Jacques, Albert, Pierre, Elie, Maya…

19 décembre 2011

De nombreux sujets mériteraient d’être évoqués. Nous aurions pu en effet parler de la bouffée d’air pur que, dans le monde particulièrement sensible de l’accueil de nos vieux et de nos vieilles, le nouvel EHPA (Etablissement Hébergement Personnes Agées) “La Miséricorde” à Sainte-Marie nous apporte avec son inauguration qui a eu lieu ce week-end. Ou bien de ce que pourrait nous inspirer la réflexion que Paul Vergès m’a faite vendredi matin sur l’état de notre planète telle que cela a été souligné à Durban il y a une dizaine de jours maintenant. Ou bien encore de la Présidentielle et des flots de candidats qu’elle inspire. Ou encore de…

J’ai choisi de m’attacher à quatre hommes qui, à un titre ou à un autre, méritent qu’on leur accorde quelques attentions. La grotesque fin d’un procès qui vient de tomber sur l’un d’eux, l’hommage qu’un second a rendu en toute simplicité à ce qui s’est construit au fil des années au nom de l’engagement de citoyens dans une relation de totale indépendance avec leur municipalité, ou encore la décision, ô combien espérée et réconfortante, annoncée par un dernier, ces trois points ne sont pas neutres à mes yeux. Et puis, un quatrième encore qui se projette dans l’avenir…

Jacques Chirac ou l’inutile condamnation…

Ainsi donc, Jacques Chirac, dans le procès pour emplois fictifs du temps où il était Maire de Paris, en a pris pour « deux ans avec sursis ». Oui, ne sourions pas, deux ans… de prison, évidemment… mais — et pourquoi donc ? — avec sursis. Oui, ne sourions surtout pas. Et comprenons que cette grande nation qu’est la France, puissance mondiale qui discutait et discute encore avec les autres “Grands” du monde de l’avenir de la planète et de ses peuples, remarquable pays qui, hier, a renversé des “bastilles”, inspiré « les Droits de l’Homme » et qui a trouvé dans son armée et dans son peuple les ressources pour faire se lever face à l’Allemagne nazie un Général De Gaulle et la Résistance, ainsi donc, nous devrions comprendre que notre belle République avait à sa tête un homme qui, en réalité, avait des comptes à rendre à la société ! Lui-même et tout notre appareil juridique le savaient. Comprenons qu’ils nous l’ont caché. Et cela a duré une grosse quinzaine d’années. Triste et accablante réalité ? C’est une déclaration de notre Justice qui vient d’imprimer dans le marbre de l’Histoire de notre République cette terrible vérité. Pourquoi ça ? Pourquoi si tard ?

Pourquoi faire ressortir des faits qui, s’ils peuvent avoir existé, remontent à 20 ans ? Ça apporte quoi à la France, à son peuple, au quotidien de ceux que la crise écrase ? Et puis, le délit qui est reproché à Jacques Chirac aurait pu lui valoir — c’est le tarif — une peine de 10 ans de prison ferme et 150.000 euros d’amende. Nous sommes donc avec une condamnation toute symbolique. Une condamnation qui ne peut que salir sans vraiment pénaliser. Est-elle inutile ? A quel jeu joue-t-on ?

Jacques Chirac a annoncé que, à 79 ans, il ne fera pas appel. Tout le monde aura compris le message : la France a besoin de lois qui poursuivent, et éventuellement condamnent quiconque a commis des délits. Elle n’a plus besoin de cette loi qui doit attendre qu’une quelconque immunité soit un jour levée.

Albert Mourvaye ou le nécessaire rappel de notre Histoire…

C’était le vendredi 9 décembre dernier. L’O.M.S. du Port remettait son traditionnel « Mérite Sportif » à un de ceux qui ont œuvré pour faire avancer la politique sportive de la cité maritime. Cette année, le choix était une fois encore des plus judicieux : Erick Chavriacouty, ancien judoka de haut niveau et actuellement animateur dans le club de la ville, est digne de figurer auprès de ceux et de celles dont les noms, depuis Jean-Paul Parmentier en 1973, donnent une dimension historique et sentimentale forte au grand mur de l’escalier qui monte au premier étage du siège de l’Office du Sport portois.

