Le visionnaire

28 juillet 2006

"L’établissement entre les deux guerres mondiales, car il faut remonter jusque-là, l’établissement d’un foyer sioniste en Palestine et puis, après la deuxième guerre mondiale, l’établissement d’un État d’Israël, soulevaient à l’époque un certain nombre d’appréhensions. On pouvait se demander en effet, et on se demandait même chez beaucoup de juifs si l’implantation de cette communauté sur des terres qui avaient été acquises dans des conditions plus ou moins justifiables et au milieu des peuples arabes qui lui étaient foncièrement hostiles, n’allait pas entraîner d’incessants, d’interminables frictions et conflits. Certains même redoutaient que les juifs, jusqu’alors dispersés, mais qui étaient restés ce qu’ils avaient été de tout temps, c’est à dire un peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur, n’en viennent, une fois rassemblés dans le site de leur ancienne grandeur, à changer en ambition ardente et conquérante les souhaits très émouvants qu’ils formaient depuis dix-neuf siècles."
Au moment où la guerre menée contre la Palestine prend de plus en plus d’ampleur en s’étendant désormais au Liban, il n’est pas sans intérêt de relire ces lignes prémonitoires du général de Gaulle, extraites de sa conférence de presse du 27 novembre 1967. Comme il faudrait reprendre, pour mieux saisir les intentions belliqueuses d’Israël et les vrais mobiles de son action au Proche-Orient, cet autre passage de son allocution : "à la faveur de l’expédition franco-britannique de Suez (de 1956), on avait vu apparaître un État guerrier et résolu de s’agrandir. Ensuite, l’action qu’il menait pour doubler sa population par l’immigration de nouveaux éléments donnait à penser que le territoire qu’il avait acquis ne lui suffirait pas longtemps et qu’il serait porté, pour l’agrandir, à utiliser toute occasion qui se présenterait." La capture des trois soldats israéliens ne serait-elle pas tombée à point nommé pour servir de prétexte à l’intensification de la lutte ? Quoi qu’il en soit, c’est à l’origine même de la création de l’État d’Israël, replacée dans son contexte historique, qu’il faut repartir pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui. En ce sens, le président de Gaulle avait bien raison.

Georges Benne


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