Lettre au président de la République

10 février 2003

M. le Président,
Je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être si vous avez le temps.
Comme Boris Vian, je me sens profondément pacifiste.
Je suis née en 1940, en pleine guerre mondiale contre les nazis. Ma mère, institutrice, n’avait pas encore le droit de vote. À l’école laïque, plus tard, les leçons de morale étaient quotidiennes : il ne fallait pas mentir, tromper les autres, menacer les faibles… J’ai essayé d’inculquer ces valeurs à mes enfants et à mes élèves.
M. le Président, au deuxième tour de la présidentielle, c’est votre bulletin que j’ai choisi pour sauvegarder la démocratie.
M. Bush, qui se targue de donner des leçons de démocratie au monde entier, a été élu président des États-Unis, dans des conditions que l’on oublie trop vite, grâce à la Cour Suprême qui a décrété que c’était lui le gagnant.
Pour vivre convenablement aux États-Unis, ce soi-disant pays de la liberté, il vaut mieux être blanc, riche et en bonne santé que black ou hispano, chômeur et malade car la société américaine manque singulièrement de solidarité et de justice pour ses citoyens les plus démunis.

C’est dans ce contexte que Bush veut faire la guerre à tout prix, sous prétexte de sauver le monde et le peuple irakien d’un tyran. Les dirigeants des États-Unis savent mieux que n’importe quel peuple ce qui est bon pour le monde et ce qui est mauvais pour lui. Et l’ingérence dans les affaires intérieures d’un autre pays fait partie de leurs prérogatives.
Pour faire accepter la guerre que Bush a décidé de mener contre l’Irak, tous les prétextes sont bons et on entend tous les jours parler des armes terrifiantes fabriquées en Irak, des maladies abominables propagées par des virus mis au point par les Irakiens.
Comment peut-on gober toute cette propagande qui ne repose que sur des suppositions et des conversations téléphoniques prétendues révélatrices de projets sinistres ? Comment des femmes et des hommes peuvent-ils accepter que l’on bombarde un pays et ses habitants déjà meurtris par 11 ans d’embargo ?
La Corée du Nord possède l’arme atomique, Israël a des armes sophistiquées. Qu’importe. Seul le danger vient de l’Irak, puissance pétrolière.
Je croyais que seule l’ONU devait régler les conflits et faire appliquer les résolutions. Encore une fois, les États-Unis sont prêts à passer outre son accord et à agir à leur guise.

Dans les années 70-80, un mot d’ordre à La Réunion et chez ses voisins était : "océan Indien zone de paix". Il est encore plus d’actualité maintenant car les bases américaines de cette région sont une vraie menace pour les populations, avec toutes les attaques terroristes qu’un conflit armé contre l’Irak va déclencher.
"Pas de guerre pour du pétrole" est aussi le mot d’ordre des pacifistes du monde.
J’espère de tout mon cœur, M. le Président, que vous maintiendrez votre position actuelle face à la pression américaine et continuerez à entendre tous ces messages de paix des citoyens du monde.
Veuillez croire, M. le président, mes sentiments respectueux.

Marie-Hélène Berne,
Le Tampon


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