Le courrier des lecteurs du 25 novembre 2004

25 novembre 2004

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La Réunion et l’Europe

La Réunion a besoin de l’Europe. Il est surtout question en ce moment d’aboutir à un équilibre dynamique de la conscience européenne. Nul doute que l’Europe, avec non seulement avec sa puissance économique et ses garanties démocratiques concrètes, mais aussi avec sa créativité, sa philosophie, sa forme de pensée, la diversité de ses cultures, sa sagesse millénaire, ses traditions légendaires et son capital artistique participera à l’édifice d’un monde nouveau. Le système qui associe libertés individuelles, démocratie et économie de marché tend à devenir la référence. Il ne faut pas oublier que l’Europe est aux origines des libertés modernes avec les trois grandes figures de l’Europe des Lumières. John Locke, Montesquieu et Jean-Jacques Rousseau.
À La Réunion, nous sommes les dépositaires privilégiés d’un produit de haute facture dans la composante harmonieuse de ses cultures, des ses ethnies, de ses traditions, de ses religions et paysages. Ce produit, l’île de La Réunion, lieu de tolérance et de diversité, contrée de dialogue et d’échanges, région de paix et des libertés, mérite d’être mieux connu en Europe et ailleurs.
En effet, il est une île de La Réunion profonde qu’il reste à découvrir, une Réunion de lieux sacrés, de traditions millénaires, aussi bien une Réunion de montagnes, d’oiseaux rares, de longues promenades à pied, de sources et des cascades et de vieilles maisons créoles. C’est une Réunion de découvertes, découverte de l’autre, de ses valeurs, de son passé, de sa cuisine, de sa musique, bref, de sa culture. La culture est un moyen de rapprochement des peuples.
L’homme n’est pas uniquement un cerveau doué de volonté et d’intelligence. Au-delà de ces qualités, il possède une troisième composante : son âme et sa sensibilité. Dans la société future, il s’agira de restaurer la primauté de l’homme , riche de sa valeur de conscience et de culture.
La Réunion, région ultrapériphérique de l’UE, possède un produit intérieur brut inférieur de moitié à la moyenne communautaire. Elle doit affronter un chômage de plus de 30% de la population active et compte un grand nombre de bénéficiaires du RMI. Donc, elle mérite tous les efforts possible d’adaptation des politiques européennes. Elle doit aussi faire preuve de responsabilité en faisant fructifier au mieux la croissance de son économie, notamment du tourisme.
En outre, cette belle île est une tête de pont privilégiée de l’Europe dans la région de l’océan Indien.
La constitution européenne est une opportunité unique de débattre, de mieux comprendre et de vivre la réalité de cette Réunion qui est riche humainement et naturellement, mais handicapée de par son éloignement géographique du continent européen et son isolement. L’histoire de l’Europe a montré qu’elle avait toujours su relever les défis de l’intégration et de la cohésion. Les principes sont la solidarité et la responsabilité au service d’un idéal humaniste. On est pour une Europe des citoyens qui renforce la démocratie, les droits sociaux et la culture.

