Lettre ouverte à M. Thien-Ah-Koon

1er avril 2003

L’association Rasine Kaf s’insurge contre les propos tenus par M. Thien-Ah-Koon, maire du Tampon. Lorsqu’il assimile le Cafre à un objet d’attirance ou de répulsion vis à vis du tourisme, déclarant sans frémir que le fait de s’appeler "Plaine des Cafres" ne constitue pas un « élément d’appel touristique », il laisse entendre que cette dénomination détourne les touristes qui auraient sans doute peur en allant dans ce village du "Sud Sauvage" de tomber sur "plein de Cafres".
Et s’il existait des touristes qui avaient plutôt envie de connaître l’Histoire de la Plaine des Cafres, ses sites, ses paysages et bien sûr son volcan, on leur raconterait l’Histoire de nos ancêtres marrons qui se sont installés là et qui ont fait des enfants de toutes les couleurs, dont La Plaine-des-Cafres, "ce petit coin charmant de La Réunion", porte aujourd’hui l’étendard. On leur raconterait notre fierté d’être descendants des héros de la liberté.
Au lieu de cela, nous voilà plongé de nouveau dans cette symbolique du Cafre laid, effrayant, innommable : voici revenu le temps du mépris du Cafre…
Lorsqu’un député-maire, élu de la République, se met à tenir des propos d’une telle connotation raciste, déclarant sans vergogne que « la population et les enfants de La Plaine-des-Cafres se reconnaîtront mieux en tant que Volcanais qu’en tant que Cafriplainois, un nom qu’ils n’ont jamais adopté », on se demande s’il occupe bien sa fonction dans notre société multiculturelle, où la place des Cafres et leur contribution à la construction de l’identité réunionnaise n’est plus à démontrer mais nécessite d’être valorisée.
Vouloir débaptiser le nom d’un site lié à l’Histoire glorieuse des Cafres-marrons (il y a en si peu qui portent leur nom) c’est vouloir anéantir leur patrimoine et leur descendance.
Venir déclarer aujourd’hui, 155 ans après l’abolition de l’esclavage et 280 ans après la traite et l’édification du "Code noir" que le nom "cafre" est honteux et repoussant, c’est ressortir du tréfonds de sa mémoire toutes ces pensées qui ont fait les heures de gloire des esclavagistes.
Est-ce bien digne d’un maire d’aujourd’hui de vendre des clichés racistes pour développer le tourisme ? Il y a quelque chose de déplacé dans cette déclaration, un relent d’archaïsme. Et si c’était plutôt le maire Thien-Ah-Koon lui-même qui n’était plus à sa place ?
On laisserait vivre La Plaine-des-Cafres, avec son Histoire et sa culture plurielles sur lesquelles pourraient se fonder tout un programme touristique dont le maire a oublié d’en être le porteur.


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