Le courrier des lecteurs du 8 janvier 2005

8 janvier 2005

(Page 10)

L’eau potable pour tous : un service public

Il suffit d’une forte pluie, et les habitants des communes de l’Est ont à leur robinet une eau turbide potentiellement non potable (le chlore pour la désinfecter étant en partie neutralisé par les particules en suspension).
Ne serait-il pas possible de créer pour ces consommateurs des centres d’approvisionnement en eau potable où l’on pourrait remplir des bidons d’eau “propre” en cas de risque, sachant que l’eau en bouteille est à La Réunion environ 3 fois plus chère qu’en Métropole (environ 3 euros le pack de 6 bouteilles de 1,5 litre pour ici, contre 1 euro là-bas pour l’eau de source). Ce sont comme d’habitude les plus défavorisés qui en subissent les conséquences, et donc des bébés ou des granmouns malades.
Les communes et collectivités locales alliées avec la CISE pourraient donc, à partir des captages souterrains et moins soumis aux aléas climatiques, proposer aux abonnés de l’eau potable avec plusieurs points de ravitaillement et des petits réservoirs bien répartis sur le territoire. Cette mise en œuvre serait stratégique en cas de cyclone ou tout autre phénomène naturel dévastateur.

Jessi de l’Est


L’autre tsunami

Le tsunami a été d’une horreur sur laquelle tant de choses ont été dites, écrites, mises en images qu’il n’est pas nécessaire d’en rajouter. L’émotion de chaque être humain à la vue et à l’écoute de cette catastrophe se passe de commentaire.
Mais la Nature est ce qu’elle est, et l’Humanité - elle-même produit de la Nature - s’est développée parce qu’elle a su peu à peu s’approprier par son travail transformateur, en les captant, en les reproduisant, en les adaptant à ses besoins, des forces et des énergies naturelles. Les artisans de ces “domestications” savaient et savent bien qu’elles sont à la fois formidables et civilisatrices, et en même temps fragmentaires, fragiles, parfois aléatoires et toujours incomplètes.
Les astrophysiciens, les climatologues, les météorologues, les vulcanologues, les géologues, les sismologues, pour ne citer que les scientifiques à ma connaissance les plus concernés directement par l’étude et la recherche de la prévention du phénomène que le globe terrestre vient de connaître, ont parfaitement conscience que c’est au prix d’un travail permanent, obstiné, requérant de gros moyens, que de telles catastrophes peuvent être anticipées.
Or, en l’occurrence, c’était, de l’avis des spécialistes, tout à fait possible, si... les dispositifs existant au large des côtes nord-américaines ou japonaises, par exemple, avaient été également présents au large des côtes sud-asiatiques où s’est produit le phénomène à l’origine de la catastrophe, phénomène parfaitement connu et qui nous a été d’ailleurs très bien expliqué par les scientifiques.

Première constatation donc : si les dispositifs d’anticipation avaient existé dans cette zone du globe, on aurait pu prévenir les populations et éviter des centaines de milliers de morts. La prévention possible n’a pas été assurée. À qui la faute ? L’ensemble géographique où cela s’est produit ne serait-il pas une de ces zones classées “inutiles” par les experts du FMI et de la Banque mondiale ? Là où les peuples peuvent s’entasser dans des baraques exposées à toutes les intempéries, sans que les maîtres du monde s’en émeuvent le moins du monde ?
On peut procéder à une deuxième constatation : les dispositions de secours sont d’une incroyable lenteur et souffrent d’une disproportion visible avec l’ampleur de la catastrophe. Les détenteurs du pouvoir mondial manqueraient-ils de capitaux, d’hélicoptères rapides, de navires-hôpitaux, de personnels spécialisés, de matériels adéquats, pour faire face à des situations extrêmes ?
Mais en Irak, d’après ce que nous en savons, les capitaux pour la guerre n’ont pas manqué. Ils continuent à être dépensés sans compter, pour une œuvre de mort. Et ce, à une hauteur incroyable, auprès de laquelle les 2 milliards de dollars promis pour faire face au sinistre apparaissent comme une somme dérisoire.

