« Les uns et les autres, vous l’aimiez profondément... »

14 février 2007

Monsieur Charles Catteau, le premier président de la cour d’appel de Grenoble, vient de nous montrer de fort belle manière que la grandeur d’âme a besoin pour s’exprimer et s’imposer qu’elle emprunte les chemins les plus simples de nos réflexions.
Notre compatriote Eric Zémia s’est donné la mort il y a une dizaine de jours parce qu’il n’a pas pu supporter et surmonter qu’on le soupçonne - en l’humiliant de grossière façon avec garde à vue prolongée, témoignages mensongers, arrestation en pleine nuit à son domicile - d’avoir tué le petit Julien dont il était le « p’ti père ».
Ayant, après ses pairs d’une première instance, à juger à qui - de l’épouse qui vit à Bourg-lès-Valence dans la Drôme avec le souvenir de son petit Julien ou des frères et sœurs qui résident dans l’Ouest de notre île là où Eric est né, a grandi et a sans doute émis le souhait qu’il y repose un jour - oui, ayant à juger à qui doivent revenir les restes d’Eric Zémia maintenant qu’il s’est donné la mort, Charles Catteau a statué en ces termes : « Les uns et les autres, vous l’aimiez profondément. Vous pourrez tous honorer sa mémoire ». Les cendres de Zémia seront donc réparties en deux urnes, l’une confiée à sa veuve et à la terre iséroise où elle entend continuer à vivre, l’autre à la famille et à la terre réunionnaises où sont ses racines.
C’est simple... C’est surprenant de simplicité et de grandeur... C’est rempli de générosité, de compassion, de leçon à retenir. Quand le droit rejoint la justice, quand l’humain donne une haute dimension à un jugement qui n’est plus alors proclamé pour être imposé mais pour être partagé et pour réconforter, alors la voix de celui qui habituellement réjouit une partie de l’assistance en même temps qu’il plonge l’autre dans l’incompréhension, cette voix devient source de réconciliation pour tous.
Les jugements des tribunaux apparaissent trop souvent comme des sanctions pour qu’on ne souligne pas combien celui que le premier président de la cour d’appel de Grenoble vient de rendre est une belle lumière qui soudain a brillé dans le ciel d’une cour de justice.
Et puis, et puis, là-bas, quelque part entre l’Australie et notre petit caillou, la bôme de son voilier brisée et donc encombrante, dangereuse, inutile, Maud Fontenoy n’entend pas que s’arrêtent aujourd’hui les rêves que des jeunes lui ont confiés. Des jeunes qui ne se posent pas nos questions de grands et qui ne veulent pas imaginer que bientôt, au bout de l’horizon, elle ne nous apparaisse derrière son sourire magique, la main levée, l’oreille tendue vers les bravos qui s’élèveront depuis notre terre comme une belle lumière dans le ciel de demain...

Raymond Lauret


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