Car il fallait bien à un moment trancher

29 décembre 2008

Je comprends parfaitement le sentiment d’incompréhension que peuvent exprimer les industriels réunionnais qui fabriquent les alcools. Et quand vendredi dernier, juste après les obsèques de Marie Françoise Dupuis à Saint Gilles-les-Bains, j’ai pu échanger quelques instants avec l’un d’eux (Xavier Thiéblin en l’occurrence), il m’est bien apparu qu’il existe une certaine forme d’inquiétude chez ceux-là. Pourtant, parce que mon interlocuteur -puissamment épaulé par son épouse Odile- a surtout avancé qu’il regrettait que la concertation n’ait pas été telle qu’il l’aurait souhaité, j’incline à penser qu’il était nécessaire que le problème des méfaits de la consommation d’alcool, soit enfin posé de manière nette, voire « brutale » pour reprendre le qualificatif de certains.
Car il y a eu concertation, une large et méticuleuse concertation. On peut toujours la trouver insuffisante, pas assez aboutie, quand d’autres considèrent qu’ils ont été au bout de l’exercice et qu’il y aura forcément toujours des personnes qui souhaitent qu’on la poursuive jusqu’à ce qu’elles fassent triompher leur position.
Il y a donc eu concertation. Et il fallait bien que les politiques, à un certain moment, tranchent.
La décision, répétons le, a été de ne pas pénaliser les alcools produits localement par rapport à ceux qui sont importés. Ainsi, la taxe sur les bières fabriquées hors de La Réunion passe à 34,5 %. Elle était déjà à 28 %. Elle a donc augmenté de 6,5 %. Six et demi pour cent , c’est précisément le montant de la taxe d’Octroi de Mer qui sera votée en Janvier prochain sur les bières produites localement...
Ainsi, la taxe sur les rhums et autres spiritueux importés (de France, des Antilles, d’Asie ou d’ailleurs)qui était de 28 % sur les deux catégories passe pour les premiers à 34,5 % (soit 6,5 % de plus) et pour les seconds à 51 % (soit 23 % de plus). Pour les rhums et les spiritueux produits localement, l’Octroi de Mer était de 0 %. Il passera à 23 %. Exactement ce qui a pénalisé les concurrents de l’importation. C’est donc dire que la même différence existe entre produits venus de l’extérieur et produits fabriqués localement.
À l’heure où, avec raison, des voix de personnes les plus représentatives et d’horizons les plus divers tirent le sonnette d’alarme sur la nécessité d’appeler l’ensemble de notre population à un sursaut qualitatif et vital qui passera immanquablement par une remise en cause de certains de nos modes de vie, à l’heure où l’on commence à se demander pourquoi le compteur des voitures nous offre la possibilité de « monter » jusqu’à 22O km/h alors que la loi et le bons sens limitent nos vitesses à 11O, voire 90 km/h, il faut souhaiter qu’en matière de consommation de produits alcooliques, nous osions le courage politique. Toutes catégories sociales et toutes opinions politiques confondues. Car cette île nous a été léguée en héritage pour que nous la laissions en meilleur état à ceux et celles qui naîtront après nous.

Raymond Lauret

Octroi de mer

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