Il lui avait suffi de donner une pièce d’identité

30 janvier 2007

Samedi soir, quelque part dans un coin de notre île, un peu avant minuit... Deux bandes rivales se retrouvent nez à nez... L’une des deux est, dit-on, bien décidée à “rétablir” un ordre que l’autre, à ce qu’on dit, met à mal dans tout un quartier. Un épisode somme toute banal de ce que nos sociétés en tous les temps ont bien connu. En dehors d’un Loi qui doit gérer les contraintes que lui imposent le respect de la réglementation, de la procédure, de la présomption d’innocence, des droits de la défense et de la psychologie des uns et des autres, des citoyens se mettent à rendre leur justice face à d’autres qui usent et qui abusent de la force et de l’arrogance qui les habitent. A ce qu’ils disent...
Cela donne ceci, tel que le rapporte, à François Pottier du “Quotidien”, un témoin anonyme des évènements de samedi soir : « Sur fond d’alcool, le combat s’engage devant un commerce... Les membres de la même famille, âgés de 19 à 35 ans, sont tout d’abord pris à partie par une vingtaine de jeunes. Les coups de poing et coups de pied succèdent à la provocation... Des bouteilles de bière et des galets volent de part et d’autres... ça criait, ça se tapait dessus n’importe comment, ça courait dans tous les sens, les gars se poursuivaient dans les rues... » C’est tout ?
Non, ce n’est pas tout ! Car, poursuit notre témoin, « soudain plusieurs coups de feu claquent... Des membres de la famille étaient partis et sont revenus peu de temps après, armés de carabines... »
Le “Quotidien” nous rappelle alors que « lors d’une violente rixe entre Noël et le Premier de l’an, l’un d’eux (membre de la famille) avait sorti une arme et blessé un jeune qui avait reçu un plomb au visage ».
Seulement ça ? Heu... non, puisque, « dans le cadre de cette affaire, les militaires avaient saisi plusieurs armes il y a environ trois semaines ». Ah, bon ! Plusieurs armes déjà !
Dans une autre histoire classée « faits divers » qui eut pour théâtre un autre coin de notre île, où la poudre avait “parlé” et qui avait trouvé son épilogue devant le Tribunal Correctionnel de Saint-Denis, Jean Noël Fortier, dans le “Quotidien”, relatait, il y a quelques jours, que l’auteur présumé du coup de feu avait nié toute participation aux faits. « Mais, précisait le journaliste, les policiers ont pu établir que le jeune délinquant avait acheté une arme quelques jours auparavant dans une armurerie de Saint-... » Ah ! bon... Serait-ce donc possible à n’importe qui, voire à quelqu’un, d’acheter, comme ça, une arme à feu, dans une armurerie de la place ? Avec une bonne pointe de fatalité pimentée d’ironie, Jean-Noël Fortier expliquait alors : «  Il lui avait suffit de donner une pièce d’identité...  »
Bon... Dans le cadre de la loi et du strict respect de toutes les procédures, les mis en causes du fait-divers de samedi 27 janvier ont été ou seront convoqués à la Brigade de Gendarmerie. De longues enquêtes vont être menées. Le Tribunal Correctionnel, dans quelques mois, aura à juger les faits et les mis en examens. Il prononcera des peines de prisons assorties ou non de sursis et infligera des amendes. Certains en feront (peut-être) appel. Telle est la Loi, telle est notre Loi. La même Loi qui dit qu’il suffit à n’importe qui, voire à quelqu’un, de donner sa pièce d’identité pour que l’armurier de la place lui vende en toute légalité une arme à feu. Cherchez où est le problème.

Raymond Lauret


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