68 vice-présidents : l’intercommunalité mérite bien mieux que cela !

28 janvier 2008

Dans “Le Quotidien” du lundi 21 janvier dernier, Bruno Geoffroy ose un parallèle entre, d’une part, ces « agitateurs d’idées qui (en 2004) avaient lancé un débat pour que le Président des Etats-Unis ne soit plus élu par les seuls Américains, mais par les citoyens de tous les pays » et, d’autre part, « les communautés de communes puis les communautés d’agglomérations (qui), rapidement, ont privé les mairies de leurs compétences sans que leurs membres soient directement désignés par les habitants des territoires dont ils ont la charge ».

Partant de ce deuxième élément de sa comparaison, le Rédacteur en chef du “Quotidien” évoque, avec sévérité et une logique certaine, « la campagne électorale qui s’est ouverte (et qui) repose aujourd’hui sur un vaste mensonge : les candidats font des promesses dont la réalisation n’appartiendra pas à la collectivité dont ils pourraient avoir la charge ».

L’analyse de Bruno Geoffroy est subtile. On peut cependant s’étonner qu’à aucun moment n’est évoquée par un observateur aussi pertinent de notre vie publique l’énorme imposture que portent, en pleine légalité il est vrai, les EPCI de la République française : le régime indemnitaire de ses élus. A la décharge de Bruno Geoffroy, L.B., dans un de ses derniers édito, ne l’a pas fait non plus.

Jean-Marie Virapoullé, Président de la CIREST, ne se trompe pas quand il affirme que la légalité permet l’embauche par son EPCI de telle ou telle personne. Qu’on ne compte pas sur moi pour prétendre que Cyrille Melchior n’a pas, en plus des diplômes exigés, les compétences requises pour être directeur général adjoint chargés des Finances à la CIREST. Qu’il y travaille donc à 75% parce qu’il a besoin d’un peu de temps pour se consacrer par ailleurs à ses fonctions de premier vice-président du Conseil Général me paraît logique et acceptable. Et ce qu’il perçoit, en salaire et indemnités pour ce double travail, correspond sans aucun doute à un temps réellement effectué. Mais Cyrille Melchior est également - ce que la loi autorise - adjoint au Maire de Saint-Paul et conseiller communautaire au TCO. Pour cette dernière fonction, je suis bien placé pour affirmer qu’il ne la remplit pas. Comme bien d’autres d’ailleurs ! Pour l’honneur de ses citoyens qui auraient, humainement parlant, les moyens de se pencher sur d’autres responsabilités politiques encore, la République française pourrait bien limiter l’indemnisation à une seule de leurs fonctions électives. Faut-il le rappeler : car, cela se voit et cela se vit, pour nombre d’élus communautaires par exemple, le « travail » se limite à être présents et à conforter par un vote à la va-vite le travail de fonctionnaires territoriaux hautement compétents placés sous la responsabilité politique d’un Président. Et notre République paye grassement pour “la responsabilité politique” ! Comme s’il ne s’agissait pas avant tout d’une mission faite de noblesse et de respectable désintéressement !

Qui oserait affirmer qu’il y a un travail effectif (qui mérite les salaires que l’on sait) pour 7 vice-présidents à la CIVIS, 12 à la CINOR, 9 à la C.C.Sud, 11 à la CIREST et (excusez du peu, mais... c’est légal) 29 au TCO, soit en tout 68 vice-présidents à côté de 5 Présidents ??? Qui osera mettre sur la place publique les sommes colossales ainsi dispensées ??? L’intercommunalité mérite bien mieux que cela.

Jean-Marie Virapoullé ne se trompe pas quand il dit que tout cela est légal. Il ne se trompe pas. Mais il trompe les citoyens. Car, ici, ce qui est légal est loin d’être moral. Et un homme politique ne peut pas s’asseoir sur ce qui est moral sauf à considérer que l’on puisse, dans un cabinet médical par exemple, consulter ses patients pendant trois jours pleins et, le reste de la semaine, être un adjoint au maire actif, un conseiller général omniprésent et, enfin, un Président d’EPCI qui se veut particulièrement efficace. Cela serait tellement beau si le fric (même ou surtout légalement perçu) ne venait pas nous poser une interrogation au goût amer.

Raymond Lauret


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