soyez à nos cotés, solidaires. Motion, pétition, AG, débrayage collectif, toutes initiatives allant dans le sens d’une résistance pour défendre l’emploi sont naturellement les bienvenues.
Nous savons pouvoir compter sur votre soutien !

Précaires de l’Éducation nationale en colère !

Contact Rosine Mouronaga : 0692.79.91.59


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