Hors la loi, Nicole Payet ? Nous aussi alors !

23 mai 2007

(... À St Denis, angle des rues Monthyon et d’Après. Sur le mur, des photos d’une candidate aux législatives.
Un lâche y est allé de ses écrits obscènes. C’est minable ! C’est inqualifiable ! N’en disons rien d’autre...)

J’ai souhaité lundi soir que nous ayons été nombreux à avoir, peu après 20 heures, regardé “ l’Héritage de la Tortue” que RFO Réunion nous proposait... Voilà bien le genre de documentaire de haute qualité et qui vaut d’être vu et revu, tant pour la beauté des images qu’il dévoile que pour l’importance de la réflexion à laquelle il nous invite. La réalisatrice, Madame Marjorie Assani-Vignau, une habituée de ces essais particulièrement réussis, a offert 26 minutes de caméra et de micro à Stéphane Ciccione, le Directeur de la Ferme Kélonia , à Emmanuel Lemagnen mon pote de la Commission du Développement économique au Conseil Régional et également papa de nos deux petits poissons du bocal d’à côté et enfin à Nicole Payet, un jeune artisan saint-leusien, maître dans l’art de donner une incontestable dimension sociale à l’écaille de tortue une fois que ses mains expertes en ont fait le fondement tout en beauté d’une facette remarquable de notre artisanat d’art.
Un artisanat d’art qui offre à qui le veut ses écrins, ses miroirs, ses bijoux et mille autres objets auxquels la peau de notre reptile emblématique (notre île n’en est-elle pas l’ombre projetée ?) confie un souffle de virile et d’authentique poésie. Les touristes ne s’y trompent pas : ils savent en achetant qu’ils vont emporter un peu du génie “ fait main ” d’un peuple qui n’a pas de pétrole ni de champ aurifère et qui aura su tirer parti de l’océan qui l’entoure.

Nicole Payet en avait pourtant gros sur le cœur, lundi soir. L’œuvre à laquelle il apportait devant la caméra et pour notre plaisir l’ultime tour de vis ou le dernier coup de feutrine avait beau recueillir la totalité de nos suffrages. Pour l’artiste, la Convention de Washington qui rend hors la Loi et internationalement condamnable tout individu qui élèverait des tortues pour les manger (et à plus forte raison pour en “travailler” la cuirasse) est une aberration d’impérialistes puisqu’elle assimile ceux qui, comme dans notre île, la protègent bien plus et bien mieux que la nature et ses règlements le font, aux braconniers d’ailleurs et de partout qui en usent et en abusent, au mépris de toute morale écologique.
Un jour, Emmanuel Lemagnen m’a rapporté l’appréciation du Docteur Jean-Jack Peters, alors président britannique du Congrès mondial de primatologie et selon qui « tant que la protection de la nature ne sera pas liée à l’économie humaine », le sentiment dominera que les règles imposées par ceux de la Convention de Washington sont excessives et inappropriées car globales et brutales et qu’elles ont été dictées par le souci de certains chercheurs de ne jamais être privés de leurs bureaux climatisés qui jouxtent de bien confortables laboratoires d’idées.
Nicole Payet avait lundi soir, pour les téléspectateurs de son île, la voix de ceux qui n’entendent courber la tête que quand ils se penchent sur l’œuvre accomplie et qu’ils la veulent encore plus belle.
Hors la loi, lui ? Internationalement condamnable, lui ? Si tel était un jour son destin, n’aurions-nous pas envie de nous déclarer nous aussi et à ses côtés coupables de recel ?

Raymond Lauret


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