Pour que le bordel et les filles de joie ne soient pas « le produit d’appel » qui oblige...

22 août 2007

C’était il y a un peu plus de deux ans maintenant. Un matin, j’étais venu m’entretenir avec le Père Théo Rey et le Pasteur Alain Djeutang du projet qu’ils avaient de construire un Foyer pour les marins de passage à La Réunion.

J’étais venu dans la petite case où les deux hommes d’église vivent le principal de leur mission. Cette petite case, je n’y étais jamais entré. Pourtant, je la connaissais bien. Elle est à deux pas du siège de Témoignages, un endroit que je fréquente évidemment depuis longtemps, rue du Général Rolland, au Port.

Je découvrais ce jour-là que c’est ici que l’Association des “Amis de la Mer” reçoit les marins qui, pour 24, 48 ou 72 heures, font escale dans notre île. Je découvrais ce jour-là que nous devrions rougir de honte
d’offrir à des travailleurs étrangers dont le boulot est loin d’être de tout repos de tels locaux : un taudis de bidonville que la meilleure volonté de ses responsables ne peut transformer en un lieu accueillant. Il y avait bien dans une pièce quelques livres. Mais quelle pièce et quels livres ! Il y avait bien une autre salle et un billard. Mais quelle salle et quel billard ! Il s’y trouvait bien un frigo. Mais quel frigo !

Et puis il y avait la pièce - toute petite - qu’occupait le Père Rey. Juste de quoi y mettre une table de travail, un petit lit d’une place et une chaise. Et, aux murs, de vieilles étagères où livres et dossiers étaient soigneusement rangés. Pour “bouger” au milieu de tout ça, ne restait au curé qu’une bande d’un mètre sur trois ou quatre. Et pour que je comprenne sans doute pleinement la démarche entamée, le Pasteur Djeutang m’apprit que lorsqu’un marin avait besoin de coucher au foyer, le Père Rey lui donnait son lit et dormait par terre sur une paillasse.

Théo Rey est d’origine Suisse, Alain Djeutang nous vient d’Afrique. L’un et l’autre ont mission de se soucier du sort des marins du monde entier, le temps que leur bateau fasse escale dans un port. Le prêtre catholique a fait vœu de pauvreté. Son collègue protestant et lui veulent apporter à ces travailleurs de la Mer un peu de réconfort et de chaleur humaine, pour que « le bordel » et les filles de joie ne soient pas «  le produit d’appel  » qui oblige des pères de familles quand, loin des leurs, ils posent le pied sur une terre... Pour que la Terre, notre terre, soit un lieu d’accueil et non pas d’abandon à son sort...

Ce jour-là, j’ai pensé qu’il était bon que notre île mérite son nom et que les responsables que nous sommes soient à la hauteur de l’exemple d’un engagement humaniste tel que celui que nous montrent les deux missionnaires.

Car, après tout, missionnaires, ne le sommes-nous pas également ?

Raymond Lauret


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