C’est une fois arrivé que vous constatez que c’est loin...

16 juin 2005

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Bruxelles...? C’est tout près bien sûr...! Il vous suffit de prendre un avion qui vous dépose - c’est l’idéal - à Roissy Charles de Gaulle près de Paris. Vous devez parcourir 200 mètres à peine sans sortir de l’aérogare, descendre au niveau inférieur et vous installer au siège qui vous a été réservé - depuis La Réunion par votre agence de voyages - dans le train à très grande vitesse, le Thalys. Moins d’une heure trente plus tard, vous êtes à Bruxelles, Gare du Midi. Voilà, vous y êtes. Ce n’est pas plus difficile.
Un métro vous mène ensuite - un changement de ligne et dix minutes plus tard - dans les bureaux de la Commission “quartier Schumann” où, salle Charlemagne, depuis lundi dernier, les R.U.P. (Régions ultrapériphériques de l’Union européenne) ont tenu un séminaire. C’est aussi simple, je vous dis, pour aller à Bruxelles, là où vit l’Europe, avec ses lois et tous ses Commissaires.
Le soir, sur le coup de 17 heures 30, vous ferez le chemin inverse et pourrez reprendre tranquillement votre avion à Roissy, pour retrouver votre île où vous arriverez le lendemain, 36 heures après l’avoir quittée.
Trente six heures peuvent vous suffire pour constater que l’Union européenne et son centre névralgique à Bruxelles sont tout près. C’est une fois arrivé que vous constatez que c’est bien loin.

Ce mercredi 15 juin, le ciel de Bruxelles nous rappelle qu’Auguste Rodin venait y chercher souvent inspiration et que “Le Penseur”, sa sculpture de référence, aurait bien pu prendre forme ici, là où la volonté de construire l’œuvre européenne se heurte aux multiples problèmes que se posent les humains.
L’Europe à 6, c’était encore une belle aventure capable de voguer vers l’Europe des 12 et, pourquoi pas, celle des 15 qui permettait aux Anglo-Saxons de toujours clamer que "small is beautiful" ("ce qui est petit est beau").
Et puis, on a pensé être à 25 avant de passer un jour à 30.

Aujourd’hui, pour Tony Blair, on n’est plus petit. Ce n’est plus beau. Et il se rebiffe. Son ministre des Affaires étrangères, Sir Jack Straw, vient de menacer de sortir le veto anglais si le Conseil européen des 16 et 17 juin - aujourd’hui et demain - n’entérine pas l’idée selon laquelle "il est temps, à l’évidence, de réexaminer les subventions agricoles."
Cela oblige la France à rappeler qu’il ne saurait en être question : "Il n’y aura pas de remise en cause de l’accord sur la Politique Agricole Commune !", a aussitôt tonné Catherine Colonna, notre ministre déléguée aux Affaires européennes. N’y aurait-il pas un George W. Bush derrière Blair et en face de Jacques Chirac ?
Et notre petite île là-dedans ? Et ces fameux A.P.E. (Accords de Partenariat Économique) dont l’Europe aimerait qu’ils régulent les effets de l’O.M.C. en fédérant en quelque sorte nos économies fragiles et nos échanges mal ordonnés de pays d’une zone de l’océan Indien qui comprendrait des États de l’Afrique de l’Est, Madagascar, l’île Maurice, les Comores et Mayotte. Et nous aussi, seule et unique Région ultrapériphérique du coin...
Il va falloir nous battre pour faire entendre les soucis de notre île et les inquiétudes de notre population. Il va falloir nous battre pour qu’une vraie place nous soit reconnue sur cet autel des discussions préparatoires où nous ne voulons pas être des sacrifiés passifs. Plusieurs hauts fonctionnaires de la Commission européenne l’ont souligné : c’est à la demande de Paul Vergès que s’est tenu ce séminaire sur les A.P.E. et, dans l’esprit du président de la Région, ce n’était pas, surtout pas, pour prendre acte de quoi que ce soit.

R. Lauret


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