Quand l’illusion rattrapait l’imposture (ou vice-versa)

11 février 2008

Que l’on ne se trompe surtout pas. La réflexion que nous menons avec d’autres amis (élus, responsables de la société civile et de la vie associative), réflexion qui veut montrer que le régime indemnitaire que la République consent à ses élus est souvent infondé et n’inspire pas toujours le respect du citoyen averti, cette réflexion ne vise pas la majorité des élus eux-mêmes.
Certes, il y en a qui se sont saisis de l’aubaine pour en faire l’outil de petits marchandages et d’allégeance consentie dans leurs rapports à leurs colistiers. Ceux-là, ces cumulards véreux, ils sont une grosse poignée. On les connaît. Et ils ne cachent pas qu’ils sont à la recherche pour eux-mêmes de postes copieusement rémunérés. Les milliers d’euros alors perçus viennent s’ajouter à leurs déjà confortables revenus de chefs d’entreprise(s) ou de retraités.
Oui, ceux-là, on les connaît.
Ne les confondons pas avec ces honnêtes citoyens (de droite ou de gauche, comme on dit) qui aimeraient remplir pour le mieux la fonction pour laquelle ils ont été élus. Pour cela, on les paye. On les paye, en toute légalité. Peut-on leur en tenir grief ? Non, bien sûr que non...
Notre réflexion vise donc à dénoncer ces textes « pondus depuis Paris » par une classe dirigeante qui a un jour décidé que plus on a d’élus hautement rémunérés, plus la démocratie se portera bien et plus le peuple y trouvera son compte. L’illusion rattrapait alors l’imposture (ou vice-versa). Car on n’a pas prévu de barrières pour que ne soit pas disqualifiée en peu de temps une intention qui pouvait être bonne.
Ainsi, par exemple, mais exemple particulièrement révélateur, pourquoi 29 vice-présidents dans un seul EPCI de notre île, nombre pourtant légalisé par des textes ?
Ainsi, pourquoi avoir “mensualisé” la rémunération des élus alors même qu’ils peuvent, d’une part, « ne s’intéresser » qu’à un nombre symbolique de commission, voire à aucune (l’enquête du “Quotidien” parue le lundi 4 Février dernier sur les élus régionaux est on ne peut plus explicite là-dessus !) et, d’autre part, ne pouvoir faire, par exemple, que “12 apparitions” pour 19 convocations en 4 ans ! Avec, à la clé, 98.252 euros d’indemnités, soit, ironise cruellement Idriss Issa, 8.187 euros la séance !!! Et cela est parfaitement légal. Mais est-ce moral ? Est-ce tout simplement acceptable quand on connaît ce que touchent mensuellement nombre de travailleurs ?
Ce problème n’est pas propre à notre île. Ainsi, l’hebdomadaire “Marianne”, dans son dernier numéro, évoque la situation au Conseil de Paris où, écrit-il, « parmi les recordmen de l’absentéisme, on trouve les vestiges vivants de l’ère Chirac : Bernard Pons, Jacques Toubon, Edouard Balladur, suivis de près par Pierre Lellouche, tête de liste dans le VIIIème arrondissement... ».
Et notre confrère de poursuivre : « Tous sont adeptes du « travailler plus pour gagner plus ». Mais, en réduisant leur temps de présence d’un tiers, ils perçoivent l’intégralité de la double indemnité des Conseillers de Paris », c’est-à-dire près de 4.000 euros par mois ! 4.000 euros dont, vous vous en doutez bien, ils n’ont nul besoin pour vivre !
A l’heure où, pour revenir chez nous à La Réunion, des centaines de TOS sont invités à aller pointer à l’Assedic, à l’heure où tant d’emplois jeunes mériteraient d’être aidés, à l’heure où l’ANT n’a pas besoin qu’on diminue de façon drastique les moyens dont elle a besoin pour remplir sa mission d’intérêt général dans ce qui est une véritable “Délégation de Service Public”, comment peut-on avancer que les caisses de l’Etat sont vides puisque, dans le même temps, on lance des décrets qui confortent honteusement des indemnités versées pour un travail qui consiste en de la seule présence ? Présence même pas forcément obligatoire, on le sait désormais... Car avec le bouclier du fameux « Quorum », on peut s’arranger pour ne jamais apparaître ! Il suffit pour cela que la moitié seulement des élus de l’assemblée en cause pointe à l’appel.
Oui, il n’y a pas à dire : l’Etat, notre Etat à tous, n’a pas ici raison. Et, ne l’oublions pas : l’Etat, c’est nous...

Raymond Lauret


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