Lettre à Françoise Vergès

4 septembre 2009

Je partage le point de vue que vous avez exprimé sur Antoine Franco. Cet homme est un manipulateur qui accepte mal la contradiction et le débat et il s’oppose avec constance à plusieurs projets réunionnais. Ses amis ont réagi à votre tribune prouvant que vous avez frappé juste. Heureusement que vous n’êtes pas descendue à son niveau. Sur un journal en ligne, il répliquait ainsi à un contradicteur : « il est bien connu qu’on est jamais sali que par la m… ». (12/08/09)
Je ne suis pas d’accord avec vous quand vous dites qu’il est un frustré. Il est plus que cela.
En juillet et août 2008, sur le site signalé plus haut, il expliquait son action quasi personnelle pour une baisse du prix des billets d’avion ainsi : « le courage ne me manque pas, c’est le courage des autres, de tous les autres qui sont des victimes comme vous et moi, qui manque cruellement ». Il dénonçait les Réunionnais qui « se battent avec la langue » et « qui ne se plaignent qu’à la radio » au lieu d’agir. Pour lui, nos compatriotes sont plus proches « de la réalité des chariots des grandes surfaces, des belles autos, des belles maisons, de l’opulence matérielle dans lesquelles certains baignent à La Réunion » plutôt que « des valeurs de la République ». Il estime que les citoyens français — y compris les Réunionnais — sont des « irresponsables » : « si l’État (…) trahit son rôle de représentant du peuple (…), c’est le peuple et les citoyens qui le composent qui en sont avant tout les premiers responsables », écrivait-il. À ses yeux, le peuple a « abandonné par fainéantise, par facilité, par lâcheté, par égoïsme le rôle qui est le sien au nom de lui-même, de tous et de ses enfants ».
Ces écrits n’ont jamais été démentis.
Ce n’est pas le fruit du hasard si le premier à le défendre est Henri Dalbos. En décembre 2008, cet habitué du “Courrier des lecteurs” classait la population en deux catégories : d’un côté, une élite constituée par des « citoyens pensants, conscients et politisés » — dont lui — et, de l’autre, « un trop grand nombre » qui se « contente des droits sans aucun devoir (…), sans conscience professionnelle (…), sans aucun devoir de participation active (…), sans conscience politique (…), sans devoir de tempérance ».
Les propos de ces hommes sont assez démonstratifs en eux-mêmes : leur idéologie partagée est faite du mépris des plus faibles et d’une valorisation de la race des seigneurs. Ici ou ailleurs, des idéologies de même veine ont prospéré. Elles ont justifié l’asservissement de peuples et l’apparition de “chefs”. Elles ont conduit au servage, à l’esclavage et à la colonisation ou à l’émergence de dictateurs. Elles sont totalement opposées aux valeurs qui inspirent le projet de la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise : le respect de toutes les cultures d’origine et la volonté de vivre ensemble en renforçant notre cohésion. D’où, sans doute, ce déchaînement haineux contre le projet et les personnes qui l’ont initié et celles qui le soutiennent.

Marie-Louise Vitry
Saint-André


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