Pour une œuvre de vie, pourquoi cette situation où le FMI, la Banque mondiale, les Banques centrales les plus riches, adoptent un profil plus que bas ?
Pourquoi la dette des pays vis à vis de ces organismes financiers n’est-elle pas annulée, purement et simplement, sans attendre, à commencer par les pays les plus frappés par la catastrophe qui se trouvent être d’ailleurs parmi les pays où les populations sont les plus pauvres ? N’y a-t-il pas un lien entre cette situation et l’ampleur de la catastrophe ? Certains parlent de "moratoire" sur ces dettes mais ce n’est que reculer des échéances. Le moratoire ne réglerait en aucun cas le problème de fond, à savoir l’obligation faite à ces pays, ou plutôt à leurs peuples (car, qui paye ?), de rembourser non pas la somme de la dette elle-même, à jamais inaccessible, mais les “intérêts” de cette dette exigés par le FMI.
Silence radio sur les vrais problèmes. Tapage indécent pour les fausses solutions.
Au tsunami de la Nature, nos dirigeants et ceux qui les servent, religieux de toutes confessions, Pape en tête, répondent par un véritable tsunami d’hypocrisie compassionnelle à longueur d’émissions radiophoniques, télévisuelles, à longueur de colonnes de journaux et de magazines !
Au traitement immédiat des vraies questions (par exemple, annuler la dette), il est substitué le jeu scandaleux sur l’émotivité, l’appel au bon cœur de chacun. L’esprit de charité est partout invoqué : les gosses vont être appelés à se priver de dessert dans les cantines, les opérations type “sacs de riz” du bon docteur Kouchner vont être multipliées, les ONG civiles et religieuses sont sur le pied de guerre sur la base des dons et des quêtes.
On va même aller jusqu’à nous dire qu’il faut que l’Union européenne soit plus "solidaire", moins individualiste, mieux organisée, et à laisser entendre que, pour ce faire, il faut voter correctement en répondant oui à la question du prochain référendum sur la Constitution européenne.
Bref, démagogie, hypocrisie, jeu sur l’émotivité, occultation forcenée des vrais problèmes, c’est ce à quoi on assiste dans des proportions jamais atteintes.

"Ce n’est pas l’heure de rechigner, ce n’est pas l’heure de chipoter, donnez votre obole ! Aidez les pauvres et les plus que pauvres !". À qui la faute ? "C’est la faute à pas d’chance !", "Allez, à vot’bon cœur, M’sieurdame", c’est ce qu’en 2005 (en 2005 !), nos décideurs, dirigeants, spéculateurs en tous genres, le cas échéant confits - ou faisant semblant de l’être - en dévotions diverses, ont trouvé de mieux, avec les hommes de médias, pour fournir une explication et pour faire face à la catastrophe naturelle qui vient de coûter si cher à l’espèce humaine.
Encore une fois, le libre penseur pacifiste internationaliste que je suis, face à cette détresse immense qui me bouleverse au plus profond, comme tout autre, pose la question : “Qui doit payer ? Les peuples qui n’en peuvent plus ? Ou les hommes et organismes, parfaitement identifiables, détenteurs des neuf dixièmes des richesses mondiales ?”
En présentant mes vœux aux lecteurs pour 2005, je ne peux que souhaiter que l’on avance encore un peu plus cette année dans la réponse concrète à apporter à cette question qui nous est, à tous, venue à l’esprit, face à ce qu’une partie de l’Humanité vient de subir.

P. R
Un libre penseur


Le règne des grenouilles

Le haut du pavé n’a plus rien à prouver et peut donc se payer le luxe de dire la vérité. Et dans la misère de la France d’en bas, c’est le mensonge qui serait un luxe.
Alors, d’où viennent nos maux, qu’est-ce qui fait que certaines décisions économiques ou politiques, échappent au bon sens ? Qu’est-ce qui fait que le monde va si mal ?
Divers exemples viennent de nous prouver que ce sont les échelons intermédiaires qui poussent la roue dans le mauvais sens (pour ce qui est de l’intérêt général) mais dans le bon sens d’intérêts particuliers.
Publicité et inculture aidant, nous sommes presque tous devenus très gourmands. Et pour satisfaire cette boulimie de pouvoir et de consommation, il faut aujourd’hui de plus en plus d’argent. Les grenouilles que nous sommes devenues ne rêvent que d’une chose : atteindre la taille du bœuf. Pour rester dans le domaine aquatique, un seul exemple :
Il y a de nombreuses années que diverses entreprises proposent à La Réunion d’équiper nos stations d’épuration de zones d’épandage lagunaire, purifiées par des plantes aquatiques filtrantes et oxygénantes, procédé très efficace sous nos latitudes et infiniment moins cher à terme et moins polluant que tous les procédés mécaniques ou chimiques.
Bizarrement les trucs très chers sont financés plus facilement et plus rapidement que des investissements plus judicieux et moins onéreux (incinérateur contre tri sélectif, récupération et recyclage, pétrole contre énergie douce, solaire, etc., transport individuel contre transport collectif, monoculture industrielle contre agriculture raisonnée ou biologique, etc.)
On peut légitimement se demander pourquoi l’intérêt général est tellement négligé.
Il n’y a semble-t-il qu’une seule réponse : l’égoïsme et l’intérêt particulier des grenouilles.

François Maugis - Saint-Benoît
[email protected]

P.S : À La Réunion comme ailleurs, tout le monde sait qu’il est beaucoup plus facile de récupérer des dessous de table, commissions ou cadeaux divers de la part d’un gros groupe financier dans le cadre d’une grosse opération financière que dans le cas d’une opération plus judicieuse mais complexe, faisant intervenir de nombreuses entreprises plus petites.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année

La pès kabo

5 juillet, par Christian Fontaine

Kan i ariv Novanm-Désanm-Zanvié, domoun i réziste pi ek la salèr. Zène-zan i mars dann somin, zène-fi i roul an dékolté ; sétaki i rod in manir po (…)


+ Lus