Le racisme ou l’intolérance expliquée à mes semblables

23 mars 2011

Paradoxalement, que l’on soit instruit ou illettré, dépourvu de connaissance ou d’instruction, cet instinct grégaire n’épargne personne, et ce dans les deux genres humains.
La méconnaissance, le manque de connaissance, l’ignorance, l’indifférence ou le manque de curiosité expliquent le monde de méfiance dans lequel l’intolérance prend le pas sur la raison et parfois développe toutes formes possibles de violence, que ce soit verbale ou physique.
Un poète camerounais, dans un de ses recueils "Petites gouttes de chant pour créer l’homme", invite à la réflexion à travers ceci :

Je ne suis pas un noir
Je ne suis pas un rouge
Je ne suis pas un jaune
Je ne suis pas un blanc
Mais je ne suis qu’un homme
Ouvre–moi mon frère !...
Ouvre–moi ta porte
Ouvre-moi ton cœur
Car je suis un homme
L’homme de tous les temps, de tous les cieux
L’homme qui te ressemble !...

La méconnaissance et les préjugés

Il est navrant de constater que, parce que certains n’ont pas accès à certains savoirs ou n’ont pas les mêmes niveaux de qualifications que d’autres, ou encore ne partagent pas les mêmes cultures et religions que d’autres, se voient infliger la peine maximale de leur "pas de chance".
Ainsi, sur les lieux de travail, sur les chantiers, dans les grandes entreprises, dans les écoles, dans les hôpitaux, etc., on observe avec amertume que, parce qu’on est en situation d’infériorité par rapport au chef ou à la hiérarchie dirigeante, on peut faire l’objet de grands mépris et subir du coup tous les coups bas, humiliants, déshumanisants et amenant parfois à douter de sa personne. Parfois, on peut être privé de ses droits, car l’autre s’arroge le pouvoir du complexe de supériorité en espèce humaine ou en possession.

Le manque de curiosité ou l’indifférence

Nous côtoyons de plus en plus un monde qui balance entre l’indifférence et l’intolérance. Ceci s’explique en partie par le fait qu’aujourd’hui, de plus en plus, aucun effort n’est déployé pour se rapprocher des semblables, pour les aborder. D’entrée, on s’arrête sur le physique pour juger, pour conclure et faire une idée parfois erronée de l’inconnu.
Dans les sociétés occidentales, et surtout dans les grandes villes occidentales, où les communautés élémentaires ont disparu ou se sont affaiblies, s’accroît l’indifférence, chacun est seul et plus personne ne communique. On peut même aller jusqu’à s’obliger à ne pas prêter assistance à personne en danger, parce qu’il n’est pas comme soi. Ce mal ronge les relations humaines réciproques. On craint l’autre car il ne fréquente pas les mêmes personnes que nous, car il ne s’habille pas comme nous, ne mange pas comme nous, ou tout simplement on refuse de voir en lui un être doté des mêmes facultés intellectuelles que nous. On le voit moins que rien, et on lui dénie l’existence. Tout se passe comme si le mot existence n’appartient qu’à un camp, celui de ceux qui se l’approprient. Un certain égocentrisme ambiant est développé et soutenu, voire même propagé. « L’homme occidental, disait le poète Édouard Glissant, « aura à grande douleur cessé de croire qu’il est lui-même au centre de ce qui est ».

L’intolérance et la violence

Aujourd’hui plus répandue qu’ils ne l’étaient auparavant, ces maux sociaux, l’intolérance et la violence, affectent toutes relations entre individus. L’instinct de possession et de sécurité pousse l’être à se replier sur lui-même en traçant son espace de distanciation par rapport à l’autre, l’inconnu est donc considéré prédateur. Ainsi défend-on sans raison véritable son territoire contre toute intrusion.
Dès lors qu’on sent l’existence de l’autre, on sent la menace et on déploie son arsenal défensif contre ce symbole du danger qu’on doit à tout prix dominer voire exterminer. Ainsi va-t-on refuser l’existence à celui qui ne partage pas les mêmes cultures et la même croyance que nous. Un certain donneur de leçon faisait la morale - il n’y a pas si longtemps - au peuple non civilisé africain à Dakar, quand il cite : « ils ne sont pas encore rentrés dans l’histoire ». Cette histoire, savons-nous laquelle et qui l’a contée ? Et pour qui ?
C’est une forme d’ostracisme, on n’accepte pas que les autres soient différents culturellement. Comme si tout doit être calqué sur un modèle culturel dominant qui serait la référence mondiale.

L’école ou la mobilisation de l’intelligence

Certes, l’être humain derrière ses origines est un individu signé par ses besoins, ses limites et ses dépendances, qui a peur. Déjà, il a peur de la vie elle-même, en ce qu’elle comporte d’imprévisible et d’improbable, encore plus et sans raison. Il a peur de l’inconnu avant même de le connaître. Cet autre qui pourrait mettre en péril son intégrité physique. Seule la volonté manifeste de chacun dans la société à se rapprocher de l’autre, de passer de son égo à une périphérie puis à une autre, en bannissant l’étape du nombrilisme, aiderait au dépassement des préjugés ou de fausses idées que l’on peut se faire de soi et des autres. Accepter l’autre tel qu’il est dans son existence comme notre semblable avec ses origines, ses particularités et ses différences, ne constituerait-il pas finalement que des atouts dont on peut s’enrichir, dans notre vie individuelle et sociale ? Aussi, devoir incombe à ceux qui, de par leur activité d’informer les masses, de se servir judicieusement des moyens à leur disposition pour éclairer réellement sur les faits, la vie et le milieu de vie des hommes, de rétablir la vérité, en évitant d’apporter pour des raisons mercantiles ou philosophiques leurs commentaires qui parfois dénaturent et créent des confusions, comme vient d’illustrer une grande chaîne nationale sur les peuples noirs d’Afrique. L’école semble aujourd’hui le seul lieu de fraternité qui constitue le dernier rempart, qui peut encore corriger ces égarements citoyens très déplorables et affligeants. Grâce à elle, par l’apprentissage des valeurs, de l’histoire et de la langue communes, nous intégrons pour la vie un socle commun de connaissances, qui unit et consolide notre cohésion, et fait oublier ce qui nous distingue. Seule l’école, aujourd’hui, lorsqu’on ne l’en empêche pas dans sa mission, permet encore la construction de notre identité culturelle partagée, de s’enrichir de la diversité, de ne pas rester tournés vers nous-mêmes. Au contraire, c’est par elle que nous resterons dans le mouvement du monde, ce que le poète français Édouard Glissant nomme la "créolisation du monde".

Bienvenu H. Diogo


Rectificatif

Hier, nous avons fait une erreur de signature, comme l’on souligné certains de nos lecteurs. Ce n’était pas une chronique de Raymond Lauret mais de Raymond Mollard. Toutes nos excuses pour cet incident.

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