Nous exigeons la dissolution du G8

30 mai 2003

Du 1er au 3 juin prochains, les chefs d’État des huit pays les plus riches du monde se rencontreront pour la première fois depuis la guerre d’Irak, au sommet du G8 à Évian. À l’origine, axé sur la question de l’accès à l’eau et sur le développement de l’Afrique ainsi que sur la responsabilité sociale des entreprises, ce sommet est présenté désormais comme le "G8 de la paix", désignation hypocrite quand on sait que Georges Bush et Tony Blair y seront présents. Ainsi, sans se soucier des différences passées, ils essaieront de légitimer à nouveau leur statut de gouvernement mondial auto-désigné.
L’association ATTAC, comme de nombreuses autres organisations, s’oppose à la tenue de ce sommet. À travers cette mobilisation, ATTAC veut mettre en cause la responsabilité politique des dirigeants des pays du G8 face aux dégâts provoqués par leur politique. Elle veut montrer que, face à ce directoire auto-proclamé de la planète, des politiques alternatives peuvent être mises en place et qu’un autre monde, plus juste, est possible. Elle veut contester sa légitimité en exigeant sa dissolution.

En effet, ce groupe de dirigeants, qui se réuniront à Évian pour la 28ème fois depuis 1975, est devenu au fil des ans une des institutions les plus puissantes du monde. Bien qu’il prétende n’être qu’un forum de discussions informel, il trace les grandes orientations d’une mondialisation soumise à l’exigence du profit et conforme aux intérêts des multinationales.
Pour imposer ces politiques, le G8 s’appuie sur les grandes institutions internationales (Fonds Monétaire International et Banque mondiale), dans lesquelles les pays qui le composent contrôlent la majorité des voix ou encore sur l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), élément déterminant du cadre institutionnel de la mondialisation néolibérale qu’il a construite méthodiquement.

Les politiques économiques et sociales de ce directoire de gouvernements qui prétendent gouverner la planète a eu des conséquences désastreuses pour tous les peuples et face à cet état du monde, les mouvements de contestations se sont progressivement développés.
Sous la pression de leurs critiques, le champ de compétences du G8, à l’origine ciblé sur les questions économiques, monétaires et financières, s’est élargi au fil des ans à de nouveaux thèmes, comme la lutte contre le SIDA et la dette des pays "en développement". Ainsi, une place de plus en plus importante est prise par les bons sentiments dans ses communiqués, laissant croire que sa préoccupation principale est la lutte contre la pauvreté, l’amélioration des conditions de vie et la préservation de la planète !
Mais ces promesses annoncées et répétées à chaque sommet avec fort battage médiatique sont sans substance ; les dirigeants du G8 sont incapables d’assumer la mise en œuvre de leurs décisions ou pire s’en détournent et pratiquent une politique contraire.
Leur programme de réduction de la dette des pays les plus pauvres, dont les gouvernements du G8 sont largement responsables, s’est avéré totalement insuffisant, tout en imposant des conditions inacceptables avec les plans d’ajustement structurel du FMI qui réduisent ces pays à la faillite et la libéralisation commerciale, sous l’égide de l’OMC, qui se révèle chaque jour plus défavorable pour eux.
Autre exemple de l’immense décalage entre les intentions affichées par le G8 et les politiques menées par ses membres dirigeants : les 10 milliards de dollars annuels promis par le G8 en 2001 pour engager la lutte contre le SIDA, qui touche plus de 40 millions de personnes dans le monde, n’ont toujours pas été effectivement engagés et le rapport du Programme des Nations Unis pour le développement 2000 constate que sous la pression des grands laboratoires pharmaceutiques, certains pays industrialisés exercent des pressions sur les pays "en développement" pour les dissuader de produire des versions génériques susceptibles de se substituer aux médicaments sous brevet.

Actuellement, la constatation qui s’affirme porte sur la nature du G8 en tant qu’institution mondiale. En effet, le G8 n’est pas une organisation reconnue par le Droit international et reste aujourd’hui encore un groupe informel, sans secrétariat permanent, sans rapport officiel, ni règle écrite. Si officiellement il ne décide de rien, le G7 (plus la Russie) est une "jet set" des puissances les plus influentes : en 2000, les pays du G7, qui ne représentaient que 12% de la population de la planète et 16% de la surface de la Terre, totalisaient 45% de la production et 60% des dépenses militaires mondiales.
Le G8 constitue un club exclusif de chefs d’État représentant les privilégiés de la planète, qui définissent les axes de la politique internationale et s’arrogent le droit de décider pour tous... On ne peut pas adhérer à ce club exclusif ; on y est au mieux coopté. Aucun pays "en développement" n’y est représenté et l’invitation de quelques chefs d’État de ces pays ainsi que du Secrétaire général des Nations Unis ne change rien au fond de la question.
Le G8, auquel s’associe la Commission européenne, n’est pas un gouvernement mondial, d’autant qu’il n’existe pas de peuple mondial, mais il n’est pas non plus un simulacre. Avec ses réunions périodiques de chefs d’État et de ministres, ses "sherpas", ces conseillers permanents qui en assurent le secrétariat, sa mobilisation d’experts, ses relais dans toutes les institutions internationales et son accès permanent à l’ensemble des médias, ce club est devenu une institution mondiale permanente.
Certes, les dirigeants du G8 ont été élus démocratiquement pour conduire leur pays mais aucun peuple ne les a mandatés pour gouverner le monde : leur prétention a joué ce rôle est donc illégitime.

Après le sommet de Gênes en 2001, où 300.000 personnes ont manifesté en dépit de la répression policière qui a entraîné la mort de Carlo Guilliani, un jeune militant italien, le G8 s’est exilé en 2002 dans les Rocheuses canadiennes, à Kananaskis. Cette année, il a lieu à Évian, station thermale choisie par la France, qui en assure l’organisation, à cause de sa situation géographique (coincée entre des montagnes, un lac et deux frontières) qui permet de contrôler facilement son unique voie d’accès pour empêcher toute contestation.
Malgré cela, la mobilisation contre le G8 se met en place avec de nombreuses initiatives co-organisées par ATTAC : conférences et sommets alternatifs, villages alternatifs, blocages symboliques, "Feu au lac" et manifestations à Genève et Annemasse ainsi que la présentation de la déclaration du G-Monde. Élaborée par tous les ATTAC à partir de leur réunion à Porto Alegre en janvier 2003, cette déclaration rappelle les aspirations des peuples du Nord comme du Sud et expose les voies pour les faire aboutir. Elle montre que, face aux prétentions hégémoniques du G8, un monde autre que celui de la finance, des multinationales et des guerres préventives est bel et bien possible !
À La Réunion, nous vous invitons à nous rejoindre le 31 mai à partir de 14 heures devant la poste de Saint-Denis.


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