’Le laxisme des autorités’

7 janvier 2004

Non, rassurez-vous, il ne s’agit pas exclusivement des autorités locales, mais de quasiment toutes les autorités officielles de la planète. Qu’il s’agisse d’actions à court terme comme le secours aux victimes de catastrophes, ou à plus long terme comme la prévention de la délinquance ou du terrorisme, cette phrase : "le laxisme des autorités…" revient presque toujours dans la bouche des commentateurs, comme pour trouver une explication à tous les drames humains. Même si cette expression est plus facilement évoquée pour fustiger "l’étranger", elle illustre bien un mal universel.
Il n’y a probablement rien à dire au sujet des dictatures non "choisies", mais dans une démocratie, il est atterrant de constater ce paradoxe : prétendant que l’"autorité" choisie démocratiquement n’est pas à la hauteur de nos attentes, nous nous permettons de la dénigrer au moindre écart, nous lui retirons notre confiance, alors que nous lui avons offert nos voies.
Cela en fait sourire certains (les partisans du "tous pourris") mais ils ont tort. Ce mal concerne aussi les autorités les plus scrupuleuses et les plus honnêtes.

Une telle attitude s’explique pourtant fort simplement. L’assistanat démagogique érigé en système politique a, peu à peu, transformé des citoyens adultes et responsables en citoyens assistés, incapables de se prendre eux-mêmes en charge et attendant tout de l’autorité. La solidarité que prône une certaine forme de civilisation a certes des aspects positifs mais, passé un certain seuil, cette solidarité devient aliénante.
Si ce mal est universel, c’est qu’il correspond à une attitude ou une philosophie de la démocratie qui est elle-même universellement mauvaise. Si aucune autorité démocratique dans le Monde n’est en mesure de gérer correctement une nation (« Les Français sont tous des veaux », disait De Gaulle), c’est probablement que c’est impossible dans l’état actuel des choses.
La solution est pourtant simple. Donner un poisson à mon enfant parce qu’il a faim c’est bien, lui apprendre à pêcher c’est mieux car c’est l’aider à résoudre lui-même son problème. Rendre l’être humain autonome en toute circonstance (ce qui n’empêche pas la solidarité) devrait être une attitude éducative élémentaire. Ce ne sont pas, semble-t-il, les choix de la civilisation du 3ème millénaire. Il ne faut donc pas s’étonner du résultat.
Si nous sommes des moutons, des veaux ou des singes intelligents, nous n’avons pas besoin de bergers. Arrêtons de faire les imbéciles, arrêtons de faire l’âne pour avoir du foin. Il est peut-être temps de rendre au mot "anarchie" son sens positif et sa philosophie libératrice : émancipation, autonomie, sens des responsabilités, amour et respect de l’autre. La philosophie libertaire de l’Anglais Godwin, reprise au 19ème siècle par le Français Proudhon, est peut-être à remettre à l’honneur, à condition, bien entendu, d’oublier l’influence néfaste du Russe Bakounine qui défendit cette philosophie par la force et le crime, et sous l’inspiration duquel furent assassinés le président Français Carnot en 1894, l’Américain Mac Kinley en 1901, et bien d’autres.

Apprendre aux pauvres de mon village à se prendre en main, et surtout faire en sorte que les structures et l’organisation de la société ne les empêchent pas de s’en sortir en les maintenant hypocritement dans la dépendance, serait un premier pas vers la paix.
Apprendre de la même manière aux pauvres du village planétaire à devenir autonomes et les aider à devenir des citoyens du Monde à part entière, serait sans doute la solution définitive.
Nous devrions avoir honte de nous développer alors que, dans le même temps, d’autres peuples, d’autres nations, sombrent dans la misère. Nous devrions avoir honte de nous enrichir alors que notre voisin ne parvient plus à nourrir ses enfants. Dans notre petit village, et pour que cette situation ne trouble pas trop l’ordre public, notre maire a développé un service social efficace.
Ainsi les pauvres ont à manger et les riches sont rassurés, le pauvre voisin (ou ses enfants) sera moins tenté de voler un pain. Cette situation est moins mauvaise qu’avant, tout le monde le reconnaît. Mais est-elle suffisante au pays de l’égalité et de la fraternité ?
Ce n’est pas uniquement une question de morale, c’est une question de cohérence, de logique et de bon sens. Si la réponse est "oui", alors, il n’y a plus rien à espérer : les riches continueront d’être de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres. Jusqu’à quand ? Là est la vraie question.
Mais on sait déjà que cela ne peut finir que très mal. Si la réponse est "non", on peut encore espérer un monde meilleur, mais favoriser les échanges entre pauvres et riches (et non entre nantis comme le prévoit l’OMC) demande plus qu’une prise de conscience, une véritable remise en question de chacun, une véritable révolution de l’ordre mondial.
Pour bannir tous les égoïsmes, il faudra que le maire du village planétaire soit un sacré bonhomme. Après tout, pourquoi pas, certains prophètes ont soulevé des foules pour moins que ça.


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