Gady Moonesawmy,
Saint-Denis


Dieu, l’Insurgé contre le Pouvoir

Je m’étonne d’un fait scandaleux : de ce que dans le langage courant des Réunionnais, comme en France dite toujours la Métropole, le mot "foi" et le verbe "croire" puissent être appliqués à deux réalités diamétralement opposées. L’exemple le plus clair de cette habituelle confusion mentale et verbale est bien l’ultra classique : "il ne croit ni à Dieu ni à Diable".
Je ne peux croire - au sens fort de me fier, de me confier - qu’à ce qui me valorise, non à ce qui me diminue, m’amoindrit, m’anéantit. Il suffit d’un moment de réflexion, de pensée pour découvrir que l’on ne croit pas à Dieu comme on croit au Diable. À une condition toutefois : que Dieu ne soit pas le mot en l’air qui synthétise le faire faire par les créatures terrestres, des caprices du céleste monarque absolu... et le laisser faire par les plus compétitifs de tous les fauves, des performances sauvages dans la main invisible du marché. Or, c’est cet inavouable fourre-tout du pire de l’homme tortionnaire de l’homme que, sous le nom de Dieu, on nous refile depuis la nuit des temps sur le marché aux religions et aux amours. Ceci, du plus terrible islamisme intégriste, traître à de merveilleux mystiques comme Halladj, "le Christ de l’Islam", disait Massignon - jusqu’au fondamentalisme dit évangélique de Bush avec son "conservatisme de la compassion" -, en passant par les nostalgiques cathos de la Sainte Inquisition.
Dans ma doctrine traditionnelle dominicaine, si exécrable par ailleurs, j’avais tout de même défriché une piste novatrice pour aller au vrai Dieu : la via negationis, la voie de la négation. Elle consiste dans la vérité que voici : on parle infiniment mieux Dieu en disant tout ce qu’il n’est pas qu’en récitant, en rabâchant ce qu’il est ; c’est-à-dire ce que des millions de perroquets déistes ont voulu nous faire croire qu’il était. Et le pire de l’effroyablement pire du faux Dieu qui nous a été inculqué, c’est la déification du pouvoir absolu, le Tout-Puissant, le père omnipotent, le pater familias romain, l’idole monothéiste selon la formule décisive de mon ami Manuel de Diéguez.
Le Dieu courant de tous les déistes, y compris chrétiens, c’est le contraire absolu de Notre Père d’infinie tendresse créatrice révélé par Jésus-Christ, c’est le monstre que j’ai trouvé sous la plume d’une religieuse dominicaine dans "la Revue thomiste" : "Dieu nous regarde du haut du mirador de son éternité".
Auprès de ce Dieu horrible, le Diable classique n’est que du folklore médiéval inoffensif. Affirmer que cette caricature de Dieu existe, non pas en soi mais sortie du cerveau tyrannique du despote pervers qui la fabrique et l’impose à ses fidèles, ne veut pas dire que l’on y croit. Tout au contraire.
Le summum de l’erreur quotidiennement répandue, je vais vous le dire, amis de La Réunion : faire croire que la foi est soumission alors qu’elle est adhésion à l’inconcevable création libératrice, libération créatrice dans le non à l’intolérable existant.
Une simple exploration de l’histoire du peuple biblique nous ouvre laïquement le passage - la Pâque -, de la servitude, des griffes de Pharaon-César à la libération... jusqu’au soulèvement universel des vivants et des morts, préfiguré par la chasse aux démons occupants, aux mauvais esprits de servilité que mène Jésus. L’infini anti-déiste, anti-autocrate, anti-théocrate n’a qu’une parole qu’il tient : à mon acte on va voir qui je suis. Le Souleveur, le Suscitant, la Résurrection à mordant insurrectionnel. L’Insurgé contre l’ordre des choses donc jamais le pouvoir, jamais le Tout-Puissant.

Jean Cardonnel


Dîtes-moi qu’je rêve !!!

Quelle n’a pas été ma surprise et ma colère en découvrant dans les pages du “Quotidien” de ce 24 novembre cette photo à laquelle on a osé joindre un titre à mes yeux révoltant "y a de l’espoir". De qui se moque t-on ?!

À Falloujah, les pertes civiles irakiennes sont innombrables ; à titre d’exemple, au moins 800 civils sont morts en un week-end. 5.000 soldats des forces de la coalition ont mené une opération de grande envergure, hier contre ceux qu’on appelle des rebelles, dans le Sud de Bagdad et que je renommerai des Résistants. Rien n’est épargné aux civils. Cette guerre injustifiée reste injustifiable ; aussi n’a-t-on pas le droit par des images que je qualifierais de propagandistes de détourner l’attention de ce qui représente le quotidien de millions de personnes, à savoir la terreur, le massacre d’innocents. N’oublions pas les terribles exactions commises à la prison d’Abou Grahib par les GI’s américains. N’oublions pas les tapis de bombes, dérivés des bombes à fragmentation qui jonchent les sols occupés irakiens. Depuis quand les GI’s donnent-ils dans l’Humanitaire ? Que cherche-t-on à nous faire croire ?

