Le courrier des lecteurs du 28 septembre 2004

28 septembre 2004


Vous avez dit assistanat ?!...

Lorsque l’on compare le montant des exonérations de charges dont bénéficient certaines entreprises et la somme versée aux Réunionnais au titre des prestations familiales et autres acquis sociaux, il y a de quoi se demander si ceux qui parlent souvent d’assistanat ne sont pas de véritables assistés...

L’intérêt du budget pour l’Outre-mer tel qu’il vient d’être dévoilé ne réside pas dans son augmentation de 52% (678 millions d’euros, soit 4,5 milliards de francs français) puisqu’il s’agit d’un simple transfert. Ces crédits jusque là (2004) inscrits au budget du ministère de l’Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale et destinés aux départements d’Outre-mer, vont en 2005 passer par le ministère de l’Outre-mer avant d’arriver dans les DOM. Autrement dit, c’est le ministère qui gagne, mais pas les DOM eux-mêmes qui n’auront pas un sou de plus. Cela dit, on peut être content pour le ministère et pour la ministre. En tout cas, il n’y donc pas là de quoi fouetter un chat, d’autant que le procédé n’est pas nouveau à la rue Oudinot.

Cadeau aux employeurs

En revanche, il est bien plus intéressant de savoir à quoi correspondent précisément ces 678 millions d’euros pour l’ensemble des DOM, dont à peu près la moitié pour La Réunion. "Cette hausse très importante, dit le ministère sur son site Internet, est liée au transfert des crédits destinés à la compensation des exonérations de cotisations sociales dans les départements d’Outre-mer".
Autrement dit, ces 678 millions d’euros seront versés au compte du ministère de l’Outre-mer pour permettre à ce dernier de rembourser à la sécurité sociale les cotisations sociales que les employeurs ne paient plus, en application de la loi d’orientation. Voilà ce qu’est “l’augmentation” : un cadeau de 678 millions d’euros aux employeurs somme toute ! C’est tout de même la première fois que ce chiffre est rendu public. Et on souhaiterait presque, juste pour connaître le chiffre, que le ministère des Finances transfère les sommes correspondant aux exonérations fiscales accordées aux mêmes entreprises par la LOPOM, la LOOM et autres lois “spécifiques”. Encore un autre pactole ! Sans compter toutes les aides et autres primes aussi diverses que variées.
Dire que tout cela était, en principe, destiné à créer des emplois dans les DOM !. Des emplois que l’on n’a pas vu venir et que les chômeurs, eux, ne voient toujours pas.

Deux fois le montant des prestations familiales

Cela dit, à titre de comparaison, les allocataires du RMI, que l’on accuse de tous les maux de la terre et qui sont 70.000 à La Réunion (près de 200.000 personnes avec leurs familles) perçoivent en tout autour de 320 millions d’euros ! Moins de la moitié de ce pactole !
Par ailleurs, et toujours à titre de comparaison, ces 678 millions d’euros représentent :

- deux fois le montant des prestations familiales versées aux familles de La Réunion en une année (380 millions d’euros environ). Trente fois le montant versé aux... parents isolés (une vingtaine de millions d’euros) !

- près de deux fois la totalité des allocations versées par les ASSEDIC aux chômeurs (360 millions d’euros environ pour quelque 55.000 chômeurs indemnisés).

- cinq à six fois la recette canne des planteurs (100 à 110 millions d’euros) ; deux fois la valeur de la totalité de la production agricole de La Réunion d’une année (330 millions d’euros).

- tout juste un peu moins que le coût de la route des Tamarins, ce chantier pourtant qualifié de “pharaonique” (800 millions d’euros)

- un petit peu plus également que le coût du basculement des eaux d’Est en Ouest dont le chantier aura duré... un quart de siècle.

On pourrait ainsi multiplier les comparaisons (1) . Ou encore noter que cette somme représente près de 7% de "l’effort global de l’État en direction de l’Outre-mer" alors que les sommes consacrées à "encourager la construction de logements sociaux et poursuivre la résorption de l’habitat insalubre" ne représentent qu’aux alentours de 2% !
Alors, “assistanat”, “assistanat”, “assistanat”,... où se trouvent les vrais assistés ? Et s’il fallait, “rompre avec une culture d’assistanat”, par où faudrait-il commencer ?
Comme quoi les plus assistés ne sont pas forcément ceux que l’on désigne à longueur de temps du doigt. C’est même à se demander si les véritables assistés ne se trouvent pas à l’autre bout du doigt.

Georges-Marie Lépinay

(1) - Tous les chiffres donnés ici se trouvent dans les revues de l’INSEE


Billet d’humeur

Un lecteur s’étonne du silence des médias devant l’action d’un CPE actuellement en grève de la faim.

