De ces “petits riens” qui tracent les sillons ...

12 janvier 2007

N’appelez pas Huguette Bello à 5h30 le matin. Elle n’entend point. Tout au plus, laissez un message. Quand une heure et quart plus loin, elle vous appelle à son tour, c’est pour vous souffler, un léger sourire que l’on devine au bout de sa voix, qu’elle profite du calme qu’elle peut imposer pour, dès avant 5 heures, reprendre ses dossiers. « Je m’offre ce temps de tranquille silence en coupant les sonneries du fixe et du portable, me dit-elle. Je peux tranquillement revisiter mes fiches, les compléter par tout ce que j’ai cherché et trouvé. C’est mon pli d’institutrice qui ne me lâche pas. Je l’ai toujours dit à mes petits élèves : pour trouver, il faut chercher. Donc, je cherche moi aussi ». Chercher, toujours chercher : telle pourrait être son autre devise... pour trouver !

On peut causer un peu. De tout et de rien... De rien surtout. De ces “petits riens” qui tracent les sillons les plus importants, ceux qui donnent leur sens à nos vies.

Tenez, à propos de P..., ce camarade dont j’ai égaré le numéro de portable et à propos duquel je l’avais appelé. En trois phrases, Huguette campe sa situation, les problèmes qu’il a à régler, son attachement à ses responsabilités... Sans oublier de me confier le précieux numéro de téléphone...

On cause encore d’autres “petits riens”. De ces petits “riens” qui nous poussent, regrette notre camarade députée, « à rester dans la démarche ambiante plutôt qu’à en corriger le sens »... J’aime la phrase qu’elle a machinalement lâchée et m’empresse de la noter. J’imagine alors ces femmes qui, je le crois, pensent et disent, chacune à sa manière bien sûr, la même chose : s’efforcer de ne pas coller à l’habitude et chercher à modifier le sens de nos actes pour reculer l’horizon de nos rêves... C’est par exemple Aude Palant dont je sais qu’elles partagent toutes les deux la même fureur de combattre l’injustice. C’est aussi Thérèse Baillif dont je ne peux que me persuader qu’elle doit bien aimer Huguette. C’est encore Nassimah ou Gélita, comme elle en charge de postes où elles ont eu à faire leur place dans un monde dessiné pour être managé par les “bons-zhommes”...

Je pense alors encore à... Tiens, je vais le lui offrir, ce roman que Marek Halter, Polonais de naissance, vient de publier. C’est l’histoire de Miryem de Nazareth que le décurion des légions du roi Hérode décida manu militari qu’elle s’appellerait Marie, parce que, lui lança-t-il, « Miryem, ça n’existe pas dans la langue de Rome ». Pas plus que « Iessous » que le légionnaire transforma aussitôt, depuis le sein de sa mère, en « Jésus ».

Marie de Mareck Halter nous laisse imaginer qu’alors qu’on demandait aux filles de son temps qu’elles se contentent de demeurer épouses et soumises, Miryem de Nazareth su se révolter et oser affronter les barbares de l’époque. Jusqu’à admirer, s’y identifier et aimer, comme on n’avait jamais su aimer alors, le meneur Barabbas et le s.d.f. Abdias, brigands au cœur offert aux opprimés et dotés d’un courage qui leur venait d’une source en ces moments-là indéfinissable. Sauf pour elle...

“Marie” : une histoire... ou plutôt l’histoire d’une femme qui, sans y penser, traça de ces “petits riens” les sillons qui donnent un sens à nos vies et montrent combien les révoltes qui parfois nous dépassent doivent être menées...

Raymond Lauret


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