Propos des autres...

16 novembre 2006

« Ce sont nos pas qui font la route ». Monseigneur Gilbert Aubry, Évêque de La Réunion, rappelait vendredi dernier que Nassimah Dindar, qu’il allait faire Chevalier de l’Ordre National du Mérite, en avait fait sa devise. Dans son discours, soulignant que la Présidente du Conseil Général, femme musulmane, avait été élève de l’école laïque (ce qui est en soi bien banal dans notre île), Gilbert Aubry citait fort à propos Idriss Issop Banian et un de ses poèmes : « Dans ma tête chante l’appel du muezzin vers le sanctuaire divin / A l’écoute du sitar nostalgique mon âme vibre et vogue vers les rivages rêvés de l’Inde ancestrale / Mon être trésaille au son du bobre rythmant l’envoûtant maloya / Ma chair est pétrie de cette terre du magma façonnée d’histoire patriotique / Au cœur du Larousse illustré mon sang est parfumé de vanille créole / Et mon moi mosaïque / Est couleur de créolie / Du pays d’alizé... ». J’ai aimé...

Hier mercredi, aux premières heures du matin, je lisais un courrier qu’Albert Ramassamy consacre à la « vaine quête d’un introuvable emploi » qui est le lot de nombreux jeunes Réunionnais qui n’ont souvent pas d’autre choix qu’« à suivre des formations successives et qui ne débouchent sur rien de positif », sinon pour « faire un exclu »...

Et l’ancien sénateur de pousser son cri d’espérance : « Puissent les élus en avoir conscience, et se rassembler pour faire ensemble un projet conçu à partir d’une vision globale de l’avenir de l’île... Se rassembler, ce n’est pas renoncer à être différents, mais c’est bâtir ensemble le socle à partir duquel chaque parti fait ses propositions... »

Force nous est donc de nous demander alors pourquoi certains dans notre pays, qu’ils soient de “droite” ou de “gauche” comme on dit, s’entêtent dans le dénigrement systématique. Force nous est encore de nous demander pourquoi il est si difficile à certains, dans ce pays, de s’asseoir à la même table, au même rang et se donner la main et le mot pour bâtir ensemble le socle commun. Force est également de pester contre cet ami que j’aime bien et qu’il me faut donc bien châtier après que, dans notre journal d’hier, il trouvait que « la laïcité est détournée et la République poignardée » quand un Évêque pleinement poète salue une dame de la politique assurément un peu naïve et lui épingle sur le revers du paletot un insigne national. Comme si pour être amis, il nous fallait être de la même loge ! Et la complicité entre nous, oté !

Et qu’Albert Ramassamy, visiblement ému, se félicite que « la présence au Conseil Général dans une ambiance chaleureuse, de Jean Louis Debré et Paul Vergès en mars dernier a brisé notre “mur de Berlin”, a cassé les clivages politiques des années 60 à 80 » et a ainsi ouvert la voie « pour achever dans une union sans précédent la décolonisation par la départementalisation », permettez que j’y retienne l’essentiel : notre île a besoin de sagesse dans beaucoup d’ambition et de responsabilité dans beaucoup d’audace.

Car ce sont nos pas qui font la route. Tous nos pas... pour toute notre route. Notre destin, si vous préférez.

Raymond Lauret


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