Le « décrochage » scolaire : Comment pouvait-il en être autrement ?

20 novembre 2013

Dernièrement, un colloque a eu lieu à l’université sur le thème : “Prévenir et lutter contre le décrochage scolaire”. Décrochage, désaffection, désintérêt scolaire : le choix des mots n’est pas neutre. Depuis longtemps, l’on sait que l’école s’inscrit dans une politique d’inégalité des chances. Le sociologue René Lourau disait en 1985 : « Quelle est la loi non écrite, mais inscrite dans l’inconscient collectif des enfants, qui mène à l’élimination de 90% des enfants de la classe ouvrière, par rapport à l’accès à l’enseignement supérieur ? »…

Lors de ce colloque, des chiffres alarmants ont été avancés : de 2011 à 2013, 6.454 élèves âgés de moins de 16 ans ont « décrochés », c’est-à-dire que leur scolarité au sein des collèges et des lycées est compromise.

Il serait absurde de penser que ces jeunes sont inintelligents. Il serait plus satisfaisant de penser qu’ils n’ont vraisemblablement pas pu profiter d’un environnement suffisamment riche pour développer chez eux des motivations solides pour suivre avec profit une scolarité satisfaisante. Parmi ces jeunes en rupture de scolarité, 1.358 ont souhaité être accompagnés, soit 1/4 d’entre eux. Il n’a cependant pas été dit que des moyens financiers et humains devaient manquer pour répondre à ce souhait d’être effectivement « accompagnés ».

Deux étudiantes ont été sollicitées pour tenter de « définir » le « profil » de ces jeunes en rupture de scolarité. Initiative périlleuse, car le risque de stigmatisation était sous-jacent, celui-ci fut heureusement évité. Bravo à ces deux étudiantes. En fait, il s’agissait de s’approcher de ces jeunes pour mieux les situer dans leur univers de vie, en leur rendant visite chez eux, dans leur quartier, c’est ainsi que l’on s’aperçoit que ces jeunes n’ont pas de livre, ni pour certains de coin pour travailler, un bureau ? Un luxe ! Nous ne nous étendrons pas sur les témoignages relatés qui montrent le peu d’“estime” que ces jeunes se portent… Edifiant !

Un changement d’approche est présenté comme une innovation dans le milieu lycéen. Cinq “Accompagnateurs-Médiateurs familiaux” nouvellement recrutés présentent les modalités de leurs interventions. Là aussi, ces nouveaux acteurs de l’Éducation nationale se rapprochent de l’élève pour le considérer dans sa “globalité”, il faut entendre par là que l’on s’intéresse à lui dans toutes ses dimensions existentielles. D’élève, il deviendrait une personne. La “personne” deviendrait-elle le centre du système scolaire ?

On peut difficilement penser que la prise de conscience de ce « rapprochement » à l’égard de ces jeunes à la dérive soit soudaine, comme une révélation d’un bon usage à développer pour prévenir le décrochage scolaire. On peut penser que c’est parmi ces jeunes que de futurs délinquants se compteront du fait d’un mal de vivre chronique et de leur exclusion implicitement programmée dénoncée depuis longtemps par les sociologues. Et notre société, inquiète dans ses fondements, investirait-elle pour ces jeunes ou pour prévenir des débordements à venir et… prévisibles ?

De nouveaux objectifs

Pour ne pas sombrer dans un pessimisme paralysant, permettons-nous d’avancer quelques objectifs innovants :

Ces cinq personnes et ces étudiants qui ont approché de près la réalité du décrochage scolaire pourraient médiatiser leurs constatations pour qu’une prise de conscience élargie puisse permettre une mobilisation des esprits et des moyens financiers.

Alerter les responsables locaux sur la situation au-delà des clivages politiques et institutionnels.

Proposer d’impliquer des représentants de la population afin de lui permettre d’être informée de la situation de sorte qu’elle puisse soumettre des propositions qui pourraient engendrer des innovations au niveau du lien social. Ces représentants pourraient constituer des Conseils municipaux de Parents, sorte d’instance de concertation et de propositions instituée au niveau de chaque municipalité (que nous définirons dans un prochain courrier).

Mobiliser la solidarité au niveau des entreprises sous la forme d’un tutorat d’insertion pour que ces jeunes connaissent la réalité économique de l’entreprise et sa culture.

Ces objectifs se synthétisent par la consolidation du lien social où la solidarité ne serait pas uniquement financière.

Paulus Frédéric

Gavarri Bruno

CEVOI (Centre d’Etudes du Vivant de l’océan Indien)


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