’Ah ! Les communistes, dommage que vous soyez communistes !’

13 septembre 2005

En 1996 mourait Maurice Tomi. J’eus alors l’envie de dire que cet homme classé de droite, patron intransigeant, avait non seulement du tempérament mais aussi du cœur. Je l’avais écrit. Personne n’en avait trouvé à redire... Je vous propose ce retour en arrière...

En septembre 1973, tout jeune élu municipal du Port, j’eus l’honneur de faire la campagne des cantonales contre Maurice Tomi. Dans notre cité ouvrière et maritime, lui, le grand patron envoyé par la droite guerroyer contre l’incontesté leader du syndicalisme qu’était Bruny Payet, ne pouvait que perdre cette bataille électorale (1).
Je me rappelle cet adversaire valeureux, allant au charbon en sachant fort que ses propres ouvriers qui l’aimaient bien n’allaient cependant pas trahir leur drapeau du Parti communiste réunionnais.
Je me rappelle que c’est alors que j’exaltais le peuple à voter Bruny Payet que j’appris à apprécier cet homme de bon sens qui, pour le prix de "trois œufs par jour", offrait aux habitants de l’île la possibilité d’avoir leur "case Tomi".
Je le rencontrais pour la première fois le jour du scrutin. Nous nous retrouvâmes en train, lui et moi, de donner le bras à une dame âgée qui peinait à redescendre les escaliers d’un bureau de vote situé à l’école de la rue du Général Émile Rolland. Nous en profitâmes pour nous présenter l’un à l’autre. Il me parla de "ses" maisons, de ses projets d’extension, de son usine, de la zone industrielle Nord, de son désir de rencontrer un jour Paul Vergès et de son admiration pour Bruny Payet.
Et dans un éclat de rire qui sentait bon le tabac dont il bourrait sa pipe, il lâcha : "Ah ! dommage, vous les communistes, que vous soyez communistes !"
Je l’ai retrouvé plus tard, lorsque furent réalisées les ZAC Léon de Lépervanche et Raymond Vergès, avec leurs 320 petites maisons qui devaient accueillir une grande partie des habitants du gros bidonville du Cœur Saignant. Il était très fier d’avoir "construit autant de cases d’un coup dans une ville communiste". Et il me précisa, avec son humour bien terrien : "Vous voyez, quand je vous disais qu’ils sont bien, les communistes !".
Il avait du respect pour les élus que nous étions.
Je salue aujourd’hui un grand Réunionnais.

(1) Aux élections cantonales du 23 Septembre 1973, sur 8.239 électeurs que comptait la commune du Port, il y eut 5.275 votants (64 %). On compta 106 bulletins nuls. Maurice Tomi remporta 1.829 suffrages (35 %) et Bruny Payet 3.340 (65 %).

R. Lauret


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