Avouons-le : nous vivons dans des « lieux où l’homme ne sait plus ce qu’est l’homme... »

31 décembre 2007

Nous serons bien peu nombreux ce soir, mais quelques-uns tout de même, à faire autre chose que la Fête. Le champagne va remplir les flûtes, la dinde et le camaron les assiettes. Les rires seront éclatants et les vœux de santé et de prospérité échangés. Chacun à sa manière, nous fêterons l’arrivée de la nouvelle année.

Nous serons bien peu nombreux, mais quelques-uns tout de même, à penser au s.d.f pour qui quelques miettes de nos festins seraient un peu de beurre sur ses âpres épinards, ni aussi à la femme chaque jour humiliée par le père de ses enfants, ni encore au petit enfant de ces pays largués et dont la seule ambition est l’espoir de devenir « demain vivant ».

Avouons-le : nous ne serons pas beaucoup à rejoindre par la pensée Ingrid Bétancourt là où elle s’efforce de ne pas s’éteindre, otage de pauvres bougres même pas illuminés et qui osent se dire marxistes ; avouons-le : nous serons loin, très loin des populations du Darfour ou même de celles des bidonvilles de Mada, à deux pas de chez nous.

Et pourtant...

Au cœur de la contrée malgache où un jour tout était encore une immense décharge, le Père Pédro nous parle, à nous aussi : « Ne soyons pas surpris des embûches et, surtout, ne perdons pas courage. Déjà quatre-vingts pour cent de nos frères ont réussi à changer. Ils cherchent à travailler, aiment leurs enfants et sont prêts à se sacrifier pour eux... Nous nous trouvons sur cette planète au milieu des plus indigents. Alors, au boulot ! Ce n’est que comme cela qu’Akamasoa continuera à être un petit paradis... » (Père Pedro, “Combattant de l’espérance” - chez J.C Lattès).

Alors, me reviennent ces mots de l’Abbé Pierre, « une nuit, dit-il, où j’étais épuisé (et où) ce cri me vint :
«  Cités géantes où règnent les forts, où pleurent les inconnus...
Cités folles, suréquipées, au cœur de mondes manquant de tout, terres insensées qui n’êtes plus de terres...
Lieux où l’homme ne sait plus ce qu’est l’homme.
Qui vous rendra vos étoiles ?
Toutes vos lueurs ensorcelées les ont tuées.
Sachez parfois tout éteindre pour que revivent les étoiles
... »

Oui, avouons-le, dans le confort que nous croyons connaître au milieu des bruits de la fête, nos oreilles n’entendent plus toujours tout autant que nos yeux ne voient plus qu’à moitié les humanités en détresse qui nous entourent dans ce grand village qu’on appelle la Terre.

Heureusement, qu’ils s’appellent Pierre ou Pedro, il en est d’autres qui, à contre courant, s’emploient à nous ouvrir le cœur. A contre-courant...

Raymond Lauret


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