Malaise

30 août 2003

La volonté d’apaisement semble être le maître mot de cette rentrée scolaire. Pour commencer, alors que les menaces gouvernementales d’application de l’arrêt Omont avaient fait passer - ce qui est compréhensible - l’inquiétude financière avant l’inquiétude politique, saluons les déclarations rassurantes de M. le Recteur Merlin quant au décompte des jours de grève. Voilà au moins une vexation évitée.
À en croire les interventions lénifiantes d’un principal de collège, apprécié pour ses qualités de communicant et passé maître dans l’art de souffler le chaud et le froid, tout se passe dans une bonne ambiance et tout est rentré dans l’ordre, les plaies semblant avoir cicatrisé plus vite qu’il n’aurait osé l’espérer. C’est aller vite en besogne. Nous avons là, soit un gros mensonge téléguidé, soit une preuve supplémentaire de la distance existant entre certains principaux ou proviseurs et leurs équipes pédagogiques.
Quelle volonté, quel déni de la réalité, quel aveuglement peut conduire à ce comportement d’autruche et faire comme si rien ne s’était passé ?
Nous n’allons pas réécrire l’Histoire mais simplement rappeler que rien n’a changé. Ce gouvernement est toujours aux ordres du MEDEF (la proposition de supprimer un jour férié du calendrier pour trouver de l’argent pour les personnes âgées en est caricaturale…), la volonté de commercialiser les services publics est toujours présente et seules les échéances électorales de 2004 ralentissent le rouleau compresseur.

Si rien n’a changé dans la volonté gouvernementale, beaucoup de choses ont changé dans le milieu enseignant : la prise de conscience politique chez beaucoup, la redécouverte de l’importance du tissu syndical et associatif (il y aura beaucoup d’adhésions cette année tant dans les syndicats que dans les associations) mais aussi la découverte parfois douloureuse du mépris affiché voire matraqué par ce gouvernement, la mascarade vécue comme une insulte de ces conseils de classe improbables et de cette orientation totalement administrative…
Si l’on y ajoute un sentiment d’incompréhension de la part des utilisateurs et des médias trop souvent à la solde du pouvoir, il est facile de comprendre l’état de malaise profond dans lequel sont beaucoup d’enseignants. Ne cherchez plus un enseignant heureux cette année. À moins de tomber sur un pro UMP favorable à la privatisation annoncée, vous n’en trouverez guère. Un ressort s’est cassé dans la machine Éducation nationale.
Beaucoup qui en ont la possibilité s’en vont, demandent leur retraite anticipée. Il y aura beaucoup de postes vacants en janvier 2004. C’était souvent les plus impliqués, les plus généreux, ceux qui ne comptaient pas leurs heures.
D’autres resteront et ne feront que ce qu’ils appellent le SMIC : service minimum inter catégoriel, en ne faisant que le strict minimum, celui pour lequel ils sont payés, enseigner la matière, garder les élèves. Finis les sorties, les itinéraires de découverte, les clubs, les voyages linguistiques, tout ces petits "plus" faits avec plaisir.
Avant.
Non, les plaies ne sont pas cicatrisées, l’amertume est profonde mais l’énergie et la volonté de tout faire pour que l’école ne soit pas bradée aux marchands est toujours là, bien présente.


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