Pas de politique de territoire

27 septembre 2018, par François Maugis

L’ile de La Réunion n’a pas la chance de bénéficier d’une politique de territoire telle que celle qui est menée dans certaines régions du monde. Le grand intérêt d’une politique de territoire c’est de planifier les différentes actions d’aménagement, non pas en fonction d’arbitrages ou de compromis entre les acteurs/décideurs économiques mais en fonction de priorités liées à la cohérence socio écologique. Mais, me direz-vous, quel est ce nouveau concept ? Il relève d’une démarche globale liée à la fois aux grands équilibres de la vie sur notre planète et à la recherche d’un dialogue optimum entre l’homme et la nature, son propre biotope. Que ce soit sur le plan individuel ou collectif, ce concept part du principe que notre humanité ne pourra survivre très longtemps sans le respect de ces règles.

Tout le monde l’admet aujourd’hui, il y a bien longtemps que cet équilibre est rompu. Cela ne saute pas aux yeux pour les 50% des humains les mieux lotis, ceux dont le relatif bien-être est rendu possible du fait du pillage exercé sur les territoires aujourd’hui appauvris et qui représentent les 50% restant. Autrement dit, sur notre planète, 50% des humains en ont trop, 50% n’en n’ont pas assez. C’est ce déséquilibre qui est, entre autre, la source des tensions qui empoisonnent l’humanité depuis plusieurs siècles. Pour autant, une répartition plus équitable des fruits de la Terre, résoudrait-elle le problème ? Pas si sûr car la dynamique productiviste qui alimente la société de consommation (il faut bien le dire, un tout petit peu débridée) est un ogre à l’appétit féroce et illimité. Et là est tout le problème. La souris pourra-t-elle survivre lorsqu’elle aura consommé tout le fromage ? Autrement dit, comment continuer à vivre si l’on consomme plus que ce que notre Terre est en mesure de produire ? On peut admettre une certaine inégalité des territoires, à une seule condition, c’est que la somme globale consommée par l’ensemble des territoires, ne soit pas supérieure à ce que peut produire notre planète. On peut donc admettre que les régions fertiles du monde puissent alimenter certains humains vivant dans des déserts. Encore faut-il que tout le monde soit correctement alimenté, encore faut-il que les déserts soient productifs d’une monnaie d’échange permettant de s’alimenter.

Ce n’est pas simple. Il faut se méfier de la tentation hégémonique du commerce international. Il ne faut pas oublier que le pillage dont il est fait mention précédemment est lié, au moins en partie, à la dégradation des termes de l’échange. Cela ajouté aux abus de la loi du plus fort, il ne faut pas l’oublier, a permis le déséquilibre et surtout son accroissement. Un objectif global raisonnable serait donc que chaque territoire trouve un équilibre entre ce qu’il peut produire et ses réels besoins. Il faut bien sûr ajouter une règle essentielle, cet équilibre doit être durable. Les excès et les dérives sont tels qu’un retour à une sobre raison, paraît utopique. On se rend compte pourtant que si nous consacrions plus de temps et d’énergie pour le qualitatif, cette démarche vertueuse paraît possible. Le quantitatif et le toujours plus nous menant à une impasse, j’avoue que je ne comprends pas pourquoi nous ne choisirions pas de nous investir dans le qualitatif.

Ce changement de paradigme paraît lourd et problématique sur les grands continents mais il serait certainement plus facilement réalisable sur un territoire à taille humaine. L’ile de La Réunion dispose d’un fantastique potentiel naturel et humain permettant d’y parvenir. Quelle magnifique démonstration pour le Monde entier si nous y parvenions !

François Maugis
Économiste, écrivain et philosophe

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