’Et vous, qu’auriez-vous fait ?’

3 avril 2006

J’ai fait un rêve. Celui qui m’interrogeait - que dis-je ? Celui qui me poussait au bout de ses propres interrogations - était un journaliste... Et je lui retournais sa question : "Vous, qu’auriez-vous fait, vous ?"
"Vous affirmez, lui disais-je, que c’est particulièrement pénible pour vous d’envoyer votre jeune fils se taper une heure trente de route de La Montagne. Et si demain il se faisait tuer sous un pan de falaise dont vous ne savez pas quand ni sur qui ça va tomber, que penseriez-vous de vous ?"
J’ai alors senti que chez cet homme, la conscience du père de famille pouvait peser sur celle du journaliste qu’il est, après que je venais de lui expliquer mon point de vue de citoyen. Un point de vue qui commence, semble-t-il, à être assez largement partagé parce que le respect de la mémoire de tous ceux qui sont morts, écrasés par des rochers qui tombent, nous l’impose...
M. Laurent Cayrel, représentant de l’État à La Réunion, a aujourd’hui une charge sur les épaules. C’est lui qui aura à transmettre aux Réunionnais ce qu’un ministre signera après avoir écouté les avis de moult conseillers bardés de connaissances, dont, répétons-le, celle-ci, indiscutable : la non-ignorance qu’à tout moment, en tout point, un pan entier de falaise peut se décrocher...
Terrible décision : soit "Vous pouvez passer, mais...", soit : "Vous ne passez pas, car..."
Je pense qu’il faut libérer de ce poids celui qui a à décider. Aujourd’hui, c’est le préfet représentant de l’État, demain ce sera le président de la Région.
Nous devons nous organiser et donc imposer à tous ceux avec qui nous travaillons une nouvelle façon de vivre notre temps... Pour ma part, j’opte d’emprunter désormais la RD 41.
Je ne reprendrai un jour la route du littoral que si l’État - et demain la Région - met en place des navettes de bus ou de taxis collectifs avec, en chacune des deux extrémités du parcours, un système bien pensé de taxis, de bus urbains ou de vélos de location qui me permettront, selon mon choix, de me rendre ensuite là où je veux. Je perdrai sans doute un peu de temps, car sur la route j’aurais “subi” les contraintes du convoi et, à mon point d’arrivée, celles d’avoir à attendre quelques minutes... Très vite, j’aurais à entrer dans un mode de vie nouveau, différent en tout cas de celui que je connais actuellement avec "la sensation d’indépendance" que me procure ma voiture (avec ce que cela me coûte...).
Avec le temps, je me rendrai compte que, de ces contraintes, on s’y habitue, on s’y adapte et finalement on les adopte...
Et pour celui qui ne peut ni s’y habituer, ni s’y adapter et qui n’adoptera donc pas ? Il peut prendre tranquillement la route de la Montagne.
Ainsi, nos responsables auront le temps de se décider pour la solution définitive, celle que leurs prédécesseurs auraient pu prendre, il y a un demi-siècle, ou une de celles que proposent des gens diplômés ou pas et qui ne manquent pas de bon sens. Entre la liaison maritime, le dirigeable, la route en altitude ou mixée avec le souterrain, le choix existe. Il s’agit de se décider. Cela va prendre du temps et cela aura un coût...
Je vous le disais : dans mon rêve, j’avais cru que celui qui m’avait questionné s’était mis à s’interroger à son tour... Mais, du rêve à la réalité, il y a un monde. Hier dimanche, je m’en suis rendu compte : mon interlocuteur n’était pas M. Marc Bernard, journaliste au “Quotidien”, surtout attentif à débusquer les communistes qui sont décidément partout.

R. Lauret


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