Trois exemples pour un constat navrant

14 septembre 2004

C’est dans la plus grande discrétion que, dans la zone océan Indien, se mettent en place des politiques économiques conduites par certains grands groupes français, avec la caution, voire la bénédiction du gouvernement, des politiques nationaux et locaux. Trois exemples éclairent ce constat navrant pour La Réunion, qui devrait pourtant être l’interface naturel et privilégié de la France et de l’Europe.

Le premier, historique s’il en est, puisqu’il perdure depuis quelques décennies, c’est la politique du groupe Air France qui a favorisé la piste longue de Plaisance et donc les vols directs depuis Paris et Londres, essentiels au développement du tourisme et des affaires, 15 ans avant La Réunion restée “à la traîne” jusqu’au combat d’Échanges sans frontières et du président Lagourgue pour la baisse des tarifs et surtout la piste longue de Gillot.
La stratégie du groupe Air France, actionnaire d’Air Mauritius, a toujours consisté à privilégier Maurice comme hub aérien de l’océan Indien vers l’ Europe et vers les pays proches et lointains de la zone pour y garder sa “chasse gardée historique”. Aujourd’hui, plus que jamais, pour l’emploi de sa jeunesse, pour son développement économique durable, il importe que La Réunion, qui est bien le seul interface institutionnel de la France et de l’ Europe, ait, avec ses deux aéroports, l’ambition légitime de devenir pour les 450 millions d’ Européens, les 250 millions de Russes et les 80 millions d’Ukrainiens, le hub aérien de l’océan Indien, Maurice développant, en étroite synergie et complémentarité avec La Réunion, son hub vers l’Asie, l’Océanie et l’Afrique.
C’est par cette stratégie de co-partenariat élaborée par l’ensemble des pays de la zone qu’une politique de développement touristique et économique durable permettra l’élévation des PIB de chacun et non pas en se limitant aux intérêts et aux stratégies comptables d’une compagnie aérienne, fût-elle ex-compagnie nationale française.

Comment admettre ces discours ?

Le second exemple, c’est l’activité commerciale maritime portuaire. Au motif que Maurice est moins cher et plus efficace (ce qui est vrai), nous avons vu un certain nombre d’opérateurs économiques locaux et nationaux, voire européens, privilégier Port-Louis comme port d’éclatement de la zone. Cette stratégie est d’autant plus préjudiciable à court, moyen et long terme, pour La Réunion, qu’il n’est pas exclu, dans la prochaine décennie, que la zone océan Indien, de Durban à Dubaï, via Réunion, Madagascar, Maurice, Kenya et Tanzanie, devienne une zone de très forte valeur ajoutée pour l’activité touristique croisiériste pour les clientèles européennes, et même mondiales, dont le port d’attache pourrait être Port Réunion, et l’aéroport d’arrivée et de départ, Roland-Garros ( ou Pierrefonds).
Il est évident qu’une telle perspective nécessite de l’ambition (sans mégalomanie) et surtout une volonté farouche de pourvoir au développement de notre île et de notre zone avec le soutien de la France et de l’Europe, principaux bénéficiaires de cette perspective touristique nouvelle.

Le troisième exemple, tout récent, concerne les télécommunications avec la venue privée à Maurice du PDG de France Télécom, société nationale fraîchement privatisée puisque l’État n’y est plus majoritaire. Quel discours a tenu, au premier ministre mauricien, ce dirigeant d’une entreprise qui a “ponctionné” pendant 50 ans les contribuables français ? "Maurice doit, avec notre entier soutien, devenir le hub des télécommunications de l’océan Indien !" Ce PDG de France Télécom serait-il devenu citoyen mauricien en étant à la tête d’un ex-groupe national devenu privé ?
Ne reviendrait-il pas logiquement à La Réunion de devenir ce hub des télécommunications dont nos jeunes Réunionnais à bac +2, +3, +4 ou +5 ont tant besoin pour un emploi ? Ceux qui pleurent tant sur la “préférence régionale” ou “l’emploi local” ne devraient-ils pas s’inquiéter de ces graves dérives qui en ne favorisant pas à La Réunion la création d’emplois, tournent le dos à la seule vraie solution pour l’emploi pour tous : développer les potentiels de notre île et créer des emplois sans sacrifier le court terme des profits juteux au long terme de l’avenir de La Réunion, au sein de la France et de l’Europe ?
En conclusion, comment admettre le discours de tous ceux qui préconisent “le développement durable” de notre île lorsque par ailleurs, dans la plus grande indifférence (ou ignorance, ce qui est plus grave) nous laissons des stratégies se développer à l’encontre de La Réunion et des Réunionnais ?

Antoine FRANCO,
un citoyen qui veut un avenir pour notre île au monde.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année

La pès kabo

5 juillet, par Christian Fontaine

Kan i ariv Novanm-Désanm-Zanvié, domoun i réziste pi ek la salèr. Zène-zan i mars dann somin, zène-fi i roul an dékolté ; sétaki i rod in manir po (…)


+ Lus