Cette guerre vire au cauchemar et à l’enlisement, ce qui n’est pas sans rappeler la situation vécue par le peuple palestinien, tout comme par une grande partie du peuple israélien, pris en otage et qui souffre et subit les affres de la politique d’un gouvernement bien trop intéressé par le Pouvoir et l’argent. Qu’importe à ces “êtres humains” la souffrance de leurs frères tant quelle ne les touche pas directement ?!
Je crois pourtant qu’on ne peut éternellement agir en toute impunité. J’ai confiance dans la prise de conscience des petits Êtres Humains, qui monte de manière exponentielle et dans la nature forte et intelligente de notre mère la Terre qui saura remettre à leur place certains petits empêcheurs de tourner en rond.
Nous avons tout pour être heureux tous ensemble sur cette planète. Il serait grand temps d’apprendre à partager !
J’espère que ce petit enfant sur la photo aura encore l’occasion de bénéficier de la tendresse de ses parents... s’ils n’ont pas eux aussi été assassinés...
Que vive la Paix.

Association Imagine la Paix


À mes très chers concitoyens

À vous, à nous qui devons vivre dans cette Réunion d’aujourd’hui et celle de demain, souhaitons tous à l’unanimité que cet alizé de grande démocratie et de liberté humaine puisse un jour pas très lointain parvenir et pourquoi pas atteindre nos rivages ici même dans l’océan Indien. La Réunion, terre d’accueil, cette terre qui chaque jour reçoit et console des âmes migratoires et aussi celles de ses enfants, qui pour beaucoup ne reconnaissent plus leur île et sa mentalité, les choses vont plus que vite et, comme dit Kréol : i fo fé avèk.
C’est avec un certain regret que je m’aperçois que chaque communauté sociale ou religieuse commence peu à peu à se refermer sur elle-même, voulant chercher ses propres racines et ses valeurs, tout en laissant bien heureusement une fenêtre ouverte pour tout ceux qui parfois désire mieux comprendre leurs pratiques religieuses. Et c’est peut-être ça, les prémices de la démocratie.
À présent, ce qui me semble le plus préoccupant pour l’avenir de mon pays c’est qu’il puisse, je l’espère, garder son âme primitive, même si les humains ont beaucoup trop saccagé les traces fragiles de son visage, et qu’il ne devienne surtout pas un lieu où une chose n’existerait que pour les clichés des photographes de passage.
Pour moi, sa vraie richesse ne réside point en de grandes fanfares ou autres artifices, je pense que sa force est intérieure. Mon île est mystérieuse, et elle se fait toujours mieux connaître par la voie du cœur.

Tibili,
Sainte-Suzanne


Lettre ouverte au député-maire du Tampon

Lors de la dernière parution du fameux journal “Altitude”, j’ai constaté avec étonnement que vous commencez à parler de la 3ème jeunesse du Tampon en citant les différents clubs et leur président. Parmi ces clubs, quatre ne figurent pas. Pourquoi ?
Depuis mars 2004, date historique pour le Tampon, certains présidents ont osé dire et faire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Bien sûr, cela ne vous plaît pas et vous avez par tous les moyens réussi à fermer ou à mettre en sommeil trois de ces clubs qui marchaient très bien. Vous leur avez supprimé les salles, les subventions et les moyens de transport. Étant à court de moyens financiers, ils étaient obligés de mettre la clé sous la porte. C’est un manque de respect vis-à-vis de ces personnes âgées qui se sont dévouées pendant des années dans ces différents clubs et qui vous ont accueillis les bras ouverts. Concernant la Plaine des Cafres, nous ne connaissons pas d’Amical Plainnoise, chez nous et c’est les Gais Lurons qui existent depuis plus de 20 ans et qui continueront à exister avec nous, sans vous, avec à sa tête un président compétent et dynamique, n’en déplaise à certains.
Monsieur le maire, arrêtez de prendre la 3ème jeunesse en otage, ce sont des gens qui ne demandent qu’à s’amuser. La politique ne les intéresse pas. Des centaines de personnes âgées sont aujourd’hui à la rue. Ces personnes, j’en suis persuadé, s’en souviendront pour les prochaines élections électorales.

Maurice Hoarau,
président des Gais Lurons,
La Plaine des Cafres


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