Le Président Pascal Léar eut ce vendredi-là la bonne idée, au terme de son discours, de demander spontanément à Albert Mourvaye de venir dire quelques mots à l’assemblée.

Personne n’a oublié qu’Albert fut, en août 1971, l’un des fondateurs et le premier Président de l’OMS du Port. Et sans avoir préparé de discours, le regard débordant de reconnaissance pour cette invitation à laquelle il ne s’attendait pas, la voix étonnamment claire et forte, notre ami rappela avec force détails l’essentiel de ce qui avait été entrepris à une époque où, dans le domaine de la réflexion sur les politiques sportives, tout restait à faire.

J’ai pour ma part aimé qu’Albert nous ait rappelé que le Sport mérite largement d’être traité et élevé au rang d’une intense politique de la ville. En lançant dès 1972 les « inter-quartiers », c’était le sens de la responsabilité qui était inculqué à tous ceux à qui on n’en demandait aucune dans leurs bidonvilles et autres quartiers pauvres et abandonnés. En 1976, année des Jeux olympiques à Montréal, en choisissant de proposer à un inspecteur de l’Éducation nationale que l’initiation de la Gymnastique commence, non pas depuis un club, mais dès le cours préparatoire dans toutes les écoles de la ville, c’était la vraie démocratisation de ce sport qui était visée et lancée, avec le rêve que, enfin, la jeune fille réunionnaise sorte du cocon dans lequel la gent masculine l’enfermait volontiers. A l’image d’une Nadia Comaneci, la petite Roumaine qui ressemblait alors tellement aux fillettes de chez nous, nos filles avaient à conquérir de larges espaces de maturité.

J’ai apprécié qu’Albert illustre également et parfaitement la volonté de faire prendre à chacun conscience que le « Fair-play » est la nature même du sportif. Et que, pour gagner ce combat, il convenait que l’O.M.S. soit volontariste pour dix, pour cent, pour mille.

Ce vendredi 9, pendant un peu plus de quinze minutes d’une intervention remarquée, car remarquable, Albert nous fit oublier son grand âge. Seule se dégageait de son propos l’expérience de ceux qui, un jour, ont su répondre à l’appel de leur collectivité pour apporter aux autres l’enthousiasme dont ils étaient capables. Seule débordait de son regard la sagesse de ceux qui ont alors su faire. Merci, ami, pour ce moment d’émotion. Tes vieux potes qui étaient là ont apprécié. Puissent les autres avoir retenu l’exemple que tu seras toujours.

Pierre, Elie et Maya, ou les décisions tant espérées qui posent pour tous et pour certains la vraie question…

Je le crois : point n’est besoin ici d’insister. En coupant court à certaines hypothèses qui n’avaient de but que de véhiculer l’affirmation méprisante, Pierre Vergès a posé pour tous et pour certains la vraie question, celle qui pourrait remettre notre Parti sur la voie de l’idéal qui a inspiré ceux qui l’ont créé il y a plus de cinquante ans. On entre au Parti pour y mener un combat. Pas pour espérer décrocher un poste et, évidemment, les avantages qui vont avec. Je ne doute pas que, pour l’opinion publique, c’est ce qui est à retenir de l’annonce faite : un militant se présentera à Saint-Denis, non pas pour gagner un poste de député, mais simplement pour faire avancer les idées d’un Parti qui a tant apporté à notre île et peut-être aussi en dehors de nos frontières.

Point n’est besoin également d’insister : en permettant à à Younous Omarjee, un jeune de grande valeur, de poursuivre à Bruxelles le travail commencé il y a de nombreuses années par Paul Vergès et lui-même, travail qui a permis à notre petit bout de terre de l’océan Indien d’être au cœur des grosses préoccupations des petits territoires de la planète et d’interpeler les grands de l’Europe, Elie Hoarau donne à chacun et à certains d’entre nous un signe fort de ce que doivent cultiver ceux pour qui l’idéal de notre Parti est à ne pas perdre. Il a donc démissionné pour simplement mener d’autres combats. Et Maya Césari, qui, selon l’ordre retenu sur la liste des candidats de l’Alliance pour l’Outre-mer aux dernières élections européennes, pouvait prétendre à la fonction puisqu’elle le suivait directement, y a renoncé. Elle a tout simplement mis en avant le fait qu’elle est déjà Conseillère régionale.
Simplement, tout simplement.

Raymond Lauret

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