Lettre à ma sœur : au premier tour, on affirme en choisissant...

23 mars 2007

Au moment où je t’écris cette (seconde) lettre... tu n’en as jamais autant reçues en cette pré-période électorale ! ..., on ne m’a pas encore fait part de tes réactions à celle de jeudi. Telle que je te connais, tu t’es sûrement laissée aller à quelques réflexions. Sûrement aussi que tu as noté que, curieusement, je n’ai pas cité Dominique Voynet, candidate elle aussi à cette élection présidentielle d’avril.

Tu dis bien avril... 22 avril... pas avril et mai. Car tu le sais toi aussi, que le porte-drapeau de l’idéal écolo ne passera pas le premier tour. L’essai de Nicolas Hulot, qui a dû se limiter à bousculer les grands en leur opposant son pacte écologique, n’a suscité que quelques éphémères frémissements très vite retombés sous les vagues des propos qui causent économie,
social-démocratie, sécurité, capitalisme dur ou semi-libéral, Europe à ne pas trop élargir, Défense à ne pas trop armer, impôts que l’on diminuera, promis, juré. Bref, mille promesses qui, tu le sais bien, engagent ceux qui les écoutent et qui se mettent à y croire. Mais surtout pas ceux qui les font faire par leurs spécialistes respectifs.

Dominique Voynet ne passera pas le cap du premier tour. C’est sûr. Pas besoin de lire les sondages pour s’en convaincre. A l’heure de la consommation hissée sur le podium au rang de préoccupation première, quelle place peuvent trouver chez les gros bataillons de votants que médias et instituts de sondages instruisent, les problèmes que subiront demain les générations à venir ?

Tu me vois venir, petite sœur...

Eh oui !... Et si toi et moi, plus quelques autres encore, comme Véronique Dénès, Esperet, Ratane Dufour et leurs potes, on le lui coulait son bulletin à Dominique Voynet ! Pas pour sa petite personne, bien sûr. Ni toi, ni moi nous ne l’avons déjà vue ni serré la main à la Dominique, ce qui - je te le confie en passant - ne m’a pas empêché de lui donner mon parrainage quand elle était en quête des fameuses 500 signatures. Et puis, t’as vu avec quelle force elle leur a dit ses quatre vérités aux chasseurs qui voulaient amadouer certains “grands” candidats ? Et, en pensant à une certaine jeunesse rebelle, j’avais aimé qu’elle les envoie paître...

En fait donc, et je te sens qui construit ton raisonnement, il ne s’agit pas - ni pour toi, ni pour moi - de voter pour un parti ou une personne. Si tel avait été l’enjeu, pour nous, avec les modèles qu’on a eus à la maison et dans la rue, ça serait plutôt Marie-George Buffet ou Besancenot.

Il s’agit, dans cette cacophonie où Sarkozy en appelle à Blum et à Jaurès, où Bayrou s’en prend à Sarko, fait les yeux doux à D.S.K. et passe de 5% à 20%, où Ségolène se fait tancer par ces mêmes éléphants qui ont provoqué “avril 2002” et la chute de Jospin, dans cette cacophonie joliment orchestrée et où tout le monde il est plus beau et plus gentil que l’autre, oui, petite sœur, il s’agit pour des gens comme toi, comme moi et comme quelques autres, de se dire qu’il est peut-être venu le temps pour nous d’affirmer que l’équilibre de notre planète est en danger, que le Darfour est notre honte, que les dépenses des fortunés sont une insulte à la misère du monde, que les pays riches ont le devoir d’aider les pays pauvres pour qu’ils (les pays pauvres, évidemment) s’en sortent. Bref, il est temps d’affirmer que ce n’est pas le Bon Dieu qui est responsable de la connerie et de l’irresponsabilité humaines. Pour le second tour, il sera bien temps de voir qui il faut garder et qui il faut éliminer. Au premier, on affirme en choisissant. Ce faisant, nous ne succombons pas aux fallacieuses et faciles promesses. On se rappelle seulement qu’il y a encore, Dieu merci, des valeurs à défendre.

Raymond Lauret


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