La parabole du petit frère...

23 juillet 2007

Nous connaissons tous « la parabole du bon Samaritain ». Au moins, en avons-nous entendu un jour une allusion. À la fin des années 60, pour sa première venue dans notre île, Jean Cardonnel en avait fait le point central de son discours. Je m’en rappelle fort bien. C’était au Foyer Saint Jacques, à Saint-Denis. Sa force de conviction et la beauté du sujet avaient eu raison des nervis venus ce soir-là, sourire moqueur sur leurs lèvres, tenter de perturber un moment qui ouvrit à nombre d’entre nous le chemin d’un engagement social fort.
La parabole du bon Samaritain ? Luc la raconte, dans son évangile. Un homme descend de Jérusalem à Jéricho. Des brigands l’attaquent, lui arrachent ses vêtements, le battent et s’en vont en le laissant à demi mort sur le bas de la route. Arrive un prêtre qui, à la vue de l’homme inanimé et ensanglanté, change de côté et poursuit son chemin. Arrive ensuite un Lévite, homme important dans la société de Jérusalem. A la vue du corps qui gémit dans la poussière, il détourne son regard, presse le pas et s’éloigne. Un Samaritain - les Samaritains étaient membres d’un groupe ethnique restreint de la Samarie (région de Palestine, entre le Galilée et la Judée) et étaient l’objet du plus grand mépris de la part des Juifs parce qu’ils ne reconnaissaient comme livre sacré que la Torah ou Pentateuque et les lois de Moïse, pratiquaient la circoncision et observaient le Sabbat - un Samaritain donc passait par là. Quand il vit l’homme blessé, il en eut profondément pitié, s’arrêta et versa de l’huile et du vin sur ses blessures qu’il recouvrit ensuite de pansements. Puis il le hissa sur sa bête et le mena dans un hôtel. Il prit soin de lui, régla les frais de plusieurs jours dans l’établissement et dit au propriétaire des lieux : « Prends soin de lui. Dans quelques jours, je repasserai et te règlerai ce que tu auras dépensé de plus... ».
La parabole du bon Samaritain appartient à la Bible. Mais elle ne s’adresse pas qu’à ceux qui croient en Dieu. Elle peut servir de ligne de conduite à chacun d’entre nous. Un peu comme cette histoire qu’on dit d’origine africaine. Ecoutez-la :
Nous sommes dans un sentier. Un sentier bien pentu et caillouteux. Y descend un brave homme, d’âge raisonnable, bien habillé et bien chaussé, qui va en ville.
Il croise... elle monte donc... une gamine qui doit avoir entre 10 et 12 ans. La petite fille porte dans ses bras un petit garçon. Pas après pas, elle avance. Dur, dur... Le soleil chauffant, elle sue de toutes ses pores. Normal.
« C’est bien lourd le fardeau que tu portes là », lui dit d’une voix pleine de douceur le brave monsieur d’un âge raisonnable, comme pour lui exprimer - c’est toujours mieux que rien ! - sa compassion.
Alors, la petite fille : « Ce n’est pas un fardeau que je porte là. C’est mon petit frère... ». Ce fut dit avec naturel. Ce fut entendu avec intelligence, soyons-en certain.
La parabole du petit frère appartient à la sagesse africaine. Mais elle ne s’adresse pas, ni n’appartient qu’aux Africains. Elle peut servir de repère à chacun d’entre nous. Un peu comme la parabole du bon Samaritain.

Raymond Lauret


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