Alors on a inventé une énorme fumisterie : la sanction financière...

12 mai 2006

On ne peut pas se contenter de seulement sourire devant la confession de Jean-Claude Fruteau à propos de ses indemnités de conseiller général qu’il "consacre ; a-t-il dit, en totalité à aider les autres" : un de ses anciens protégés l’ayant pris au mot (et au bout de menaces sérieuses quant à sa sécurité physique), l’affaire, on l’a vu, a abouti au tribunal.
On ne peut pas non plus se satisfaire de commenter... le commentaire que tout cela a inspiré à un chroniqueur régulier du courrier des lecteurs, M. Henri Dalbos, lequel chroniqueur n’hésite pas à accuser : "Mettre son indemnité dans l’escarcelle de l’entraide est une malhonnêteté politique, une manière de transformer la charité en magnanimité". On ne peut pas s’en contenter. Pour deux raisons au moins : la première, c’est que la charité, si elle n’est pas clamée sur les toits, n’est pas en soi un acte honteux. On peut tout à fait considérer qu’en attendant qu’un jour le mot "solidarité" (qui - ce n’est pas un hasard - ne figure pas aux côtés de "Liberté... Égalité... Fraternité... ") se traduise pour les plus pauvres d’une manière qui exclurait leur humiliation, donner aux plus démunis ce qu’on a de trop peut être un réflexe d’humain. Même si l’humain en question est un homme politique de dimension nationale et membre de ce que l’on appelle un "grand parti"...
La seconde, c’est que Jean-Claude Fruteau n’a pas dit qu’il faisait de la charité. "Aider les autres", cela peut ne pas vouloir dire qu’on en fait. En l’occurrence, dans la cas présent, il s’agit de toute autre chose qu’un acte humaniste...
Le fond du problème reste en fait, plus que jamais, le bien fondé de “ces” indemnités que la République distribue à “en veux-tu, en voilà” ! La République et ses législateurs ont choisi de rémunérer, non pas le travail mais une supposée et totalement virtuelle responsabilité des élus dans des mandats qui, parce qu’ils sont trop nombreux, ont permis d’inventer la notion stupide du “quorum”.
Le quorum, c’est la faculté qu’ont ceux qui, pour toutes sortes de raisons (paresse, j’m’en foutisme, emploi du temps trop chargé, indifférence à un ordre du jour considéré avec raison comme trop technique...) boycottent les séances et pénalisent ainsi ceux qui se sont déplacés... La séance, “faute de quorum”, est reportée.
Cinq jours après, quel que soit le nombre de présents (une seule personne suffit), on pourra délibérer. C’est pas fichant, ça ?
Alors, pour se donner bonne conscience, on a “inventé” une énorme fumisterie. Cela s’appelle sanction financière : un demi-mois d’indemnité par an qui vous est sucré si vous avez plus de 30% d’absences non justifiées ! A ce prix et pour ce prix, il y en a qui ne se privent pas, vous vous en doutez...
Pire : un décret de juillet 2004 a autorisé les Établissements Publics de Coopération Intercommunale (E.P.C.I.) à augmenter de 46% et de 65% les indemnités respectives de leurs vice-présidents et de leur président. À l’exception de l’opposition connue car annoncée de ceux du T.C.O. de La Réunion, croyez-vous qu’il s’en est trouvé d’autres élus d’E.P.C.I. de toute la République pour dire que trop, c’est trop ? Il serait bon que ceux qui ont dit non se manifestent un jour... avant que certains journalistes réunionnais ouvrent un débat qui sortira obligatoirement des limites de notre île. Ce qui ne serait pas forcément pour nous déplaire.

R. Lauret


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