Faut-il être soupçonné de trafic de drogue et avoir un nom pour mériter un article ? Faut-il être prisonnier des mollahs à des milliers de kilomètres pour que la presse s’intéresse à vous ? Faut-il être bien penseur parfumé d’eau bénite et d’encens pour que le tapis rouge des colonnes se déroule sous vos pieds ? Faut-il être un peu ivre et virée de la Star Academy pour faire la une des quotidiens ?

Sans renier d’aucune façon l’importance des prises d’otages et dénoncer la précipitation dont la justice peut quelquefois faire preuve, la hiérarchisation des informations donne à réfléchir. Roland Veuillet est un conseiller principal d’éducation (CPE) qui depuis le 30 août 2004 est en grève de la faim devant le ministère de l’Éducation nationale pour protester contre sa mutation-sanction après son implication dans la défense du mouvement des MI-SE (maîtres d’internat, surveillants externat) en février 2003. Aucun des communiqués de presse appelant à une action de soutien à notre camarade n’est passé dans les journaux de l’île.

Cela laisse rêveur ! Car que cet homme eût commis quelques exactions pédagogiques et il aurait de fait couvert les premières pages des journaux ! Seulement cet homme s’est opposé à l’autoritarisme d’un proviseur, il s’est défendu pour que l’on respecte le droit de grève, alors évidemment... peccadilles messieurs !
Nous vivons au bord d’un gouffre dans une pacotille et un semblant de bien-être. Toutes les sirènes d’alarme doivent être entendues, aucune ne devrait être étouffée... Les médias sont en principe les relais de l’information. Alors, le jour où, les uns après les autres, nous tomberons au fond du gouffre pour cause de désinformation, il sera trop tard.

D. Bernard


Sainte-Anne : Sauvons notre patrimoine

Une lectrice interpelle l’adjoint de Sainte-Anne : pourquoi refuse-t-on de soutenir le projet d’un groupe de jeunes qui souhaitent créer une activité économique, et donc des emplois, en embellissant un lieu chargé d’Histoire : la cour Valliamée.

Je me souviens ce que mes grands parents et les personnes âgées que j’ai rencontré me disaient, pour eux Sainte-Anne ne signifie pas uniquement l’église, mais aussi la première usine de canne sucre qui ai existé dans l’Est, je parle de la cour Valliamée, la première balance, la première usine. Mes grands parents nous parlaient de ses esclaves qui avaient leurs maisons sur la propriété, des travailleurs engagés, ces personnes, nos ancêtres ont sué sang et eaux pour la bonne marche de cet endroit.

Les jeunes et les moins jeunes des écarts de Sainte-Anne, chemin Jacquemin, chemin Morange, chemin de la Safer considèrent depuis des années la Cour Valliamée comme leur bien le plus précieux où ils peuvent se retrouver pour jouer au ballon, faire du vélo, ou entraîner leur chien en toute sécurité. Combien de fois se sont-ils retrouvés là avec leur musique pour un pique-nique organisé ou improvisé, les soirées de grillades ou d’anniversaire, de réveillon. Ils n’ont pas tous le moyen de se payer le restaurant ou d’aller en boîte et, en prime, c’est plus convivial.
Jusqu’à aujourd’hui, c’est le seul endroit ou les jeunes de ces écarts peuvent se rassembler en toute amitié, pour faire toute sorte d’activités.

Don de nos ancêtres

Je voudrais que le Conseil municipal de Saint-Benoît, surtout vous, monsieur l’adjoint de Sainte-Anne, vous nous expliquez ce que vous avez fait du projet de ces emplois verts, les jeunes de ce quartier qui voulaient rénover ce site : les cheminées, la balance, la maison des esclaves et tout ce qui se trouve sur cette propriété, pour en faire une aire de loisir. Qu’en avez-vous fait ? Le projet de ces jeunes n’étaient pas assez bien, assez juteux ou glorieux pour vous ? Les avez-vous seulement écouté et surtout entendu ? Est-ce que l’avis, les projets, les rêves de ces jeunes ne comptent pas ?
Moi qui ai discuté avec eux, j’ai trouvé merveilleux les idées qu’ils m’ont exposé faire de ce site un lieu de rencontre et de joies, faire de cet endroit un musée. Car pour eux, ces bâtiments ont une histoire, celle de nos ancêtres, celle de la première usine de canne à sucre, et tout comme l’église, cet endroit fait partie de notre patrimoine, qu’il faut à tout prix conserver. Ils avaient commencé à travailler, alors laissez les réaliser leur projet, leur rêve surtout en ce qui concerne la cour Valliamée, en souvenir de ceux qui ont fait de cette propriété quelque chose de grandiose pour qu’on parle encore aujourd’hui à travers toute l’île.

Ne les laissons pas détruire notre patrimoine.

Une habitante du chemin Morange.


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