Jean-Marie Le Bouvellec, président de la FRBTP :

Faire à l’échelle de La Réunion ce que nous avons réussi pour la route des Tamarins : anticiper

31 décembre 2008, par Manuel Marchal

Pour préserver un outil de travail nécessaire aux besoins de La Réunion, Jean-Marie Le Bourvellec appelle tous les maîtres d’ouvrage à présenter leurs projets dès le début du mois de février. Il demande également aux établissements financiers de tenir compte des difficultés de trésorerie des entreprises dues à l’arrêt ou au report de plusieurs chantiers importants programmés.

En 2007, 14.500 logements ont été construits. Qu’en est-il pour cette année et quelles sont les perspectives pour 2009 ?


- Cette année, le niveau devrait être le même qu’en 2007. Mais pour 2009, nous avons des craintes. Ce sont tout d’abord les exigences accrues des organismes financiers avant de lancer les opérations : nous constatons un ralentissement des échanges. C’est la partie visible de la crise.
Mais les craintes sont davantage liées aux dispositions retenues dans la nouvelle loi-programme. Si la défiscalisation patrimoniale n’est pas maintenue, cela aura un impact majeur sur le logement, avec un ralentissement fort de la construction et entre 6.000 à 9.000 emplois menacés. Il faut maintenir la défiscalisation patrimoniale dans le logement intermédiaire, car sans cela, nous n’avons pas les moyens de construire suffisamment de logements.
En effet, au cours des 20 prochaines années, la population va croître de 25%, et nous avons déjà un retard de 30.000 logements sociaux. La Réunion a donc un besoin structurel de logements. Dans un département français, gageons que le bon sens l’emportera pour que personne ne soit contraint de vivre dans la rue.

Quels sont les problèmes rencontrés par le secteur du BTP ?


- Plusieurs grands projets ont été arrêtés simultanément. Cela nous coûte entre 500 et 600 millions d’euros de chiffres d’affaires, soit environ 30% de l’activité d’une année. Nous avons constaté une augmentation du nombre de dépôts de bilan.
Nous avons donc un trou d’air de 18 mois à 2 ans dans les grands travaux, en attendant le chantier du tram-train. Par ailleurs, les permis de construire refusés pour cause d’absence de mise aux normes des stations d’épuration pèsent beaucoup.
La problématique aujourd’hui est de deux ordres. D’une part, dès le 1er janvier, l’application de la loi de modernisation de l’économie obligera à payer les fournisseurs beaucoup plus rapidement (délai 60 jours). D’autre part, il manque des projets pour relancer l’activité à la rentrée des congés du BTP.
D’où cet appel fort : demander aux maîtres d’ouvrage de sortir leurs projets dès le début de l’année. Il est tout aussi important que les établissements financiers élargissent leurs crédits de trésorerie pour les entreprises. Car nous sentons une tension qui commence à arriver sur les trésoreries des sociétés.

Quelles peuvent être les solutions pour passer cette période difficile ?


- La Charte pour la planification de la construction est un atout, elle peut nous permettre d’avoir une visibilité afin de pouvoir anticiper sur les besoins en main d’œuvre. Il s’agit d’étendre à l’échelle de l’île ce que nous avons réussi à faire pour préparer le chantier de la route des Tamarins. En anticipant, nous avons pu former plus de 1.000 personnes et en sortir 300 du chômage.
Cette charte prévoit que La Réunion soit dotée d’un outil de planification de la commande publique et privée. Nous avons l’engagement de l’ensemble des acteurs (Etat, Région, Département, communes...) à verser dans cette base de données l’ensemble de leurs projets.
Cela donnera des éléments pour anticiper sur les besoins en formation. Là, on est dans le développement durable. C’est une conscience collective, un ensemble d’acteurs qui se sont fédérés dans un but commun.

Que pensez-vous d’une possibilité évoquée par le ministre des Travaux publics de Madagascar lors de sa visite à La Réunion : la possibilité pour des entreprises réunionnaises de soumissionner aux appels d’offres dans la Grande Île ?


- Il est important d’avoir à La Réunion des entreprises structurées, avec des bases solides, afin que ces dernières puissent faire de la coopération régionale. Il est ensuite important de se renseigner dans tous les domaines, car c’est de l’export. Pourquoi ne pas envisager la création d’un guichet unique susceptible de nous donner une connaissance exacte du contexte dans les pays voisins ?
C’est en tout cas une idée intéressante. Les entreprises réunionnaises ont un savoir-faire, et elles peuvent également participer à des actions de transfert de technologies.

Propos recueillis par M.M.

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