Lettre ouverte à M. Le préfet de La Réunion

30 mai 2006

Monsieur le Préfet,

Nous avons pris connaissance des propos que vous avez tenus dans la presse le 27 mai 2006 à l’encontre des "opposants au projet d’incinérateur" auxquels vous reprochez de tenir un discours erroné et que vous invitez "à se mettre à la page concernant les normes actuelles de pollution et de sécurité".
L’objectif d’ACCIDOM REUNION n’est pas de polémiquer avec un représentant de l’État même si nous regrettons le ton condescendant avec lequel vous parlez de citoyens soucieux de faire entendre les inquiétudes réelles d’une large partie de la population réunionnaise.
Notre devoir est d’informer cette même population qu’en dépit des affirmations officielles, la question de la dangerosité des substances toxiques émises par les incinérateurs n’est pas tranchée dans un sens qui serait favorable aux promoteurs de l’incinération : une vaste enquête ordonnée par le Ministère de la Santé est en cours. Elle étudie l’imprégnation par les dioxines des populations vivant à proximité d’usines d’incinération d’ordures ménagères (...). Elle fait suite à un rapport précédent de l’Institut de Veille Sanitaire, publié en novembre 2003, sur l’état des connaissances en matière d’exposition aux dioxines émanant des incinérateurs. Ce rapport (...) reconnaissait, entre autres, que "+ de 90 % de l’apport quotidien de dioxines et de PCB proviennent de l’alimentation", que les nouveaux-nés sont exposés aux risques de contamination par l’allaitement, mais aussi dans l’utérus de leur mère.
Est-ce un hasard si, il y a quelques jours, le 24 mai 2006, le Tribunal administratif de Marseille, saisi en référé, a suspendu l’autorisation d’exploitation délivrée par votre collègue le préfet des Bouches-du-Rhône, pour l’incinérateur de Fos, au motif de risques réels d’excès de pollution ?
Un rapport du Comité de Prévention et de Précaution, organisme du Ministère de l’Écologie et du développement durable, paru en octobre 2004 (...) reconnaît que les données actuelles sont interprétées de "manière divergente par divers groupes d’experts" mais que les "incertitudes plus importantes sont celles portant sur le niveau de risque à dose donnée, y compris la possibilité retenue par les experts américains d’une action cancérogène sans seuil d’effet". N’est-ce pas le moment, Monsieur le Préfet, d’informer les Réunionnais sur les risques et les enjeux en matière de santé publique ?
Nous nous permettons de vous renvoyer à la lecture de la conclusion de ce Rapport. Il y est dit : "S’opposer à l’information du public et, surtout, s’opposer à son association, aussi en amont que possible à la réflexion de crainte de susciter des mouvements d’opposition est un raisonnement qui confond causes et conséquences." Ce document très officiel (...) recommande de faire participer le public et les associations au débat sur les choix collectifs. C’est aussi notre souhait.
(...)

Au nom du Bureau d’ACCIDOM, je vous prie d’agréer, Monsieur le Préfet, l’expression de nos salutations citoyennes.

Jean-Pierre Marchaud
Porte parole de ACCIDOM REUNION


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