Tant de questions sans réponse !

14 février 2006

Je suis une lycéenne de l’île de La Réunion qui a contracté le chikungunya
et j’ai beaucoup de mal à écrire ces quelques lignes. J’habite dans la jolie petite commune de l’Entre-Deux et j’écris aujourd’hui afin de dénoncer l’incapacité du maire, mais aussi de la DRASS et de toutes les organisations qui prétendent faire quelque chose contre ce fléau.
Je me suis bien renseignée sur le moustique, ainsi que sur les moyens donnés dans les autres pays ayant contracté le virus. Déjà, ils y imposent une quarantaine de 5 jours pour les personnes possédant le chikungunya, car les moustiques sains peuvent piquer les personnes malades et êtres porteurs à leur tour du virus.
C’est pourquoi, dès la saison estivale, les personnes atteintes du chikungunya ont augmenté de façon exponentielle.

Les autorités dites compétentes ont ainsi commencé, depuis 1 an de mutisme, à faire parler d’eux. Ils ont multiplié les interventions à la télévision, dans les journaux. Ensuite ça a été la politique de qui emploie le plus de moyens. Et c’était vraiment horrible. Ensuite les morts ont commencé à éveiller des soupçons. Certains se posaient plein de questions, mais personne n’était assez compétent et assez connaisseur sur le sujet pour pouvoir dire la vérité et rassurer tout le monde.
En sa baladant dans les rues des villes les plus touchées, comme à Saint-Louis, Saint-Pierre et encore beaucoup d’autres communes, j’avais l’impression d’être dans des villes fantômes, La Réunion ressemble à une île fantôme : personne dans les magasins, les grandes surfaces, pas ou peu de personnel, la rentrée repoussée pour cause de démoustication.
Bref, ensuite, il y a eu ce problème avec les produits paraissant nocifs. J’emploie ici le verbe paraître car personne n’a pu me dire si ces produits représentaient un danger pour la santé ou non. Mais la peur est là.

Ma mère contracte une maladie de peau, le psoriasis, cette maladie n’est pas due au chikungunya, mais elle est interdite de médicaments anti-inflammatoires alors que c’est ceux-ci et seulement eux qui sont prescrits aux personnes atteintes du chikungunya, avec de l’efferalgan. Je ne souhaite vraiment pas qu’elle attrape ce virus, sinon elle sera comme moi, en un piteux état, à essayer de calmer les douleurs, juste avec l’efferalgan. Le fait est là, il n’y a rien pour lutter efficacement contre les douleurs dues au chikungunya. Moi qui l’ai attrapé, j’ai horriblement mal, les membres engourdis, très mal au dos, aux articulations et n’ai plus faim du tout. Je ne mange plus rien, je me force et après j’ai la nausée. Je m’imagine le mal d’une personne âgée malade, car elle ne doit plus se nourrir, et puis en plus, le chikungunya fait plus mal aux personnes adultes et âgées. Les enfants et adolescents ne sont pas trop touchés. Cependant, cela est déjà grave. Beaucoup de personnes sont mortes avec la présence du virus dit chikungunya dans le sang, et même un enfant, de 10 ans, comme quoi même les personnes jeunes ne sont pas à l’abri.

Mais bon sang, à qui la faute ? Il y a des politiques à la télé qui ne répondent pas aux questions des journalistes, ils les contournent et les tournent à leur avantage. Il y a des lignes téléphoniques ouvertes, mais lorsque l’on demande si les produis employés sont toxiques, ils nous donnent des numéros de téléphone, on appelle ces services qu’ils disent compétents, mais ceux-ci nous renvoient encore à d’autres et d’autres services, si bien que en fin de compte, je me retrouve avec les mêmes numéros incompétents.
Tout le monde se renvoie la balle, les questions restent sans réponses et les demandes de justification de ce que l’on entend aux informations sont introuvables. Personne ne peut donc me dire de quoi il en décompte ? Si je risque, en plus du chikungunya, une quelconque complication à cause des médicaments, comme la peau des bébés brûlée, ou si je risque une quelconque allergie ou autres avec les produits nocifs utilisés dans la démoustication ?

Personne n’est donc assez compétent pour répondre à ces questions ?

Une équipe de démoustication est venue le mercredi 8 février, chez moi, ils devaient d’abord passer depuis le lundi. Nous avons d’abord cru qu’ils avaient annulé la démoustication à cause des produits toxiques, mais ils sont venus. Ils ont demandé l’autorisation afin de démoustiquer, et manipulaient le produit sans protection, sans gants, et leurs masques étaient ridicules. De plus, leur soi-disant formation n’est pas du tout correcte, cela augmente le risque que ces tueurs de nids de moustiques aient ensuite des problèmes à cause du produit. Je trouve ça vraiment pas normal.
De plus, des écoles ont été fermées car des élèves avaient une réaction allergique aux produits contre les moustiques. C’est donc dangereux !

J’ai lu dans le journal le matin même, que le Conseil général avaient interdit toute forme de démoustication avec ces produits dangereux, mais les hommes mal cagoulés, qui venaient chez moi, disaient n’avoir reçu aucun contre-ordre, donc ils ont nettoyé notre cour avec leur produit. Mon inquiétude était grande, nous nous sommes donc enfermés dans la maison où il faisait au moins 32 degrés sous le toit.

Ces produits sont-ils nocifs ou non ? De plus, malgré les démoustications de plus en plus intenses, le nombre de personnes atteintes du virus n’a cessé d’augmenter, de façon exponentielle ! Comment cela se fait-il ? Les mesures prises auraient dû freiner l’augmentation du nombre de malades, mais cela n’a pas marché.

Le moustique comme tout autre insecte a des instincts de survie très forts.
Il fuit là où il ne se sent pas en sécurité, et si lors d’une démoustication, des moustiques ou même un seul malheureux moustique arrive à survivre, il aura développé une immunisation du produit. De plus, comme le produit est très fort, les petits produits dits individuels (crèmes, sprays, etc...) n’auront eux aussi plus aucune utilité contre ces moustiques mutants.

Les soi disant services compétents que nous payons avec nos impôts, que nous appelons à l’aide, pour qui nous votons, n’ont pas utilisé le produit biologique avant tout autre utilisation de produits nocifs pour la santé des personnes.
C’est un peu contradictoire, utiliser un produit fort, et pouvant engendrer des problèmes sur les gens, pour éradiquer le moustique et sauver la population du chikungunya. Qu’est ce que cela signifie ? Je ne comprends pas. Sauver des gens en les débarrassant du mal en utilisant un produit d’autant plus dangereux pour ces gens ? Alors que depuis le tout début, il y avait la possibilité d’utiliser un produit bio, efficace mais d’autant moins dangereux.

Tout ça je ne comprends pas. Et puis aussi d’avoir attendu qu’il y a plein de morts pour pouvoir en parler aux informations de métropole, et que l’État fasse quelque chose ! Tout de même un an ! Et quelles choses fait l’État ? Les formations données ne sont pas complètes et l’argent envoyé, ce n’est pas assez ! Il y a de quoi donner des primes pour envoyer des militaires mais donner du travail à La Réunion ça non, après venez pleurnicher sur le chômage, sur l’économie de La Réunion en baisse. Ici à ce degré, les "il n’est jamais trop tard", ou les "vaux mieux tard que jamais" ne sont pas les bienvenus.

Une lycéenne


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