Jean Joly...

29 mars 2005

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À l’occasion d’un voyage d’études organisé en 1975 par la Fédération nationale des Offices municipaux du Sport, j’eus le privilège de visiter l’ancien camp de concentration nazi de Buchenwald, en République démocratique allemande. L’image de ce qu’ont subi les prisonniers des S.S. durant les longues années de la tyrannie fasciste m’est longtemps restée en tête.
Notre compatriote Jean Joly a connu l’enfer du camp d’extermination de Mauthausen, en Autriche, près du Centre sidérurgique et de raffinerie de pétrole de Linz, sur le Danube.
La presse de ce week-end lui a rendu un émouvant hommage, lui qui s’est éteint ce samedi 26 mars à l’âge de 85 ans à La Montagne où il résidait.
J’ai peu connu Jean Joly... pas connu même. Et pourtant, les quelques fois où j’ai été amené à lui serrer la main - essentiellement lors de manifestations patriotiques où je représentais “l’institution” - m’ont laissé le sentiment d’un homme dont le regard débordait de l’indulgence et de la sérénité dont sont capables ceux qui ont connu l’enfer et qui en sont revenus parce que la flamme de l’espérance n’a jamais vacillé aux fond de leur conscience alors qu’on mutilait leur corps.
Il était entré dans les faits de résistance à Marseille, à un âge où bien des jeunes de son époque ont d’autres envies de vies : "Seule une infime partie de la population était prête à nous aider", avait-il confié à Alain Dupuis, il y a quelques années, pour le “JIR”.
Et puis, après des opérations réussies, il y eut celle qui finit mal parce qu’un traître fouinait et peaufinait sa triste et sale besogne. Tortures, cachot, gare de l’Est à Paris, direction l’Autriche et Mauthausen, le camp où sont exterminées "ces bêtes récalcitrantes" qui se disent patriotes et résistants.
Il leur en a fallu des fibres de la résistance et du patriotisme, à Jean Joly et à ses camarades soumis à la loi de Mauthasen, sans doute autant sinon plus atroce que celle qui transpirait de Buchenwald, visitée trente ans après !
Sans doute a-t-il toujours eu au fond de son cœur ces mots jamais entendus mais sans aucun doute captés à travers l’idéal ressenti et vécu, ces mots un jour lancés sur les ondes de la France Libre par François Thierry-Miez, un compagnon de fortune, évadé de camp :
"Pour vous qui restez gardés dans les stalags ou les oflags, vous pouvez aussi aider vos alliés et hâter la fin de ce cauchemar. Vous êtes derrière des barbelés, des mitrailleuses sont prêtes à tirer sur vous qui êtes sans armes. Du haut des miradors, des sentinelles veillent... La nuit, les rondes sont faites régulièrement avec des chiens pour dépister les fuyards. Mais tout cela, qui dure depuis trois ans, approche maintenant de sa fin. Après Stalingrad, après Bizerte, après Tunis, le moral allemand est attaqué. À vous de le miner par vos conversations..."
Jean Joly était le dernier Réunionnais connu qui avait été prisonnier en Allemagne lors de la Seconde Guerre Mondiale.
En lui rendant hommage (voir ci-après), Paul Vergès salue immanquablement un de ces Réunionnais qui avaient répondu à l’appel du Général de Gaulle pour la défense de la liberté, quel que fut le prix qu’ils auraient à payer.
Il était normal et il était juste que cela soit fait.

Raymond Lauret


L’hommage de Paul Vergès

à Jean Joly

Voici le message publié samedi dernier par le Président du Conseil Régional, Paul Vergès, suite à la disparition de Jean Joly :
"C’est avec émotion que j’ai appris la disparition de Jean Joly.
Je tiens à rendre hommage à ce compatriote qui, ayant combattu pour la Liberté et ayant été victime de la barbarie de la Déportation, restera dans la mémoire des Réunionnais, comme l’une des grandes figures de la Résistance.
À sa famille et à ses proches, j’exprime en mon nom personnel et en celui du Conseil régional, mes très sincères condoléances."


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