J’écoutais l’orateur, à deux doigts de l’approbation...

22 juin 2005

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J’écoutais l’orateur qui avait tenu à donner lui-même lecture de la motion. Je l’écoutais, toujours surpris par ses audaces devenues depuis quelque temps, habituelles. Toujours surpris, mais ce jour-là assez stupéfait et à deux doigts de l’approbation.
Que disait-il ? Que déclarait-il ? Il disait que cet ancien Premier ministre du Général de Gaulle avait été un des plus grands fossoyeurs de notre île, de sa jeunesse, de notre avenir, et cela dès le début des années 1960.
Écoutons-le : "Un choix de développement a été fait pour La Réunion, dans les années soixante...". "Ce choix, qui est instrumentalisé à l’époque par la plantocratrie du sucre, va être mis en œuvre à la fois par les élites locales et nationales...". "... Il ne s’agira en réalité que d’un glissement, d’une vague modernisation du système colonial traditionnel...".
Ces premières déclarations, solennelles, nous ramènent donc directement à 1960 et aux années qui suivront. Qui donc était alors le personnage central de l’État ? Qui donc était alors l’incontesté “patron” parisien de La Réunion et dont l’influence était crainte par sa cour locale ?
Poursuivons : "S’agissant de la communication des informations, celle-ci est mise sous contrôle, par la maîtrise directe ou indirecte de tous les médias...". "Tout le monde a en mémoire les réticences du pouvoir devant l’incontournable irruption des chaînes de télévision, la difficile installation de la presse écrite...".
Le coup de grâce ? "L’immense marée des chômeurs et des érémistes sont les laissés pour compte de ce choix de développement... Voilà le système dans lequel le développement de La Réunion s’est englué".
J’écoutais donc, stupéfait, ce réquisitoire accablant qui clouait M. Michel Debré sans nul doute à la place du grand (du seul ?!) responsable de ce développement raté dans lequel nous nous sommes englués ! Michel Debré et celui ou ceux qu’il convient de “sentir” visés derrière cette ultime remarque selon laquelle - citons l’orateur - "le capitalisme obéit à ses propres lois, et la morale et le bien public n’en font pas partie...".
Le reste, c’est-à-dire les votes d’Alain Bénard, n’avaient plus à mes yeux qu’un intérêt moindre. L’essentiel avait été pensé et dit dans la solennité d’un hémicycle qui recevait ce lundi 20 juin 2005 une assemblé plénière du Conseil régional de La Réunion. J’aurais pu m’en méfier. J’ai choisi de retenir... pour demain encore m’en souvenir.

R. Lauret


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