Une histoire d’espadon et d’enfants qui sont entrain de grandir sans nous...

26 septembre 2005

L’ADIR (Association pour le Développement Industriel de La Réunion) soulignait vendredi soir que, mine de rien, elle a déjà 30 ans. Moment important on s’en doute et qui, tout naturellement, se déroula autour de quelques points symboliquement forts.
Il y eut tout d’abord, annoncée sur le carton d’invitation, l’intervention de M. Michel Godet, Professeur au Conservatoire national des Arts et Métiers, également observateur et provocateur à la sévérité caustique du monde économico-politique.
En un temps bien trop limité pour pouvoir condenser les milliers et les milliers d’heures de réflexion qui lui ont permis d’aboutir à une apparente maîtrise des défaillances de tout “un système”, Michel Godet ne put que survoler son sujet, à savoir l’enjeu des “territoires et des entreprises face aux mutations”. S’il est vrai qu’il compensa l’évidente complexité des problèmes par des phrases et des formules choc et un remarquable sens de l’humour, on notera qu’il a laissé une interrogation, voire un immense doute : le “cas” de La Réunion pourrait-il s’accommoder des “leçons” délivrées par l’éminent professeur ? Un peu forcé par Maurice Cérisola, le président de l’ADIR, à donner mon sentiment, je reconnais n’avoir pas été à la hauteur dans l’exercice qu’il eut fallu faire. J’aurais dû me contenter de saluer la performance que notre tissu entrepreneurial réalise, dans un contexte difficile de lourd chômage structurel, d’insularité, d’étroitesse du marché et d’environnement social particulier. Je l’ai très mal fait, sans doute parce que j’avais été bel et bien gêné qu’on fasse rire une salle alors que dans notre pays, tout est loin d’être “à la fête”. Grâce à M. Godet, je le sais aujourd’hui plus que jamais : je n’aime pas certaines fêtes !
Il y eut ensuite l’instant qui vit Gilles Albin expliquer comment un article de presse (Martine Veith dans le “JIR” du jeudi 22 septembre) peut, parce que le public se contente souvent de la lecture du titre, semer le trouble et jeter sa petite menace sur un pan de notre économie. Il s’agit du "seuil européen de 1 mg de mercure par kg d’espadon largement dépassé". L’article de Martine Veith l’explique pourtant bien : sur les 25.000 poissons pêchés à La Réunion, on a fait des prélèvements sur 27. Neuf ont présenté des taux de mercure supérieurs à la P.P.M. (une sorte de plus petite mesure admise comme seuil de tolérance). L’espadon se nourrit essentiellement de céphalopodes, lesquels céphalopodes ont la particularité de fixer le mercure de la mer. Ce mercure appartient à la nature, comme l’Azote, le CO2 ou l’alcool dans le vin. En meurt-on quand on en consomme ? Si on en abuse violemment, oui. Et si on n’en abuse pas ?
Pour que le mercure de l’espadon soit nocif, il faudrait en manger 500 grammes par jour pendant six mois. Tel n’est pas, loin s’en faut, notre cas à tous. Alors ?
Alors, ce samedi, je suis allé chez mon poissonnier et j’ai acheté de l’espadon. J’en ai donc mangé parce que j’en ai toujours consommé. Et je continuerai à en acheter sans rien exagérer ! Et c’est très bon...
Troisième moment fort de cette rencontre : l’imminent départ de Catherine, la directrice de l’ADIR, l’épouse de Marcel Gris, lequel assure d’importantes fonctions de direction à la C.C.I.R.
Catherine Gris a fait le choix de l’éducation de ses enfants. Sa profession et celle de son mari ont privé ces derniers de la présence de leurs parents. Ceux-ci ont décidé que ça ne pouvait continuer ainsi. Un choix, celui du sacrifice, s’imposait. Le sentiment de mère s’est éveillé en ce qu’il y a de plus fort dans la femme. Catherine arrête de travailler. Vendredi soir, elle me le disait, avec beaucoup de dignité et de naturel, sans montrer de tristesse. Ces enfants qui sont entrain de grandir sans nous, ce sont des petites choses de la vie qui peuvent paraître insignifiantes à certains. J’avoue avoir une attention pour ceux à qui cela arrive aussi...

R. Lauret


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