Jacky Bazon, au chevet des désœuvrés de notre société

Sa bataille

15 janvier 2009, par Jean Fabrice Nativel

À Saint-Denis, il est connu de tous les sans domiciles fixe. Jacky Bazon consacre sa vie à les aider. Avec des bénévoles, il s’occupe de l’organisation de repas ou de sorties. Il est à leurs côtés. On peut compter sur lui. Il est bien souvent le premier arrivé et bien souvent le dernier à partir. Coup de chapeau Jacky, mon ami, pour tout ce que tu fais.

Quels sont les métiers que vous avez exercés ?
- J’ai été ouvrier en électricité, gardien lors de la construction du Port-Est. J’ai travaillé pour deux marques connues de boisson, une locale et une internationale. Je disposais les bouteilles sur la chaîne et je les mettais sur les palettes. J’étais aussi coursier à l’Office Départementale du Sport puis de nouveau gardien, mais dans un collège.

Quel est votre emploi aujourd’hui ?
- Je suis plongeur au collège Bourbon (Saint-Denis) - rien à voir avec la natation. Je nettoie le réfectoire, je dispose les récipients d’eau sur les tables. Je sors et rentre les poubelles. Je prends plaisir dans ce que je fais. Je suis debout de bonne heure.

Vous avez en emploi du temps bien rempli.
- Oui. Je me suis occupé de ma fille pendant une longue période. Je l’ai soutenue dans les moments difficiles. On s’entend bien. On discute. Aujourd’hui, elle a son appartement. Elle vit avec sa fille, ma petite-fille. Tous les mercredis, j’encadre de jeunes footballeurs. Je suis investi dans une association. Je participe à des actions destinées en faveur des sans domicile fixe.

Comment vous est venu cette idée de vous impliquer auprès des SDF ?
- J’étais bénévole au sein de l’association Culturelle Sportive Malgache (ACSM) il y a une vingtaine d’années de cela. Un des membres de notre structure se rend à Madagascar à l’invitation du Père Pédro. À son retour, il nous raconte son expérience, ce qu’il a vu. Je suis très touché. Nous décidons de l’organisation d’une soirée dansante où les fonds récoltés seront reversés au Père Pédro. Peu de temps après, l’ACSM est dissoute. Un de mes amis, Jean-René Lebon m’invite à participer à une réunion de l’association Centre-ville est (Saint-Denis). Je m’intègre au groupe. Je connais bien ses acteurs. On convient avec Jimmy Tortillard, Christian Magamootoo, "gro Frèd" de mettre sur pied un tour de l’île en bus pour les SDF dionysiens. On se rend au Musée de Stella Matutina (Saint-Leu), à la Ferme d’autruche et on partage un repas à l’Anse des Cascades à Saint-Philippe.

Continuez-vous à vous impliquer ?
- Plus que jamais ! Parmi les SDF, j’ai des amis, de la famille. Pour moi, il est nécessaire de prendre soin de ces gens. Certains d’entre eux ont tout perdu. Et pourtant, ils avaient un emploi ou étaient chef d’entreprise. Du jour au lendemain, ils se retrouvent dans cette situation. Ils n’ont plus d’amis, plus de famille. Ça m’affecte. Je vais vers eux. J’ai toujours un petit mot ou un petit geste pour eux. Ils sont mes frères. Avec peu, on fait beaucoup pour eux. Je sollicite les particuliers, les privés et les services de la mairie pour des dons en numéraires ou en nature. D’ailleurs, je profite de cette interview pour les remercier tous.

Racontez-nous votre enfance ?
- Je suis né et j’ai grandi au Butor, non loin de la boutique Sitaya (Saint-Denis) du temps où la rue Maréchal Leclerc s’appelait la rue Grand Chemin et la rue du Général de Gaulle, rue Dauphine. On était une famille de treize enfants à vivre dans une case en tôles. Mon père était ferrailleur, ma mère lavait le linge. Mon grand-père était soldat, il a pris part à la guerre de 14-18 et de Madagascar. Il percevait une pension. Ma grand-mère lavait le linge au bas de la rivière. Non loin de nous vivaient des proches. J’ai été scolarisé à l’école du Butor. Cette zone était recouverte de cannes. Il y avait même un lavoir. Je me souviens qu’en face de l’actuel bowling, les "jako Babé, Baba et Dodo" venaient se préparer sur le terrain "kounan". Je me rappelle des dégâts occasionnés par le cyclone "Géni". Il a emporté le toit de notre case. On a trouvé refuge dans un hôpital situé à l’époque en face du magasin Ghanty Royal, rue Maréchal Leclerc.

Propos recueillis par Jean-Fabrice Nativel

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