Les iles Vanille ? ou plutôt torpille, béquille et gaspille !

19 mai 2015, par Courrier des lecteurs de Témoignages

Acheminer 250 000 tonnes de roches de Madagascar.
Au moment où on annonce à grands renforts de communication la coopération entre les iles de l’Océan indien, cette annonce doit nous faire réfléchir : pourquoi cette pénurie de roches et pourquoi Madagascar.

Pourquoi manque t on paradoxalement de roches sur une ile volcanique ?
Tout d’abord en raison d’un premier choix politique : l’abandon du projet tram train qui était équilibré en matériaux de construction, au profit de la NRL,
– puis d’un deuxième choix politique : la construction d’une partie en digue qui demande environ 10 fois plus de matériaux au km que la partie en viaduc dans le but (certes louable, mais très couteux) de faire travailler les transporteurs,
– enfin des contraintes administratives complexes qui régissent l’ouverture et l’exploitation des carrières.
Lors des études, les besoins en matériaux avaient clairement été identifiés et quantifiés : environ 1 million de mètres cubes pour le viaduc et 10 millions de mètres cubes pour les deux parties en digue. Et toutes ces quantités étaient “disponibles” selon le schéma départemental des carrières de 2010, mais seulement sur le plan géologique et technique. Et si en 2010, les carrières déjà ouvertes couvraient en gros les besoins courants du BTP, elles ne permettaient pas l’approvisionnement de la NRL.
Or on sait que les procédures d’ouverture de carrières sont longues (souvent 5 à 8 ans) et complexes… mais il fallait faire vite et surtout engager le chantier pour empêcher tout retour en arrière en cas d’alternance politique à la Région.

La Région savait pertinemment que les autorisations d’ouverture de carrières ne seraient pas accordées dans les temps. C’est donc la Région qui est responsable de cet état de fait et non les recours des maires, associations environnementales, riverains, etc. qui sont des obstacles connus et systématiques dans ce genre de procédure. Une saine gestion aurait dû intégrer ces délais dans le calendrier prévisionnel.

Conclusion : comme on ne peut pas avoir ces roches à temps, allons les chercher à Madagascar !

Mais cela pose des problèmes financiers, éthiques et environnementaux.

Tout d’abord le coût : même si le cout de la main d’œuvre est bas à Madagascar, les roches ne sont pas extraites à la pelle et à la pioche. Les engins (pelles hydrauliques, brise-roches, tombereaux…) ont un cout horaire sensiblement équivalent partout dans le monde auquel il faudra ajouter le transport maritime (amenée jusqu’au port, chargement, fret maritime, déchargement, taxes…). Les estimations faites en avant projet annonçaient un surcout d’environ 30 % par rapport aux roches locales. N’oublions pas que les dépassements de budget inhérents à ce genre de grands travaux ne seront financés ni par l’Etat, ni par l’Europe… mais par nos impôts locaux.

Ensuite, problème éthique. Il existe bien dans la Grande ile un organisme chargé des carrières qui donnera son aval… mais combien auront touché des commissions. Cautionnerons-nous un pillage organisé, juteux pour quelques profiteurs et en définitive sans retombées pour la population.

Enfin se posent deux problèmes environnementaux : l’impact à Madagascar et l’impact à La Réunion.
A Madagascar tout d’abord. On sait que les conditions d’exploitations des carrières sont proches celles qui existaient en France il y a 50 ans. Bruits, poussières, ébranlements dus aux explosifs seront le lot du voisinage, non réhabilitation du site de la carrière qui restera une zone stérile et lessivée par les pluies, atteinte évidente à la flore et à la faune locale sans compensation.
Il serait hypocrite d’aller faire à Madagascar ce qu’on refuse de faire ici.
Et pour terminer, n’oublions pas l’impact environnemental à La Réunion. Avec 250 000 tonnes de roches, on va nécessairement ramener de la terre avec des micro-organismes, des graines, de petits animaux, voire des maladies. La contamination d’espèces locales serait certaine et ne relève pas là du simple principe de précaution.

À titre d’exemple on a eu à ramener de Mayotte à La Réunion environ 30kg de prélèvement de sol pour une étude géotechnique. Il a fallu transporter ces 30kg dans un emballage étanche, obtenir une autorisation spéciale des douanes et de la DEAL
… et après les essais en laboratoire, il a fallu INCINERER ces 30kg pour éviter toute contamination !!!

Alors avec 250 000 tonnes de roches, je vous laisse imaginer la taille de l’incinérateur… ah mais zut on ne veut plus d’incinérateur non plus !

Jean-Claude Martigné, Saint Paul


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Messages

  • Ces gens là ont complètement oublié comment notre île a été envahi par les hannetons du ver blanc. Ces insectes viennent de Madagascar dans des pots avec de la terre quand il a fallu déménager la base d’Ivato.
    Ils ont même pas idée combien cela nous a couté pour s’en débarrasser sans compter le perte en agriculture et les dégâts causés à l’environnement et à la terre (insecticide...).
    Avec l’argent des autres (l’avenir de nos enfants est déjà hypothéqué), ils ne savent plus quoi faire et ne respectent plus rien.


Témoignages - 80e année


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